C’était un de ces moments anodins de l’Histoire du football. À la 87è minute de cette finale de la ligue des Champions opposant Man U à Chelsea (victoire de Utd 1-1 ; 6-5 aux t.a.b), Ryan Giggs est entré sur la pelouse du stade Lujniki en remplacement de Paul Scholes, autre monument de l’équipe de Sir Alex Ferguson. Avec 759 apparitions sous le maillot mancunien, il a dépassé l’illustre Bobby Charlton. L’Anglais avait fixé le précédent record (758) en avril 1973. Le Gallois lui, était à cette époque en pleine gestation dans le ventre de sa maman et ne naquit que le 29 novembre de cette même année.
Ryan Giggs est un de ces joueurs de plus en plus rares et appelé à disparaître, inéluctablement. Formé au club, le Gallois n’a connu aucun autre amour que United. Natif de Cardiff, sa jeunesse se passe à Manchester. Déjà là, Sir Alex Ferguson le remarque et le milieu gaucher, un peu frêle devient professionnel à 17 ans et dispute son premier match le 2 mars 1991 lorsqu’il remplace Denis Erwin à Old Trafford contre Everton : « Je me souviens de la première fois que je l'ai vu. Il avait 13 ans et flottait à travers le terrain comme un cocker espagnol courant après un morceau de papier d'étain dans le vent ». Quel poète ce Sir Alex !
À 18 ans, il s’inscrit déjà dans le cœur des supporters inscrivant le but victorieux lors du derby contre City.
La blessure de Lee Sharpe permet au Gallois de s’établir durablement dans le 11 de départ mancunien au début de la saison 1991-1992. Une saison qui sera couronnée par le premier des 25 trophées glanés avec son club de toujours : La Coupe de la Ligue 1992, remportée contre Nottingham Forrest. Il y prend goût aux trophées et la saison suivante c’est le championnat qui tombe dans sons escarcelle. Dès lors il est de toutes les épopées. Malgré un gabarit qui ferait marrer un Sol Campbell (1m80 et 68 kg), le gaucher varie son jeu, centre à merveille part dans des duels impossibles, cherche à faire la différence pour mieux faire profiter les autres de ses décalages. Un joueur qui se tient droit balle au pied, bouffant sa ligne de touche repoussant jusqu’au denrier moment le centre décisif. Pas maladroit sur coup de pieds arrêtés, les Lillois se souviendront longtemps encore de ce coup de patte de fourbe au stade Bollaert où il profita de l’autorisation par l’arbitre de jouer vite pour placer le ballon dans le but de Sylva qui plaçait encore son but. C’était en huitième de finale de la ligue des Champions 2006-2007.
Pour le palmarès complet : Coupe Intercontinentale (1999), Ligue des Champions (1999, 2008), Championnat (1993, 94, 96, 97, 99, 2000, 2001, 2003, 2007, 2008), Cup (1994, 96, 99, 2004), Coupe de la ligue (1992, 2006). On ajoute 6 Community Shield.
Entre le début des années 1990 est aujourd’hui, Ryan Giggs est un lien temporel avec une époque où les stars d’antan ont aujourd’hui pris du bide (Roy Keane, Éric Cantona, Dwight Yorke, Andy Cole, Teddy Sheringham) mais qui sonnent comme autant de gloire du football d’Angleterre. Cette génération dorée (on enlève Cantona, on ajoute Beckham) qui remporta la ligue des Champions 1999 au Nou Camp contre le Bayern Munich au cours d’un immortel retournement de situation. Les Allemands menaient au score depuis la 6è minute par un coup franc de Mario Basler. À la 91è Sheringham égalisait (en reprenant une frappe un peu molle de Giggs) et à la 93è « Supersub », Ole Gunnar Solskjaer donnait la victoire aux siens. À l’occasion, Manchester United réalisait en cette année 1999 un triplé historique avec le championnat, la Cup et donc la C1.
C’est certainement le problème majeur de la carrière de ce joueur. Sa régularité (une dizaine de buts par saison en championnat + coupe d’Europe) en aurait fait un candidat pour un possible Ballon d’Or lors des années impaires (absence de championnat international). Le Gallois n’aura jamais eu l’occasion de représenter son pays plus loin que les phases qualificatives pour l’Euro et la Coupe du Monde. La faiblesse du vivier gallois n’est pas à prouver. La seule et unique participation des rouges et blancs à une coupe du monde date de 1958. 1976 pour un Championnat d’Europe des Nations. Plus international de l’Histoire dans son pays à l’âge de 17 ans et 321 jours (contre l’Allemagne). Dans cette sélection, seul Craig Bellamy est à peu près connu (passé par Newcastle et Liverpool, aujourd’hui à West Ham). On oublie aussi Rhys Griffiths qui avec 46 buts en 40 matches toutes compétitions confondues est le meilleur buteur du continent cette saison. Et c’est tout !
Néanmoins, les Gallois sont allé jusqu’aux barrages pour tenter de se qualifier pour l’Euro 2004, se faisant sortir par la Russie à minima (0-0 à Moscou, 0-1 à Cardiff). Les instances de l’UEFA ne trouvèrent pas suffisant le dopage avéré d’Igor Titov pour permettre à Giggs de s’exprimer lors de la meilleure compétition de football. Pour l’Euro 2008, le Pays de Galles a fini piteusement à la 5è position de son groupe D, devancé, certes, par la République Tchèque, l’Allemagne, l’Eire et la Slovaquie. Chypre et Saint-Marin fermant la marche. Un joyau qui mérite à être connu, Zidane (lui-même !) dira un jour cette phrase : « S’il était français, Pires ou moi serions sur le banc. Un homme avec le plus de trophées en Europe aurait été lui... »
Les hommages sont ce qu’ils sont, surtout quand on entend Zizou clamer que Vincent Guérin est un de ses trois joueurs référence ! N’empêche que Zinédine est assez peu avare de ce genre de sortie pour signifier toute l’importance qu’elle prend. À 34 ans, Giggs est sur la fin, c’est évidemment un joueur significatif qui aura marqué l’Histoire du football Anglais et tout particulièrement de Man U. Le seul regret sera donc ne pas l’avoir vu volé sur le monde tel un David Backham.
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