Je crois que je me suis un peu précipité en écrivant mon billet d'hier sur l'affaire des marins pêcheurs.
Je pensais bien naïvement que cette affaire était close, que l'aide inacceptable étant promise tout allait rentrer dans l'ordre, que les manifestants allaient cesser de manifester et que les pêcheurs allaient enfin pêcher.
Que nenni ! Les représentants syndicaux, qui ont négocié avec le ministre Barnier, appelaient à la reprise du travail, mais les pêcheurs eux-mêmes ne l'entendent pas de cette oreille et exigent "le gas oil à 0,40 € à la pompe" avant toute interruption de leur "action revendicative".
Ben voyons ! Comme je l'expliquais hier, l'état n'a strictement aucun pouvoir sur le prix de ce carburant particulier, entièrement détaxé. Appliquer cette revendication, ce serait donc tout bonnement en revenir à la pratique des prix administrés heureusement abandonnée depuis longtemps en France, celle qui faisait les beaux jours des économies du bloc soviétique. Quand je parlais de collectivisme ! Tout se tient...
Apporter des aides directes sur des fonds publics, c'est déjà plus que discutable, mais les usages dans ce pays sont ainsi faits, et il sera bien difficile de faire entrer dans les consciences que l'économie dirigée est une hérésie, et la source même des maux qu'elle prétend combattre. Apporter de telles aides à une profession en particulier, toujours sur les fonds publics et donc en utilisant la fiscalité supportée par l'ensemble de l'activité économique, ça devient du corporatisme d'état. Le faire en imposant un prix de vente à des distributeurs qui sont par nature de libres entrepreneurs, c'est de la dictature !..
Sans compter que dans le cadre des institutions européennes, dont nous profitons tous par ailleurs, pêcheurs inclus, de telles aides sont des entraves inacceptables à la concurrence. Que diraient nos braves marins pêcheurs bretons si l'état espagnol subventionnait ses propres navires pour qu'ils puissent à moindre frais venir pêcher le cabillaud au large de Belle Ile en Mer, même dans le cadre strict des quotas qu'ils décrient ? C'est pourtant ça qu'ils viennent d'obtenir de l'état français, et qu'ils ne trouvent pas encore suffisant...
Mais il y a pire encore ! On savait depuis plusieurs jours que des commandos de marins grévistes bloquaient par la force des dépôts de carburant, asphyxiant ainsi la distribution de produits pétroliers dans des régions entières, et pas seulement le carburant des bateaux. On savait aussi que d'autres bloquaient les accès aux ports, par la force toujours. Voilà qu'on nous montre hier en plein journal télévisé, sans aucun commentaire de fond (c'est peut-être ça qu'on appelle l'impartialité dans les milieux journalistiques), un commando de "grévistes en colère" mettant à sac le rayon poissonnerie d'un supermarché pour en retirer les produits d'importation et les distribuer aux automobilistes qui passaient par là...
C'est ce qu'on a pris l'habitude d'appeler une "action syndicale". Moi, j'appelle ça par son nom : un hold up en bande organisée. Et je ne comprends absolument pas pourquoi personne ne bouge ! Imaginons simplement qu'un quidam lambda entre dans une poissonnerie, braque le poissonnier, et fasse main basse sur une partie de la marchandise. Alertés par le voisinage, il ne fait aucun doute que les policiers du coin surgiraient pour se saisir du cambrioleur et qu'il serait poursuivi puis condamné pour cette action délictueuse. Et ce serait tout à fait normal, la mission première de l'état étant de garantir la sécurité des citoyens et de leurs biens.
Ici, rien de tout ça ! On regarde faire. On ne bouge surtout pas. Dans ces circonstances particulières, la mission de l'état n'est-elle plus de garantir la sécurité des biens et des personnes ? Sous prétexte de "revendication syndicale", ou simplement de manifestation, est-on dans son bon droit en prenant des otages (dans le cas des dépôts de carburants) et en dévalisant d'honnêtes commerçants (dans le cas du supermarché) ? N'est-on plus dans un état de droit dès qu'une catégorie de citoyens se plaint de son sort ? Il faut le croire, et c'est tout simplement lamentable. Un jour peut-être, un gréviste illuminé prendra-t-il le ministre en otage et le pendra-t-il haut et court en criant ses revendications. Ce serait une "action revendicative" là-aussi, surtout pas un assassinat, et peut-être faudra-t-il surtout là-encore ne rien faire ? J'ai déjà dénoncé vivement les (ex)actions syndicales dans un billet ancien. Rien n'a changé depuis, ni dans mon esprit ni malheureusement dans les faits...
Ca s'apparente à ce que le général De Gaulle appelait en son temps "la chienlit". Ca pourrait s'appeller tout simplement l'anarchie.