Maus est une bande dessinée est originale à plus d’un titre.
Les dessins sont en noir et blanc. Sans être particulièrement beau, le trait a toutefois le mérite de nous plonger dans le quotidien des camps de concentration nazis en nous faisant vivre l’expérience de l’intérieur.
L’aspect autobiographique permet au lecteur de s’identifier aux personnages principaux, une famille ordinaire dont l’existence va basculer en très peu de temps. Art Spiegelman se met lui-même en scène dans ses discussions avec son père, l’interrogeant sur la vie dans les ghettos polonais et expliquant le processus de création artistique.
Oscillant en permanence entre passé et présent, entre espoir et découragement, le lecteur assiste aux déportations successives et aux persécutions des juifs. Il partage le quotidien des protagonistes, la hantise de se faire prendre, le manque de nourriture et d’hygiène, le froid, les kapos qu’il faut payer pour obtenir une protection…
Une des particularités de cette bande dessinée réside dans le fait que tous les personnages humains sont représentés par des animaux. Ainsi, les juifs sont figurés par des souris (maus en allemand), tandis que les allemands sont symbolisés par des chats (qui chassent les souris). Le choix des animaux est loin d’être anodin et fait référence aux stéréotypes circulant sur les différentes nationalités (« les français sont des mangeurs de grenouilles ») ou le comportement d’un peuple donné vis-à-vis des juifs (les polonais sont dessinés en cochons). Si les livres illustrés pour enfants attribuent fréquemment des caractéristiques animales aux objets, c’est la première fois que je lis une bande dessinée pour adultes qui se base sur le zoomorphisme. Et si cela peut étonner le lecteur, ce type de dessins n’entrave en rien la compréhension de l’histoire et l’empathie que l’on ressent vis-à-vis des protagonistes.
Une bande dessinée culte, étonnante et interpellante. A lire.
Maus-L’intégrale – Art Spiegelman – Editions Flammarion – 1992