Publié le 07/10/2014
Ambronay. « Avant le concert », la belle histoire d’une pianiste malvoyante
Caroline, la pianiste (à gauche) et Chantal, l’écrivain . Photo Jacques Giunta
Présenté hors concours, lors du Salon du livre, « Avant le concert », paru aux éditions de l'Harmattan a été écrit par Chantal Serrière. Il raconte l’histoire de la jeune Caroline Sablayrolles, malvoyante et musicienne. Rencontre avec l’héroïne et l’écrivain.
Comment a eu lieu cette rencontre ?
Chantal Serrière : Je venais d’écrire un livre sur un aveugle qui avait à son actif beaucoup d’exploits sportifs. J’ai présenté ce livre à Strasbourg. Caroline qui venait de créer une association regroupant des malvoyants et non-voyants, m’a rencontrée. Elle avait envie d’écrire son histoire, je lui ai proposé de l’aider, car elle a du mal à écrire. J’ai recueilli sa parole pendant deux mois, et souvent au téléphone. Le livre s’est construit petit à petit, à partir de l’histoire qu’elle m’a racontée, avec un objectif précis, rendre hommage à son professeur, une pianiste portugaise mondialement connue, Maria Joäo Pires.
Comment et pourquoi avez-vous rencontré cette pianiste ?
Caroline Sablayrolles : Notre rencontre a été assez particulière car j’ai beaucoup de difficulté dans mon parcours, à cause de mes yeux mais aussi de mes petites mains. J’étais traumatisée par le fait d’avoir des petites mains. Un jour, Maria Joäo Pires est venue jouer à Strasbourg où je réside, avec l’orchestre de la ville dans lequel mon père est musicien. Il m’avait proposé d’assister à une répétition avec cette grande pianiste, simplement pour l’écouter car elle aussi a mon handicap, des petites mains. Comme je vois mal, j’ai sollicité mon père qu’il demande à la pianiste de voir ses mains. Elle s’est pliée gentiment à ma requête et m’a demandé de venir jouer pour elle. Je suis revenue le lendemain avec toutes mes questions, mes problèmes, mes angoisses, mais sans lui dire. J’ai joué le mieux possible mais j’attendais ses réponses. Après l’audition, elle m’a convaincue d’aller la rejoindre au Portugal pour travailler. J’y suis allé plusieurs fois sur quelques jours. Trouvant les délais de travail trop courts, elle m’a demandé d’y aller pour une période plus longue d’environ 4 ou 5 ans. J’ai tout lâché et je suis partie. Je me suis abandonnée à ses mains et à son enseignement qui a été sans compter et d’une profondeur incroyable, car c’était bien au-delà de la musique. J’ai appris le portugais et mon séjour m’a permis de rencontrer mon mari, musicien également. Je suis maintenant pianiste professionnelle et professeur. J’essaie de transmettre ce que Maria m’a donné, à ma mesure évidemment. Je fais beaucoup de concerts et j’essaie d’avoir toujours des projets. Vu mon handicap visuel je dois tout mémoriser, car je ne peux pas lire une partition, donc mon répertoire n’est pas énorme.
Vous pourrez retrouver Caroline Sablayrolles au piano, mardi soir à 20 h 30 au logis abbatial de l’Abbaye, lors de la soirée lecture-musique rendant hommage à Marguerite Duras.