Pour des raisons qui m’échappent encore mais sous lesquelles je sens bien poindre une jalousie compulsive mal contenue par un sourire Ultra Brite à toute épreuve, je n’étais pas invité le week-end dernier au mariage de George Clooney. Et alors que je détartrais ma machine Nespresso, j’imaginais Venise, ce marais médiéval où les pigeons s’agglutinent aux balcons pour se lécher la bouche en parlant d’avenir, puis s’en vont gondolant roucouler dans la lagune en écoutant Verdi. Et dans ce grand carnaval, le gratin de la culture populaire allait s’esbaudir et faire honneur aux 11 millions dépensés ce jour-là par une star qui, si elle a le mauvais goût d’inviter Bono, a au moins la décence de donner ses cachets publicitaires au Darfour sans le crier sur tous les iTunes du monde.
Mais peu me chaut ! J’avais à faire chez Jardiland, en ce dimanche mordoré où je commandais mes plus beaux chrysanthèmes en attendant la Toussaint et le résultat des inondations à Montpellier, où j’ai quelques connaissances. Mais je ne suis pas dans l’Hérault, faut pas croire ce que disent les journaux, et je ne pus que constater les dégâts aux JT en boucle où Michel Chevalet tentait de nous expliquer avec cette même ferveur qu’à l’époque où il parlait des fusées qui explosent, des trains qui déraillent ou des premiers vibromasseurs à vapeur, que le taureau camarguais est curieusement moins étanche que le flamand rose. Et pendant que Paris profitait pour une fois tranquillement de son été indien, nous revenait en pleine face cette indécence qu’on les gens du sud, qui vivent toute l’année en narguant le reste du monde parce qu’ils ont du soleil et des cigales à longueur de siestes languedociennes, cette indécence disais-je à se plaindre à la première averse parce qu’ils ont 10 cm dans le sous-sol alors que ma voisine Paola, qui est plutôt sèche et carrément portugaise a l’air très heureuse avec 25 cm dans le fondement. Et, au risque de m’avancer et de froisser quelques esprits frileux et réactionnaires, je n’ai pas peur de penser qu’il n’y a plus de saisons ! On ne sait plus comment s’habiller, on s’enrhume pour un oui pour un non, de là à ce que les pharmaciens nous pètent à la gueule comme le premier pilote d’Air France venu et on se soigne comment , hein ? Chez Leclerc ? Non ! Ils n’ont que les cercueils, mais pas les médicaments qui pourraient retarder l’achat conséquent de ce bel objet d’acajou qui s’accommode si bien avec ces chrysanthèmes que je vais devoir jeter du coup…
Ah la France, pays où parler de réforme avec un salarié donne à peu près les mêmes résultats qu’une discussion philosophique entre un fan de l’OM et un du PSG, où qu’une rencontre aux chandelles entre un djihadiste haineux et un stripteaseur gay catholique (même si ce dernier aime l’haineux). Comme le Sénat, ça irait dans le mur (cette blague, pourtant très percutante et assez fine, ne fit pas rire en son temps et on m’immola pour ça. Mais à l’instar de Nikki Lauda, et à grand renfort de Biafine, je pète le feu aujourd’hui. ). La France est une jeune vierge effarouchée qui refuse d’écarter les cuisses le premier soir, comme le dixième, comme le centième, et voit, dès les premières caresses gouvernementales, ses tétons et ses syndicats se durcir, obligeant ses dirigeants à aller se finir dans le lavabo déjà plein de projets avortés d’une démocratie au ralenti où les gens vont à pieds à la pharmacie lorsqu’il n’y a ni métro, ni train, ni avion. Heureusement pour nous tous, la destination qui nous attend à plus ou moins court terme reste bien desservie par les ambulances et par les corbillards.
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