L’hypocrite, du grec ὑποκριτής, c’est l’acteur, jouant un rôle, portant un masque personnifiant ce rôle. C’est parée de cette pièce maîtresse de sa panoplie que Mehrzeya Laâbidi nous a livré, une nouvelle fois, une admirable mascarade, et ce soir, c’est déguisement féministe.
Lors de sa tirade d’indignée, Mehrzeya a joué la tristesse et l’étonnement. Tristesse, parce qu’elle s’est dite peinée pour ce vieillard sénile qui s’est oublié à la traiter de femme, se démasquant par cela même en dévoilant sa misogynie. Etonnement, parce que c’est ce même vieillard d’un autre âge qui se pose en rempart moderniste contre les dangers de la dynamique rétrograde enclenchée par Ennahdha. Car, oui, comment se peut-il que la bête noire des islamistes, dont le discours se doit donc d’être aux antipodes de leurs incessantes offensives anti-femme – lire entre les lignes l’aveu d’un idéal phallocratique qui ne se cache plus – se révèle être celui par qui le machisme arrive ? Et nous voilà spectateurs d’une sombre ironie où les partisans de la Complémentaire d’hier donnent aujourd’hui des leçons de féminisme.
Pourtant, Mehrzeya n’est qu’une femme. Les Tunisiennes ne sont que des femmes. Béji Caïd Essebsi ne nous apprend là rien de nouveau ; il n’invente rien. Ce qu’il décrète n’est que le constat d’un fait consacré par la société, entériné par les islamistes et vécu au quotidien par chacune. Que ne n’a-t-elle réagit quand ses condisciples auprès du Gourou papa poule des salafistes faisaient la promotion de la polygamie et de l’excision. Où était enfoui son militantisme féministe lorsque Souad Abderrahim vomissait sa haine à l’encontre des mères célibataires allant jusqu’à dénier à ces créatures infâmes le droit d’exister ? Lorsque le parti dont elle porte la couleur jusqu’à l’ONU essayait sournoisement de réduire la femme à un rôle de simple complémentarité au sein de la famille ? Lorsque le mariage est incessamment présenté comme l’unique voie de salut pour résoudre les problèmes de la société y compris le chômage en renvoyant la femme, mise sous tutelle, à sa place originelle de domestique et à sa condition de vagin-utérus sur pattes ?
Mehrzeya n’est qu’une femme, les Tunisiennes ne sont que des femmes. C’est la réalité de la vie dans une société patriarcale. Réalité que Mehrzeya contribue à ancrer à travers la propagande que sert ce type d’indignations sélectives et occasionnelles. Mehrzeya est fière d’être une femme tunisienne. Mais de quoi est-elle fière au juste ?تحب تورث قد خوك؟ لا! ماك إلا مرا!قريت و تحب تلقى خدمة في عوض ما تشد الدار و تبونش؟ لا! ماك إلا مرا!تخدم و تحب تخلص قد زميلك؟ لا ماك إلا مرا!مازلت ما عرستش وتحب تخرج تسهر الليلة؟ لا! ماك إلا مرا!تحب تعرس و راجلك هو إلي يبدل اسمو كيفك؟ لا ماك إلا مرا!تفتقت من بعضك بش جبت صغار وتحب تقيدهم بإسمك؟ لا ماك إلا مرا!تحب تسول وتجول بصغاريك من غير ما تشاور سيدك بوهم؟ لا! ماك إلا مرا!تحب تعيش في مجتمع يحترمك كإنسان من غير ما يفركس عليك شكون مسؤول على جعبك؟ تحب يولي عندك قدر و همة و كيف تمشي وحدك في الشارع حد ما يسمعك وسخ وذنيك؟ تحب تعبر على أفكارك و آرائك و يسمعوك؟ سكت نيك و بر امشي شد كوجينتك ماك إلا مرا.
Au vu de l’état actuel de la situation des femmes en Tunisie, la fierté ne peut être que malveillante.