Depuis son émergence progressive, la conscience de l’homme n’eut de cesse que d’élargir son horizon d’appréhension de son statut et position relativement à l’ordre naturel. A partir son environnement étroit limité à sa survie, puis sa représentation de la platitude de la Terre, la définition de celle-ci comme sphère, sa position relativement au Soleil, il découvrit que celle-ci n’était qu’un astre parmi une grande quantité d’autres, pour élargir enfin son horizon à ces 13.7 milliards d’AL censés constituées la limite de l’univers.
Cette idée d’un univers vaste mais fini comportant un très grand nombre d’astres mais tout aussi limité est assez rassurante pour l’esprit puisque qu’elle nous renvoie le sentiment d’un monde, certes en expansion, mais achevé, livré tel quel depuis sa genèse datée.
Beaucoup plus inquiétantes sont ces trois idées : 1) celle d’un univers infini, 2) comportant un nombre incalculable d’astres, 3) qui serait incréé et éternel.
1) Il est quasi impossible de penser à l’infinité de l’univers sans que sa conscience vacille et atteigne ses limites devant l’illimité d’un mouvement, d’un espace, qui n’auraient jamais de fin et qui se poursuivraient indéfiniment sans jamais rencontrer de frontière. Cela supposerait que le temps de ce parcours soit lui-même infini, que ce mouvement dure toute une éternité L’esprit humain ne peut l’admettre, il doit se tranquilliser en posant des bornes, ou un univers sphérique comme celui d’Einstein.
2) Tout aussi insoutenable est cette idée d’une quantité indénombrable d’astres emplissant par définition l’infinité de l’espace. Il doit exister en conséquence un nombre lui aussi très grand de planètes à l’égal de la Terre où la vie a pu se déployer à l’identique selon les lois d’un déterminisme évolutif qui dispose de tout son temps pour aboutir. Dès lors, l’homme n’est qu’une émergence parmi d’autres occurrences ayant eu lieu et qui auront existence : il n’est plus l’unique et l’élu chéri d’un Dieu particulier. La Terre n’est plus qu’une petite planète insignifiante dans un cosmos aux astres monstrueux déployant une énergie phénoménale parmi des milliards de milliards de galaxies comportant elles-mêmes des milliards d’étoiles.
3) Inimaginable également que le cosmos puisse être incréé, qu’il n’y ait pas eu de surgissement comme nous l’enseigne le cycle de la vie impliquant mort et renaissance et auquel notre esprit est habitué. Un univers incréé suppose un principe éternel à partir duquel le cycle apparition/disparition s’enclenche, mais celui-ci n’a jamais de fin, il se renouvelle éternellement. Ce qui nait et disparait, ce sont les astres et les galaxies, jamais leur totalité, si bien que nous sommes assurés de la permanence de la matière. Ainsi, le mouvement et le temps sont rendus possibles au sein d’une éternité qui les accueille et les déploie. Mais que valent la centaine d'années d'un vie humaine si brève face à cette éternité épouvantablement "longue" d'un passé et celle d'un futur a venir ? Notre rapport au temps est totalement modifié, nous ne nous situons plus relativement au temps historique daté mais nous face à l’incompréhensible éternité de l'Etre.
Comme on le constate, ces trois idées bouleversent complètement notre positionnement et statut dans l’univers. Notre horizon s’élargit mais vers les domaines de l’insoutenable que notre raison peine à intégrer. Aussi, comprenons bien l’origine des résistances à notre modèle d’univers éternel et infini qui relèvent d’une structuration ancestrale de la conscience. Il nous faudrait opérer une révolution intérieure à l’égale de celle que les hommes du passé durent successivement accomplir, notamment à l’époque de Copernic, quand la Terre fut destituée de sa position de centre de l’univers.