J'ai pris ce roman à la médiathèque sans savoir de quoi il s'agissait mais simplement parce que l'auteure est Anne Percin et que j'avais adoré son roman "Le premier été". Je ne savais pas quoi trouver derrière ce titre, si obscur. Les singuliers, ce sont des artistes (peintres, photographe) de la fin du 19e siècle : Hugo, sa cousine Hazel et son ami Tobias. A travers un échange de lettres entre chacun des protagonistes, on découvre leurs vies mais pas seulement. En effet dans ce roman excessivement bien documenté, Anne Percin nous dévoile la société, les moeurs de cette fin du 19e siècle avec en prime, les vies et caractères de Gauguin, Van Gogh.
Je ne suis pas spécialement fan de peinture, ma culture étant très limitée sur ce domaine et j'ai pris énormément de plaisir à lire ce roman. En effet, je ne crois pas qu'il faille être un fondu de peinture pour l'apprécier. Pour ma part, grâce à ce roman, j'ai pu remettre dans une époque, un art de vivre, des attentes sociétales, les oeuvres de Van Gogh & Gauguin et j'ai également été très sensible au personnage de Hazel et la place des femmes dans cette société. Des débats sur l"impressionnisme, le naturalisme et le réalisme alimentent les échanges de lettre, et ce point-là en fait un roman dans lequel, personnellement, j'ai beaucoup appris.
Ajoutez à cela les relations humaines : l'amitié, l'amour, la filiation, la mort, la maladie et vous tenez entre vos mains un livre qu'on ne lâche pas et d'une qualité littéraire rare. J'ai aimé être confrontée à cette échange de lettres, dans lesquelles il peut y avoir de la colère, de la rancoeur, de l'incompréhension et tout ceci sans vulgarité (Nous aurions beaucoup à apprendre de ces échanges au temps où les SMS et messages sur les réseaux sociaux font état de fautes de français et de vulgarité ).Les lettres entre Tobias et Hugo m'ont souvent fait sourire, j'aurais vraiment aimé connaître ce Tobias, avec ses remarques piquantes.
J'ai aimé voyager entre Paris, Bruxelles et la Bretagne. La construction de la tour Eiffel, ses polémiques, les salons d'art font plonger dans un Paris qu'on connaît peu. On est proche des protagonistes mais aussi des grands peintres de ce siècle : entre travail acharné, estime de soi, doutes, pauvreté on vit avec eux. On comprend ce qui les anime, ce qui les énerve. Les descriptions des moments de peinture acharné (notamment pour Hazel dans ce "nu" si contesté), les doutes de Hugo et son basculement vers un autre art qu'est la photographie enrichissent la base de l'histoire. Entre fiction et réalité, entre Paris, Bruxelles et la Bretagne, entre naturalisme et impressionnisme, entre hommes et femmes, entre peintres reconnus et anonymes, voilà toute la richesse de ce roman de la rentrée littéraire, un roman à part, un travail excessivement précis et très bien documenté de l'auteure. Bravo Anne Percin, je ne m'attendais pas à être embarquée à ce point dans cette histoire des singuliers, un très joli roman de cette rentrée, à découvrir, vraiment et qui donne tellement envie de se ruer au musée...
"Je suis juste, de plus en plus, de mieux en mieux, singulier. Et, singulier, cela veut dire seul, aussi…
"Il faut du courage pour se perdre"
Petite pensée pour Leiloona et Stéphie, aux portes de ce livre, hâte de lire votre chronique les filles!