Red Band Society est une nouvelle série de 13 épisodes diffusés depuis la mi-septembre sur les ondes de FOX aux États-Unis. L’action se déroule dans l’unité pédiatrique d’un hôpital alors que plusieurs jeunes s’y trouvent en raison de problèmes de santé assez graves. Il y a Charlie (Griffin Gluck) qui est dans le coma depuis plusieurs mois, Leo (Charlie Rowe), atteint d’un cancer et qui a du se faire amputer une jambe, Jordi (Nolan Sotillo) aussi atteint d’un cancer et qui doit subir la même opération, Dash (Astro), qui souffre de fibrose kystique, Emma (Ciara Bravo) qui est anorexique et la dernière arrivée, Kara (Zoe Levin), qui est en attente d’une greffe du cœur. Tous doivent combattre leurs maladies respectives, mais voudraient en même temps mener l’existence d’adolescents normaux. Adaptation de la fiction catalane Polseres vermelles, Red Band society est une série pour adolescents touchante oscillant entre le drame, la comédie et le genre médical qui évite la majorité du temps de tomber dans la caricature. Si la fiction nous donne plusieurs émotions, le public n’est pas au rendez-vous et les critiques, qu’elles soient étrangères ou américaines sont partagées. Échec scénaristique ou sujet trop tabou?
Comme Glee, mais plus amochés
Le moins que l’on puisse dire, est qu’avec Red Band Society, on tombe rapidement dans le feu de l’action, puisqu’on nous présente dans les premières minutes tous les protagonistes et la raison de leur long séjour à l’hôpital. Originalité ici, c’est Charlie qui assure la narration. Ce n’est pas parce qu’il est dans le coma qu’il est inconscient, bien au contraire. Il écoute tout, parvient à cerner les gens et dénote ainsi que tous ne réagissent pas de la même façon face à l’adversité. Leo fait tout ce qu’il peut pour conforter Jordi à la veille de son opération. Eux qui partagent la même chambre se transmettent de l’énergie positive et leur détermination à vaincre la maladie est inspirante. À l’opposé, on a Kara et Emma qui sont en plein déni de la réalité, mais ne l’expriment pas de la même façon. Kara se contrefiche de son état de santé, fume dans sa chambre d’hôpital et parvient même à dénicher un vendeur de marijuana. De plus, elle n’en manque pas une pour diminuer ses acolytes. À l’opposé, Emma fait preuve d’une compassion réelle envers tous, sauf elle-même. Elle refuse obstinément de manger et utilise le bon vieux truc de boire des litres d’eau avant sa pesée hebdomadaire. Reste Dash… qui après trois épisodes n’a jamais manifesté la moindre douleur et à ce sujet, les scénaristes devraient s’activer.
La production n’a pas hésité à recourir aux services de deux acteurs particulièrement aimés du public : Octavia Spencer (oscarisée dans The help) dans le rôle de l’infirmière en chef et Dave Annable (Brothers & Sisters) qui personnifie le Dr Jack McAndrew. S’ajoutent aussi les infirmiers recrues Dobler (Rebecca Rittenhouse) et Kenji (Wilson Cruz) qui servent de « courroies de transmission » entre les patients et les médecins.
Red Band Society ressemble en plusieurs points à Glee (du moins, dans ses bonnes années) dans son traitement, ayant le don de toucher notre corde sensible, mais sans aller trop loin dans le mélodrame. Par contre, mentionnons d’entrée de jeu que le scénario n’est pas exempt d’incongruités : Dash qui a des problèmes respiratoires fume des joints alors que dans le premier épisode, Jordi semble trop prendre à la légère le fait qu’il se fera amputer. Fait encore plus inusité, les parents sont quasiment absents alors que leurs jeunes pourraient ne pas s’en sortir. Enfin, on peine à comprendre qu’une seule aile d’un hôpital réunisse autant de patients aux maladies aussi diverses. On peut se plaindre que le ton soit parfois trop léger, mais comme l’écrit Pierre Sérisier dans son blogue : « au moins on évite le misérabilisme qui accompagne parfois ce genre d’histoire.»
Certes, on aurait pu y aller d’un mélodrame à nous tirer des larmes étant donné le sujet, mais Red Band Society nous dépeint un groupe solidaire dans l’adversité, ayant chacun leurs travers et faisant preuve à quelques reprises de mauvaise foi. Outre le personnage de Kara, caricaturé à l’extrême et dénué de toute crédibilité, ils ont tous une histoire avec un passé, un présent douloureux et un avenir que l’on espère plus rose, comme en fait foi leur optimisme. On a droit à une scène très touchante alors que Jordi est à deux doigts de se faire amputer. Juste avant, il décide de courir jusqu’à s’essouffler; sentiment qu’il ne vivra peut-être plus, du moins, dans cette condition physique. La veille, le groupe se réunit et Leo donne à chacun d’eux un de ses bracelets rouges qu’il a accumulé vu le nombre d’opérations auxquelles il a dû faire face, question de leur donner à tout un chacun de l’espoir. La série nous donne donc quelques beaux moments de télé et on espère qu’il y en aura d’autres au cours des prochains épisodes… en espérant justement qu’il y en ait d’autres.
Anatomie d’un échec (populaire)
4,10 millions de téléspectateurs pour le premier épisode, 3,43 pour le second et 3.33 pour le troisième : bien que les chiffres se stabilisent, on peut affirmer que la série est un échec populaire. Il est fréquent qu’en début de saison, les grandes chaînes américaines démarrent une nouvelle série en la plaçant à la suite d’un programme qui rassemble, comme le football ou un concours de chant. Ici, Red Band Society était placé après Hell’s Kitchen… piètre compatibilité. On peut tout de même penser que Fox croyait en la série; celle-ci ayant eu tellement de succès en Espagne et même l’Italie en fera sa propre adaptation. On ne peut pas non plus évoquer les différences culturelles entre l’Europe et les États-Unis, le sujet étant universel.
Mais justement, on constate une véritable disparité entre les critiques américaines et françaises quant à Red Band Society. Dans le premier cas, seule celle de People y voit du positif, celle du New York Daily News étant plus timorée, alors que The A.V. Club, Variety et The Hollywood Reporter sont carrément vindicatives, accusant même la production de manipuler l’audience en dédramatisant trop le contenu, tout en cherchant à nous faire pleurer. À l’opposé en France, Sens Critique et Le Monde, sans pour autant encenser la fiction, lui trouve un certain potentiel et quant à la dédramatisation un peu trop forcée, Pierre Langlais du Télérama y va de cette explication :« Une sur-écriture qui se justifie ici, en un sens : les enfants qui doivent lutter contre la maladie font parfois preuve d’une grande maturité, et d’une capacité à philosopher. »
On a beau spéculer, reste qu’elle a pour thème central la maladie, qui touche les jeunes de surcroit. Qu’on joue à fond la carte de l’émotion ou qu’on y aille de l’humour pour dédramatiser, le résultat est soit qu’on pleure, soit qu’on se sente coupable d’en rire. Les Américains sont bien plus friands de séries policières ultraformatées, comme en témoigne le récent succès NCIS : New Orleans, qui n’apporte absolument rien au genre. Quoi qu’il en soit, on doute que la nouveauté de Fox se rende à terme .C’est tout de même dommage parce que la rentrée américaine nous offre bien pire, ce qui fera l’objet d’autres critiques…