On ne compte plus les biopics dont la qualité varie en fonction des réalisateurs, ils peuvent être décomplexés et hors de toute temporalité à la manière du Loup de Wall Street, ou légèrement plus posée avec J. Edgar. Pourtant, c’est un mix entre le posé et le déjanté qui vous attends dans Get on Up. Une consécration réussite pour le parrain de la soul ? Pas totalement, mais on est loin d’un biopic médiocre.
Synopsis : « Vous le connaissez sous de nombreux noms, de Mister Dynamite à Parrain de la soul, préparez vous à découvrir l’homme sous la légende. Né dans une grande pauvreté au beau milieu de la Caroline du Sud, en 1933, James Brown survit à une jeunesse désastreuse, entre abandons, abus sexuel, école ou encore la prison ; personne ne lui a appris les règles du jeu. Il était destiné à les briser. De son expérience de boxeur amateur ou de chanteur de rue, il s’est vite imposé comme un interprète dominant dans le funk ou la soul. »
On vous voit déjà dire « ENCORE un biopic ! On en a eu suffisamment ces dernières années ! », vous n’avez pas totalement tort, mais on compte très peu les bons films qui traitent de leur sujet sans s’éparpiller, surtout dans le genre qu’est le biopic. Dans le cas de Get On Up, on a la surprise de découvrir un scénario dirigé de manière différente aux autres films. À titre d’exemple, on se rapproche souvent d’une comparaison avec Le Loup de Wall Street durant certaines scènes du film, même si la construction narrative du récit est au strict opposé. De l’apogée de James Brown à son déclin, tout ou presque est résumé en 2h00. Est-ce trop long pour autant ? Non ! On est agréablement surpris par le long métrage. Le spectateur est envoûté par le travail des scénaristes qui est peu conventionnel pour le film. Entre événement passé, présent et futur, on se balade dans une sorte de chronologie déconstruite afin de comprendre la création du mythe de James Brown. C’est sans compter les multiples mises en abîmes proposées par le scénario sur la vie de l’artiste, qui donnent une importance supplémentaire au personnage principal du film. Par ailleurs, la progression psychologique de ce dernier passe par plusieurs phases différentes sur ce qu’est James Brown, ce qui permet en tant que spectateur, de comprendre les moments qui l’ont affecté et d’être plus « proche » de lui ; surtout venant de ce personnage extravagant, narcissique et comique. En somme, le scénario nous fait passer un bon moment, puisqu’il s’avère écrit de manière correcte afin de mieux cerner James Brown en backstage. On passe des rires au mal-être par quelques séquences dramatiques durant la vie du chanteur. À noter que plusieurs thèmes sérieux sont évoqués, notamment la place des noirs au sein de la culture populaire ou encore la misère durant la Grande Dépression.
Si la base scénaristique est plutôt classique, il n’y a pas ou très peu de surprise au cours du film, le montage est loin de suivre une certaine linéarité. À contrario du travail de Scorcese (restons dans l’exemple récent) où celui-ci faisait progresser son personnage d’une manière linéaire, sans forcément user du flash-back, Tate Taylor (à qui l’on doit La Couleur des Sentiments) préfère construire son film à coup de flash-back et de flashforward. Là ou c’est gênant, c’est que l’on met du temps à s’habituer à ce type de réalisation très saccadé, qui soutient un rythme presque musical pour le film. Un petit point négatif qui laisse entrevoir de bonnes idées, comme le choix d’avoir découpé le film en chapitre qui suit la bande-son du chanteur ou encore de donner lieu à des très beaux plans sur une Caroline du Sud au cours de la Grande Dépression durant certains fragments dans la vie du chanteur. La réalisation est plutôt moderne, celle-ci trouve son inspiration dans plusieurs films comme Le Loup de Wall Street, pour ses faces caméras (ou Jersey Boy ça diffère en fonction des personnes), mais aussi le fait même d’intégrer des images d’archives qui permettent de montrer James Brown à un instant précis, particulièrement durant les concerts du chanteur. Vous l’aurez compris de très bonnes idées surgissent du film, qui soit dit en passant se laisse regarder et pour cause, on ne s’ennuie jamais pendant le long métrage et mieux encore on reste scotché sur les événements qui interfèrent dans la vie de James Brown.
Le point d’orgue du film se trouve être au cœur de la bande-son et du jeu d’acteur. Il faut l’avouer l’acteur qui incarne James Brown, Chadwick Boseman, est crédible. Il donne vie au personnage d’une manière déconcertante et surprend par ses prestations de chants. Puisqu’un biopic sur la musique permet aussi de comprendre ou de (re)découvrir les musiques du chanteur, on a l’envie de chanter, on se laisse entraîner et surtout on passe un très bon moment à écouter « Mister Dynamite », « It’s a Man’s Man’s Man’s World » ou encore « Get Up ». Des titres devenus cultes qui se modernisent avec la réalisation du film. Outre l’acteur principal, les personnages secondaires de l’intrigue sont convaincants et on arrive facilement à se projeter au cours des années 60 dans l’apogée de la star jusqu’à sa disparition.
Get On Up est un biopic qui modernise quelques codes cinématographiques sans pour autant échapper à la comparaison avec Le Loup de Wall Street sur certains plans, toutefois il en résulte un très bon film qui nous fait passer un bon moment. Il prêche malheureusement dans un montage trop cut, difficile à appréhender dans le premier quart du film, mais on se laisse vite emporter par la soundtrack, les prestations des acteurs ou encore les quelques situations comiques durant le long métrage. Faire renaître James Brown était un défi de taille, mais le tout est réussi et donne un film qui file la pêche pour la journée.
Get on up. De Tate Taylor. Avec Chadwick Boseman, Nelsan Ellis, Viola Davis, Dan Aykroyd, Lennie James, Octavia Spencer, Fred Melamed, Craig Robinson, …
Sortie le 24 septembre 2014.