Après ses longs métrages sur le tango, le flamenco et le fado, le cinéaste espagnol Carlos Saura, 82 ans, a entamé le tournage à Buenos Aires d'une co-production hispano-argentine sur le folclore argentin. Ce documentaire, dépouillé de toute intrigue dramatique, devrait s'intituler Zonda, Folclore Argentino, et rassembler quelques unes des plus grandes célébrités du genre, dont quelques redoutables représentants du folclore for export comme El Chaqueño Palavecino (super-grosse vedette équipée d'un super-tourneur de super-star qui lui monte partout sur le continent des shows super-clinquants à la Johnny Hallyday) ou Los Nocheros (un groupe vocal qui joue à fond la carte du pittoresque et se présente sur scène dans des tenues aussi chamarrées et bucoliques qu'un packaging de yerba mate).
Ces monstres du show-bizz côtoieront des artistes beaucoup plus personnels comme Liliana Herrero et Jaime Torres, Pedro Aznar et Luis Salinas (lequel est bien plus un jazzman qu'un folkloriste tant et si bien que je me demande ce qu'il vient faire dans cette affaire).Le pianiste Lito Vitale est de l'aventure puisqu'il assure la direction musicale du tout. Dans le mélange, devenu habituel chez Saura, Vitale sera peut-être un gage de cohérence musicale.
Certains cinéphiles adorent ce style un peu fourre-tour du Saura de l'après-franquisme (et qui, à mon humble avis, manque un peu de discernement artistique, voire politique, comme si la transition espagnole avait vidé le cinéaste de l'esprit critique acéré qu'il manifestait sous la dictature, du temps où il était le gendre de Charlie Chaplin) mais il en faut pour tous les goûts et ma foi, si ce nouveau film permet de découvrir un pan de la musique argentine dont nous ne connaissons presque plus rien (1) en dehors de l'Espagne, tant mieux...
Página/12 consacre au cinéaste et à son nouveau film le premier article de ses pages culturelles, avec interview à la clé. Et photo en couverture.
(1) Nous en connaissions quelque chose dans les années 70 lorsque Mercedes Sosa et Atahualpa Yupanqui vivaient en exil, notamment en France, et jouaient dans nos salles et sur nos plateaux de télévision.