Alors bien sur, nous sommes dans les années 90. Chuck Dixon ne perd guère de temps à plonger ses personnages dans une introspection poussée et crédible. Le Punisher est ici motivé par une mission aveugle, qu'il poursuit dans la plus grande tradition des redresseurs de torts monomaniaques et caricaturaux. Il est prêt à se sacrifier, et ne s'en sort que par un concours de circonstances heureuses. Castle n'est pas seul. A l'époque, d'autres épigones fréquentaient les pages des trois séries mensuelles. Notamment (pour ne citer que les plus notables) Lynn Michaels, ex policière passé elle aussi dans les rangs des vigilante, Outlaw (la version fan-boy britannique, souvent raillé pour son accent), ou bien Hitman, l'avatar au service... de la mafia! Une mise en scène qui n'a rien d'originale, et qui trouve probablement ses racines dans l'événement Death of Superman/Reign of the Supermen : lorsque le héros phare semble hors service, la course à la succession démultiplie les vocations! Aux dessins, nous avons du John Buscema, tout de même, mais parfois (vers la fin) l'encrage est un peu sommaire, et son style déjà épuré en devient un tantinet brouillon. Ou encore Hugh Haynes, un des piliers de la série dans les années 90, au trait plus cartoony et naïf. Il s'agit là du point d'orgue de presque une décennie d'aventures. Les responsables de Marvel voulaient alors rendre aux ventes le lustre qui commençait à s'effriter, en orchestrant la fin présumée du Punisher, tout en injectant sur ces pages une longue liste de prétendants wannabe, ou de copies distordues, pour étoffer un univers narratif très refermé sur lui même : Suicide Run fonctionne en autonomie parfaite et ne fait pas intervenir d'autres justiciers en collants. Le problème, c'est que vous ne trouverez pas de traces de l'ironie mordante de Garth Ennis, ou la violence adulte et esthétisante de la récente collection Max. Par contre, les amateurs de gros flingues et de comics à la Charles Bronson font se régaler. Une publication Vf semble à ce jour bien peu probable, à moins que Castle revive un jour prochain au cinéma, avec succès, ou revienne en force chez Netflix, par exemple. Une petite série? Oh oui que j'aimerais!