Le sacrifice d’Abraham est incontestablement l’exemple le plus parlant de la Foi de celui qui croit dans la parole de Dieu.
Tout le monde ou presque reconnaît ou a reconnu son calvaire.
Ma nourrice m’a toujours raconté cette histoire pour peupler mes songes :
Elle commençait par la version juive, la plus ancienne :
Dieu demande à Abraham de sacrifier son fils Isaac.
Que peut-il y avoir de plus douloureux que de perdre son enfant ?
Et que peut-il y avoir de plus monstrueux que d’être soi-même la main qui lui donne la mort ?
Et que peut-il y avoir de plus scandaleux que de recevoir un tel ordre de Dieu ?
Qu’est-ce que c’est que cette Foi sans Loi, qui exige de la créature de commettre l’acte le plus fanatique ?
Mais Abraham a la Foi comme personne ne l’a. Il accepte de sceller le sort de son enfant, en lui donnant la mort.
Et c’est là que Dieu intervient et retient sa main et lui offre un agneau pour qu’il puisse accomplir son sacrifice.
La version musulmane est autrement plus Racinienne. Disons plus enracinée dans la condition humaine.
Ibrahim avant d’avoir Isaac avec Sarah qui était stérile, a conçu un enfant avec sa servante, un garçon nommé Ismaël, pour assurer sa postérité. Mais Sarah finit par tomber enceinte et par donner naissance à Isaac. Lorsque Ibrahim reçoit l’ordre de sacrifier son fils et honorer son Dieu, ce n’est pas à Isaac le fils de Sarah, mais à Ismaël le fils de sa servante qu’il va songer pour le sacrifier sur l’autel de l’absurde. Et Dieu met tout le monde d’accord en préservant l’enfant… et en le remplaçant par un agneau qui va devenir l’objet d’une fête, celle du sacrifice, celle de l’Aïd.
Pour les juifs, c’est Isaac, pour les musulmans c’est Ismaël… et pour moi c’est toute la vanité de la condition humaine : parce que je vois bien Ibrahim craignant Sarah plus que la mort, se tourner vers l’enfant de la servante pour attester sa soumission. Soumission limitée, peut-être parce que sa Foi n’était pas si illimitée. Dieu seul le sait…