Chevrotine, Éric Fottorino

Par Mango

Rapidement résumé, ce livre raconte le naufrage d’un couple  et d’une famille recomposée.   La faute à la femme si tout va mal car  si elle se montre enjôleuse et charmante  en public, dans le privé elle s’avère une très efficace manipulatrice n’ayant  de cesse d’avilir son mari et d’éloigner les enfants de celui-ci. Ça se termine très mal puisque l’homme finit par tuer cette femme, aussi odieuse que séduisante.

On le sait dès le début qu’il y aura crime, ne serait-ce que par le titre.

«Chevrotine», c’est du gros plomb de chasse et il  suffira d’un seul coup de  fusil pour  que Alcide Chapireau,  se débarrasse  finalement de Laura, sa seconde femme qui faisait le vide autour de lui et qui venait de jeter les dernières affaires de ses enfants nés d’un premier mariage très heureux avec une jeune modiste,  aussi simple que lui, mareyeur à La Rochelle. Ses deux fils, écœurés par  la méchanceté de leur belle-mère, ne venaient plus le voir depuis longtemps. Il lui restait Automne, la  fille de son mariage avec  Laura.

C’est à elle qu’il tente d’écrire, vingt ans après les faits, alors que le corps de sa femme n’a jamais été retrouvé et que personne ne l’a soupçonné, lui, mais il est à la veille d’une opération  du cœur et il désire tout lui révéler sans savoir  par où commencer.

Il suffit d’une seule phrase finalement pour tenter une explication :

 Toutes les femmes attendent le grand amour. Ta mère cherchait son assassin. 

et quoi de mieux encore qu’une phrase  tirée du Horla de Maupassant pour exprimer ce qu’il ressentait avec cette femme  aussi séduisante que maléfique?

 Cette nuit, j’ai senti quelqu’un accroupi sur moi et qui, sa bouche sur la mienne, buvait ma vie entre mes lèvres. 

C’est avec  plaisir et rejet à la fois que j’ai lu ce roman. Le style en est sobre, efficace et agréable. Ce sont les personnages qui m’ont rebutée. Le père pour sa faiblesse, la femme pour sa perversité. Les deux m’ont agacée. Je me sentais trop proches des enfants, de leur révolte et de leur sentiment d’injustice et d’abandon pour excuser ces adultes  incontrôlables, entraînés par leur passion destructrice.

Il faut que je lise un autre livre de cet auteur, sans doute  L’homme qui m’aimait tout bas.

C’était la technique de Laura: insinuer. Elle n’en démordait pas et Chapireau la laissait s’énerver toute seule. 

 Avec Laura, les sorties de crise étaient toujours la crise. Elle avait ses moments oui et ses moments non. Ils étaient encore dans les moments non. Non aux caresses, aux baisers, à l’amour. Oui aux regards fugaces où filtrait chez elle, à travers la forêt de ses longs cils, un éclair insoupçonné de tendresse. Oui aux gestes s’ils se limitaient à une pression de sa main qui broyaient les doigts de Chapireau. Leur lit ressemblait toujours à l’hiver

Chevrotine, Éric Fottorino

(Gallimard, mai 2014, 180 pages)