Dans une République, plusieurs services sont assurés par l’État, telles la police, la défense, la santé, l’éducation. Ils sont accessibles aux citoyens sans critères de ressources. Les citoyens, de leur côté, assurent le financement du budget de l’État grâce à l’impôt qu’ils acquittent selon leurs moyens. Parmi les politiques conduites par l’État, il en est une qui a produit des résultats plutôt satisfaisants, c’est la politique familiale, menée avec constance depuis bientôt un siècle. Elle n’est sans doute pas étrangère au fait que notre taux de fécondité est supérieur à deux et le premier en Europe. C’est peut-être ce qui a donné à notre gouvernement l’idée de s’y attaquer, mettant en avant des économies apparemment significatives mais en fait ridiculement faibles comparées aux libéralités consenties sans contreparties aux entreprises.
J’en suis venu à douter de la santé mentale de certains de nos représentants lorsque j’ai entendu une député socialiste avancer que l’universalité des allocations familiales n’était pas remise en cause puisque toutes les familles, même celles disposant d’un revenu mensuel net supérieur à 8000 euros, percevraient des allocations. J’ignore de quelle boîte à malice sont sortis ces seuils de 6000 et 8000 euros mais j’aimerais connaître les savants calculs ayant permis de déterminer que, au-delà de ces seuils, seule la moitié puis le quart des allocations versées aux moins fortunés pouvaient profiter aux privilégiés. Si j’ai bien compris, le versement d’allocations familiales au-delà de 8000 euros préserverait le caractère universel de ces allocations. Faut-il en conclure que, pour ces esprits singuliers, une allocation d’un montant symbolique d’un seul euro au-delà d’un revenu mensuel de 8000 euros permettrait de conserver aux allocations familiales leur caractère universel ?
Le pacte républicain qui fonde notre société stipule que certaines fonctions sont assurées pour tous. Dans le même temps, par leurs impôts, les citoyens financent l’État en fonction de leurs moyens. C’est violer ce pacte que de réduire les allocations familiales de contribuables qui, supportant un taux d’imposition de 30%, voire de 41% sur leurs revenus, apportent leur part aux ressources de l’État. Ce coup de canif dans le pacte républicain est grave parce qu’il peut ouvrir la voie à d’autres atteintes qui lui seraient portées ultérieurement.