Pourquoi Sarkozy n'a pas bossé son retour

Publié le 07 octobre 2014 par Juan

 
Ses conseillers ont peut-être compris. Trois semaines après son (faux) retour en politique Nicolas Sarkozy a enfin détaillé des propositions, notamment dans les colonnes du Figaro le 3 octobre dernier.

Pour certain(e)s, il fut convaincant. Valérie Pécresse, ex-soutien de François Fillon, a ainsi sombré, et changé de bord en le ralliant, le dimanche suivant. 

Pour d'autres, il fallait faire mieux, puisque les obstacles sont encore nombreux sur sa route - des rivaux redynamisés aux électeurs perplexes, ou aux enquêteurs de justice qui progressent... 

Bref, Sarkozy devait être convaincant, mais il ne le fut pas.

Sarkozy n'avait pas bossé, cela finissait par se voir. 

C'était la vraie surprise de ce faux retour.


De vieilles idées
A la relecture, l'ancien monarque ressasse en fait des idées de mesures sans réelle vision d'ensemble. Il suffisait d'indiquer l'année de campagne électorale où Sarkozy, déjà candidat, avait émis chaque idée pour la première fois pour mesurer le désastre.
Ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ? Campagne 2007 !


"Rétablir le jour de carence'" en cas d'arrêt maladie dans la Fonction publique ? Campagne 2007 !
Créer un CDD de 5 ans pour les fonctionnaires ?  C'est déjà en pratique ! 
Comment notre homme de savoir pouvait-il oublier les (fausses) découvertes de ses propres anciens ministres ? En 2011, François Baroin, alors ministre de la Fonction publique, faisait ainsi mine de s'indigner: "Dans la fonction publique, vous pouvez avoir des CDD pendant six ans"... A l'approche de l'élection de 2012, sarkozy avait au conttaire promis de résoudre le sort de ces contrats précaires...  La fonction publique française compte environ 900.000 CDD...

Recourir au référendum pour réduire les droits sociaux ? Campagne 2012 !
Sarkozy propose par exemple cette méthode pour restreindre la portée du RSA ("est-ce que toute allocation doit avoir comme contrepartie une activité"). Cette grande idée de passer aux référendums pour court-circuiter la représentation nationale ou les "corps intermédiaires" était l'une des propositions phare du candidat Sarkozy en 2012. Il se garda bien d'autoriser tout référendum d'initiative populaire quand il était président. Sa réforme constitutionnelle de 2008 le permettrait, mais l'administration de Sarkofrance traina pour traduire la mesure en lois et décrets d'application...
Réduire le nombre d'enseignants ? Campagne 2007 ! 
...  mais améliorer leurs heures de présence (Campagne 2012 !) et leur rémunération (Campagne 2007 !)... ( "augmenter le nombre d'heures de présence des enseignants dans les établissements, afin qu'ils soient davantage disponibles pour les enfants qui en ont besoin"). En 2013, la Cour des Comptes livrait un dernier bilan de l'échec de Sarkozy en la matière.
Supprimer les 35 heures dans les entreprises qui le réclament ? Campagne 2007 !

Combien de fois Nicolas Sarkozy a-t-il fustigé les 35 heures ? On ne les compte plus. En 2007 déjà, le candidat bientôt président expliquait qu'il permettrait de déroger aux 35 heures, en échange d'augmentations de salaire sur la base d'un accord majoritaire dans les entreprises.
Plafonner les dépenses publiques à 50% du PIB ? Campagne 2012 !
(Il suggère un référendum pour amender en ce sens la Constitution. Une règle qui ne fut jamais respectée quand Nicolas Sarkozy était aux commandes.)
Rétablir la défiscalisation des heures supplémentaires ? Campagne 2007 !
(Cette idée, conjuguée à la précédente, est particulièrement hypocrite: en renonçant aux 35 heures, Sarkozy recule le seuil de calcul des heures sup...)
Fidèle à son habitude, Sarkozy sait aussi rester flou.
Sur la retraite, il assure qu'il faudra en reculer l'âge de départ à 63 ans ("il faudra sans doute passer à 63 ans rapidement"). Il fait mine d'oublier que la durée de cotisations nécessaire à une retraite complète est désormais de 43 ans, soit ce qui porte à 66 ans l'âge minimal moyen de départ à la retraite...
Sur le mariage homosexuel, il ne dit pas grande chose. Pire, une confidence publiée par le Nouvel Obs la même semaine a mis le feu aux foudres dans les rangs des opposants au mariage gay que Sarkozy traitait de "fascisme en loden". Pour Sarkozy, qui a trop agité les franges les plus extrémistes, le danger est grand d'une tea-partisation d'une partie de son électorat. En meeting à Vélizy (Yvelines), lundi 6 octobre, Sarkozy entreprend de clarifier son propos: il aggrave son cas. Il précise en effet qu'il faudra "réécrire la loi Taubira".
Sarkozy sait rester flou quand il s'agit d'enquête de justice. Personne ne lui a encore demandé s'il ignorait vraiment jusqu'au nom de Bygmalion avant l'élection présidentielle de 2012. Rappelons que l'homme s'est fait retoqué ses comptes de campagne pour dépassement du plafond légal - que de généreux militants subventionnés à 60% par une déduction fiscale légale et bienvenue, sont venus compenser (le fameux Sarkothon). Et que l'affaire Bygmalion a permis de comprendre qu'il avait encore dépassé de 18 millions d'euros le même plafond légal.
La Justice s'étonne des conditions d'organisation du Sarkothon, que Sarkozy aurait du régler en partie... Qui a signé le chèque sur les comptes de l'UMP, pourtant fortement endetté ? Eric Cesari, un proche de Sarkozy, et directeur général du parti, actuellement mis en examen.