L'histoire: Eric Love, malgré ses dix-neuf ans, est envoyé dans une prison pour adultes. Dans cet univers redoutable, il doit apprendre à faire face aux détenus comme aux gardiens, à contrôler la violence qui l'anime constamment et surtout, il doit se confronter à Neville Love, un père qui a passé la plus grande partie de sa vie derrière les barreaux et qu'il connaît à peine.
Encore un film carcéral, je sais. Mais j'adore ça. Surtout quand ils fonctionnent comme un huis-clos dans lequel les sentiments sont exacerbés, où la tension monte jusqu'à l'explosion finale. Et Les poings contre les murs, sans être follement original, est tout de même une petite claque cinématographique par sa violence filmée froidement et sans complaisance.
Le film tourne autour d'Eric Love, un jeune homme assez peu sympathique au premier abord. Prompt à se servir de ses poings, pensant que son arrogance et sa brutalité lui permettront de s'en sortir dans un monde sans pitié, il n'imagine pas que des forces plus complexes régissent la prison. Bien sûr, le visage impassible et froid qu'il affiche s'est construit autour de failles et menace de se fissurer en présence de son père. Un père longtemps absent qui tente d'effacer les années d'abandon en s'occupant maladroitement de la protection de son fils. Les nombreuses ingérences de Neville sont autant de moments qui font honte à Eric, qui suit malgré tout certains des conseils de son père, notamment participer à un groupe de parole dirigé par Oliver. Au contact de cet homme et en écoutant les autres détenus, il gagne en maturité et s'adoucit. Il cherche même à renouer le dialogue avec son père pour essayer de le comprendre. Parce que si Les Poings contre les murs se déroule uniquement en prison et traite de la survie d'un jeune en milieu carcéral ; c'est aussi, et surtout, une histoire d'amour père/fils. Un amour bizarre, gêné et pudique qu'ils ne se montrent qu'après avoir traversé des situations extrêmes. Cette relation qui se passe de mots est vraiment très belle.
Le spectateur est plongé dans un univers réaliste et sombre dans lequel explosent des passages comiques à base d'humour très noir. Par exemple lorsqu'Eric découvre que son père a des relations homosexuelles avec son co-détenu et ne le supporte pas. S'ensuit une scène de bagarre puis d'insultes surréaliste qui crève un instant la bulle de violence pour faire rire. Puis la brèche se referme. Eric est englué dans un monde plus complexe qu'il ne le pense. Son arrivée mouvementée est vue d'un mauvais oeil par Hayes, l'un des dirigeants de la prison, ainsi que par Spencer, qui contrôle les détenus. Tous deux cherchent la tranquillité et orchestrent son élimination pour retrouver un semblant de paix. Le filet se referme donc autour du jeune homme pour un final à couper le souffle - dans le sens où le spectateur ne respire plus, pris par l'action.
Jack O'Connell crève l'écran. Sans s'entourer de fioritures, il donne vie à un personnage que l'on croit insensible et qui est en réalité désespéré. Il est aussi parfait en petite frappe arrogante et provocatrice, qu'en fils troublé de se trouver face à un père qui ne correspond pas à l'image qu'il s'est construite. Ben Mendelsohn, quant à lui, est touchant de maladresse. Neville veut à tout prix rattraper le temps qu'il a perdu avec Eric et se heurte aux réticences de son fils. Il agit comme s'il maîtrisait la situation alors qu'elle lui échappe complètement. Mendelsohn parvient à faire transpirer les émotions de Neville sans surjouer. Petite mention à Ruper Friend qui incarne un homme dévoré par son travail avec les détenus, seule échappatoire semble-t-il à ses propres problèmes de violence.
En bonus, c'est un film britannique à voir absolument en version originale pour son accent à couper au couteau. Belle réussite pour David Mackenzie!