Cette semaine, c’est la « SMAM » ou semaine mondiale de l’allaitement maternel. Une bonne occasion pour faire un billet et échanger avec vous sur le sujet. On a en effet appris à cette occasion que si les françaises étaient assez nombreuses à allaiter à la maternité, la majeure partie d’entre elles arrêtaient durant le premier mois de bébé, ramenant la France à un taux parmi les plus faibles d’Europe. En cause le congé maternité jugé trop court, mais aussi un manque d’accompagnement et de préparation pour un allaitement serein et efficace.
S’il y a quelque chose qui me choque particulièrement sur ce sujet, c’est la virulence avec laquelle deux camps s’affrontent. J’ai allaité Petit Monsieur pendant 8 mois et je pense allaiter Mini Monsieur tant que ce sera possible pour moi et pour lui, mais je ne suis pas une terroriste de l’allaitement. Je trouve horribles les commentaires de celles et ceux qui taclent à tout va les mamans qui ne souhaitent pas allaiter leur enfant. Tout d’abord parce qu’on ne peut pas toujours. Les statistiques publiées cette semaine le prouvent, beaucoup de mamans arrêtent l’allaitement pour cause de douleurs, complications, et bien souvent dans un grand désarroi. D’autres n’ont juste pas envie d’allaiter, et avec les laits infantiles produits de nos jours peuvent tout à fait s’en passer sans que ça nuise d’une manière ou d’une autre à la santé de leur bébé. Que ce soit l’un ou l’autre de ces deux choix, nous sommes sans cesse jugées par nos pairs. Les anti- qui vont nous accuser de faire reculer la cause féministe, et les pro- qui vont vous accuser de nuire à la santé de votre enfant. Jamais de demi-mesure. Ça m’horripile.
Oui les anticorps de la mère vont renforcer le système immunitaire de bébé avec l’allaitement.
Oui les composants des laits infantiles vont aider à lutter contre les coliques.
Tu choisis quoi alors ?
Comme souvent chaque méthode a ses bienfaits et ses travers.
Elisabeth Badinter a fustigé dans son ouvrage « Le conflit – La femme et la mère », paru en 2010, le retour en force d’un certain naturalisme, certes quelque peu culpabilisant pour les mamans, qui prônait un retour aux sources de la maternité, avec sa panoplie de concepts tels que le maternage, et de principes comme l’allaitement exclusif, les couches lavables, l’accouchement sans péridurale, le congé parental, etc… Pour la philosophe, ces concepts visaient à une aliénation de la femme à son domicile, faisant du bébé un nouvel allié de la domination masculine. L’allaitement maternel en devenant l’étendard. Badinter avait raison sur un point dans cette révolution idéologique : ses pourfendeurs, tels que la Leche League, étaient passés de l’allaitement comme choix à l’allaitement comme devoir. Rien de plus culpabilisant pour la jeune mère déjà en proie à une montagne de doutes… Là où je ne suis pas d’accord, c’est que lorsqu’on s’attaque à l’allaitement, tel que le faisait Madame Badinter, on en revient à culpabiliser la jeune mère de rétrograder la condition féminine sous le joug de la domination masculine.
Elisabeth Badinter a depuis mis de l’eau dans son vin, et réorienté son discours autour du choix de la femme et non des choix que la société ferait pour elle. Libre à chacune de décider pourquoi et comment nourrir son enfant, et cette fois je suis bien d’accord. Avec la SMAM, cette semaine, la France passait pour le mauvais élève de l’allaitement. Une fois encore, les médias ont joué la carte de la culpabilisation : « vilaines françaises, vous n’allaitez pas assez ». Et puis en creusant un peu les chiffres, on se rend compte que ce n’est pas forcément par choix, que les françaises n’allaitent pas, ou pas longtemps. Imaginez le résultat de telles accusations sur une jeune maman qui n’a pas réussi à maintenir son allaitement ! Et sur celles qui ont pesé le pour, le contre et décidé de choisir le biberon. Et d’autre part, les féministes de s’en réjouir, pas vraiment plus glorieux… La preuve, les pays scandinaves sont les champions de l’allaitement, grâce notamment à un congé mat plus long, et ces pays sont bien devant nous en termes de parité et de place des femmes dans la société ! Comme quoi…
L’accompagnement est mis en cause : je peux en témoigner. A la maternité il y a 4 ans, le lendemain de mon accouchement, je me faisais engueuler parce que je ne réveillais pas mon bébé toutes les quatre heures pour lui fourrer un sein dans la bouche, sein qu’il prendrait pas de toute façon parce qu’il était fatigué. Au retour à la maison, avec un allaitement à la demande, aucun souci. Cette fois-ci, le personnel médical a décrété que comme j’avais allaité Petit Monsieur 8 mois, j’étais experte en la matière, pas besoin d’aide ni de conseils… Résultat, mauvais placement de bébé, crevasses, et les douleurs qui vont avec. La sage-femme qui est venue me voir m’a toutefois rappelé qu’il valait mieux éviter d’écouter le personnel médical, car tout le monde, a fortiori dans un milieu féminisé comme la maternité, a son avis sur la question et ses bonnes pratiques… « Faites comme vous le sentez », la phrase que j’aurais aimé entendre il y a quatre ans et qui m’aurait évité des séquences de doutes et de découragement. Les programmes de retour à domicile (Prado) sont sur ce point une excellente chose. Proposées dans ma région depuis peu, j’en ai bénéficié et donc reçu une sage-femme à domicile à mon retour de la clinique. La rencontrer dans son contexte de vie quotidienne aide beaucoup pour les questions d’allaitement. Plus de crevasses le lendemain et un allaitement beaucoup plus serein !
Personnellement, j’allaite parce que je trouve ça pratique, on peut partir en vadrouille avec moins de choses, on ne sera pas obligés de rentrer en catastrophe sous les hurlements pour préparer le bib, en plus c’est gratuit. Et c’est tout de suite prêt, argument de taille pour les feignasses comme moi. Ok le papa est moins mis à contribution, quoique chez nous c’est Monsieur qui se lève la nuit pour m’apporter bébé, donc pas de conflit sur ce point. Ok, il faut aussi rester avec bébé presque tout le temps, quoique là encore, au bout de quelques semaines on peut aisément tirer son lait et le donner au biberon lors d’absences. c’est d’ailleurs ce que j’avais fait avec la crèche. Et puis on peut passer au mixte par la suite, mon Petit Monsieur avait déjà quelques bibs de lait infantile bien avant que j’arrête de lui donner le mien. Une transition en douceur qui a permis un sevrage impeccable, presque plus difficile à gérer pour moi que pour lui ! Parce que j’allaite aussi parce que j’aime bien ça ! Mais ce sont mes raisons et chacune est LIBRE d’avoir les siennes sans tomber dans les travers inverses et fustiger celles qui pensent autrement. Pour moi c’est plutôt ça le féminisme. Savoir ce qu’on veut et respecter ce que veulent les autres ! Ne pas imposer sa loi.
De toute façon, quelque soit la méthode, sein ou biberon, tant qu’il est donné avec amour c’est tout ce dont bébé a besoin pour bien manger !
Et vous alors, vous avez fait quoi, comment et pourquoi ?