Minuit passée. Il m’est difficile de trouver le sommeil quand mes pensées vagabondent partout dans la pièce, qu’elles courent le marathon entre les murs de mon petit appartement en prenant bien soin de se butter contre tous les meubles et toutes les encoignures.
Il me faudrait un immense filet pour toutes les attraper et les ranger convenablement dans chacun des petits classeurs de mon cerveau attribué à chaque bribe d’idée égarée. Il faut piler et trier. Que tout soit net-clair-précis-limpide-transparent-sans-ombre. Alors peut-être le sommeil daignera venir à moi, sur ce joli terrain vague qu’est mon esprit. Une plaine assainie, purifiée, prête à accueillir les rêves cotonneux, comme autant de moutons bêlant de manière entêtée. Des moutons qui paîtront à même la pelouse verte de mes idées. Des moutons qui se nourriront de mes réflexions classées, de mes petites annonces mentales pour me donner une laine abondante, un tissage d’inconscient bien chaud, bien douillet dans lequel je dormirai profondément, et ce, des heures durant. Le vrai bonheur est dans le calme de l’esprit et du cœur.
Enroulée sous ma couette, caressée par les lueurs de la lune, flattée par le vent doux de ce soir presque hivernal, je suis comme dans un cocon et mes rêveries s’étalent sous mes paupières rougies. Sans s’y fixer, elles ne font que passer, légères, pastels, furtives. Des pensées à l’image des jours passés et de ceux à venir. Perdu dans l’océan de ma plénitude, je me surprends a rêvasser dans une insolente sérénité. La Terre nous a légué, grâce aux 4 saisons, le plus beau des patrimoines : le reflet de la vie elle-même. Un flocon, une goutte d’eau, un grain de sable, une feuille morte pour recommencer…
L‘été, les fleurs prennent des couleurs, les artistes s’éveillent, les bords de mer se remplissent et le sable chaud est l’objet de toutes les convoitises. L’on apprécie le soleil étincelant, le ciel rempli de bleu et les nuages quasi inexistants. L’on adore les croisières en bateau avec à perte de vue que l’océan.
L’automne, les feuilles ternissent et tombent, la pluie vient arroser les routes goudronnées noirâtre. Les parapluies sont déployés, le bleu ciel laisse place au gris, un gris qui se reflète dans les âmes des passants.
L’hiver, le froid règne en maître, la gelée habite les jardins et les cheminées réchauffent les foyers. Les coutumes de nos aïeux ressortent, le chocolat sert à certains de baume au cœur, pour ma part, je n’aime pas le chocolat. La neige tombe de manière féerique sous le regard pétillant des enfants, la chaleur intérieure et le contact humain défient le froid glacial de l’extérieur.
Le printemps. Maman, n’est-ce pas ta saison préférée ? Tu aimes l’odeur des fleurs qui se dévoilent, tu aimes l’éveil des forêts et le chant des oiseaux. C’est le nouveau qui fait place au renouveau.
Je me construis un radeau avec mon lit, à l’abri des marées. Personne ne pourra m’atteindre à moins de vraiment vouloir nager, ramer. Je suis en sécurité. Tout va pour le mieux maintenant. Enfin.. il était temps. Les jours s’allongent et s’étirent, et je m’y prélasse tel un félin repu qui ne cherche plus à prouver qu’il est aussi censé chasser.