Revenge - 8/10

Par Aelezig

Un film de Susanne Bier (2011 - Danemark, Suède) avec Mikael Persbrandt, Trine Dyrholm, Ulrich Thomsen, Markus Rygaard, Wiliam Jonk Nielsen

Petite anthologie de la violence ordinaire.

L'histoire : Anton est médecin humanitaire en Afrique, confronté à l'horreur tous les jours ; horreur des maladies que ces populations pauvres contractent en un rien de temps, horreur des barbares voisins qui jouent de la machette pour semer la terreur. Epuisé, il rentre chez lui, au Danemark pour quelques jours de vacances. Et apprend que son fils de dix ans, un enfant plutôt réservé, est victime de harcèlement et qu'un copain, nouvellement arrivé, a tabassé son agresseur... les deux enfants sont entendus par la police.

Mon avis : Encore un superbe film de Susanne Bier (After the wedding, Nos souvenirs brûlés, Love is all you need...). Cette humaniste magnifique raconte des histoires de gens ordinaires, confrontés à la dualité de l'homme universel ; au travers d'incidents de parcours, comme on en connait tous, le débat s'élargit sur un problème de société plus général, et nécessitant une réflexion approfondie. Sa mise en scène, sobre, mais extrêmement bien rythmée, cadrée, avec des images choisies, rend son propos captivant, alors qu'il s'agit d'histoires assez simples, en apparence.

Ici, c'est la violence le point de mire. La violence ancrée au coeur de l'homme depuis la nuit des temps, celle de l'instinct de propriété, de la jalousie, de la vengeance (qui se mue alors en un cercle sans fin) et celle de la perversion, la cruauté pour la cruauté. Une violence qui s'exerce partout, depuis des villages misérables africains, où sévissent des hommes armés de machettes, jusqu'aux cours de récréation. Des moutons et des loups ; des moutons qui parfois se transforment en loups et lynchent le tortionnaire. Et au milieu quelques hommes courageux qui professent le pacifisme et dénoncent encore et encore l'absurdité de la violence ; des hommes qui tendent l'autre joue et qu'on appelle des poules mouillées...

Captivant de bout en bout, entre les scènes dans le dispensaire africain où la misère est si totale qu'on culpabilise dans son fauteuil d'avoir râlé tout à l'heure après son voisin, les scènes hallucinantes de cruauté des intégristes qui prennent la religion pour prétexte à leurs fantasmes, et des petits garçons adorables qui souffrent d'absences parentales (éloignement, mort, divorce...) jouent à la guerre sur vidéo et cachent des couteaux dans leurs tiroirs... Et l'esprit de vengeance qui anime tour à tour chacun des personnages, c'est-à-dire... nous.

On notera une scène stupéfiante où Anton, suédois d'origine, se fait inviter à "retourner chez lui" ! Et se fait gifler à plusieurs reprises par son agresseur, sans moufter. La racisme entre vikings. Le racisme n'a aucune limite. Le courage non plus... mais disons qu'il est moins courant.

C'est fascinant, c'est magnifique. J'adore. Les acteurs sont remarquables, y compris les enfants.

Susanne Bier est géniale.

Je voudrais absolument voir sa version de Brothers, dont les Américains ont fait un remake du même nom, qui m'avait déçue, alors que l'histoire est très forte.

La presse aime : "Ambitieux dans son contenu, puissant dans sa construction et d'une finesse psychologique remarquable, "Revenge" est un coup de maître." (Le Parisien) ; "D'une intensité rare et porté par des acteurs époustouflants, ce pur joyau n'a pas volé son Oscar 2011 du Meilleur film étranger." (Télé 7 Jours) ; "Susanne Bier affleure [s]es thèmes avec justesse et sensibilité (...) L'histoire est forte, traitée sur un mode sobre, sans parti pris." (Le Figaroscope) ; "Remarquable directrice d'acteurs, ­Susanne Bier signe un drame existentiel et humaniste qui met nos nerfs à vif." (Paris Match). Même son de cloche chez les spectateurs.

Les moins emballés soulignent l'aspect démonstratif, et la fin trop convenue. Ce qui n'est pas faux. Mais le film est selon moi bien plus fort que ces quelques maladresses. La violence et le pacifisme peuvent-ils vraiment être associés au terme "convenus".