d'après CHRONIQUE de Maupassant
Saluons la justice de notre pays !
En quelques jours, elle a rendu deux arrêts
Étonnants,
Surprenants.
Elle a condamné une jeune furie
Qui avait, au vitriol, défiguré
Le visage de sa rivale. Puis,
Une semaine après,
La justice a frappé
De la même peine un mari
Qui avait logé
Une balle de pistolet
Dans la tête de son concurrent.
Dans la première
Affaire,
Une femme, devenue laide horriblement,
Portera jusqu’à sa mort
Les marques de l’infidélité de son amant.
Qui est coupable ? L’homme assurément.
Or,
Il ne vient déposer
Sur les faits,
Que comme témoin. Mais,
La vraie condamnée,
La grande punie, c’est l’innocente.
Verdict : Un an à la prison de Nantes
Pour la furie. Fort bien.
Mais cela n’est rien.
Peut-on
Enlever les oreilles, les lèvres, le nez
Et brûler les yeux
De la rivale qui vous gênait
Pour une seule année de prison ?
N’aurait-il pas été plus judicieux
Dans cette affaire
D’ordonner à la furie
De verser à vie
À la victime, une pension,
Une vraie réparation
Pécuniaire ?
Dans le second cas, le mari avait toléré
De sa femme toutes les infidélités.
Il l’avait reprise dix fois.
Elle était repartie dix fois.
Alors, un jour, il lui fait jurer
De ne plus revoir son ami.
Elle obéit
Et respecte le traité.
Mais le mari est allé
Chez l’amant et l’a tué.
Et il n’écope que d’un an de prison.
Est-ce loyal cela, voyons !?
Cette manière d’apprécier,
Me semble t’il, laisse à désirer.