On le sait, la France est un pays particulièrement difficile à gouverner d’autant que ses dirigeants sont trop souvent pusillanimes et de plus en plus déconnectés de la réalité de terrain. L’actuelle situation économique et politique de la France doit beaucoup à la succession de bras cassés et d’escrocs approximatifs qui ont pris le pouvoir ces dernières décennies. Cependant, même en tenant compte de la brochette de clowns dont nous avons hérités aux commandes, et à la lumière, faible mais persistante, de l’actualité, on ne peut pas écarter le rôle du peuple dans la désignation d’une aussi piètre élite.
Pour rappel rapide, cette loi fut propulsée par une Cécile Duflot aussi dogmatique qu’incompétente sur la route franchement chaotique d’un parcours législatif rigolo et parsemé d’embûches rocambolesques. Elle déclencha (la loi et la Duflot) une telle poussée d’urticaire chez les acteurs du marché immobilier qu’avant même ses décrets d’application, de beaux effets pervers ne tardèrent pas à faire jour, avec un repli maintenant constaté de la construction, de la vente et de la location. Apparemment, les dispositions envisagées (qui comprenaient, notamment, un encadrement des loyers, des prêts à taux zéro alambiqués, des contraintes de constructions cyclopéennes) n’avaient pas l’heur de plaire, ni aux potentiels acheteurs, ni aux vendeurs, ni aux constructeurs, ni aux propriétaires, ni aux locataires. Prestement, la loi fut donc euthanasiée, sans fleurs ni couronnes, par un docteur Valls en petite forme.
Malgré ce four, et malgré un nombre conséquent d’études économiques (ici, ici, ici ou là), de cas historiques et d’exemples vibrants d’actualité que l’encadrement des loyers ne fonctionne pas, jamais, nulle part, même pas en rêve ou sur un malentendu, plusieurs maires de villes de France, entendant l’appeau électoral siffloter dans ce genre de mesures, s’empressèrent d’expliquer à leurs concitoyens que, même la loi enterrée, l’encadrement des loyers lui survivrait, au moins chez eux, nananère.À la suite de quoi, le sondage nous apprend que ces maires, finauds, ont bien senti le vent du non-changement : en réalité, pour 44% des Français sondés, l’abandon de l’encadrement des loyers prévu par la loi est « une mauvaise chose », et un cinquième (21%) estiment qu’il fallait la supprimer. Mieux : une majorité de Français (56%) pense au contraire qu’il faudrait étendre ce dispositif à un maximum de grandes villes.
Mais voilà : non, ceci n’est pas une coïncidence, un hasard, un malentendu ou une méprise.
Cette majorité de Français qui, manifestement, ne comprennent rien à rien à l’économie basique, et qui réclament plus de lois, plus de règles, plus d’encadrements, cette majorité n’est pas fortuite. Elle existe partout, dans différents domaines, sur différents sujets. Ainsi, cette majorité, pétillante de joie que seule l’innocence d’une parfaite ignorance apporte, se retrouve derrière ces lois qui, on l’a vu, finissent par faire le code de l’immobilier, ou qui font déjà le code fiscal, celui de la sécurité sociale, celui du travail, de la vexation routière ou tout autre qu’il leur plaira de plier à leur vision enfantine de la réalité.
Et là encore, un bref coup d’œil à l’actualité permet de s’en convaincre : alors même que ce pays croule sous les chômeurs, alors même que, depuis le plus petit salarié jusqu’au plus grand patron, de la plus modeste entreprise unipersonnelle jusqu’à la multinationale rutilante, tous devraient s’organiser et se battre pour créer de l’emploi, accroître la compétitivité du pays et créer de la richesse, seule voie par laquelle les pauvres s’extraient de la misère, alors même que la situation économique du pays, normalement connue de tous, ne laisse absolument aucune latitude ni aucune voie d’interprétation sur le mode « Bah, même pas mal », tout un pan du pays semble s’employer à saboter méthodiquement les efforts déployés par les uns et les autres.
Regardez ces beaux syndicats se dressant contre des salariés dont ils sont prétendûment les défenseurs ! Alors que le travail de nuit était réclamé par ces derniers dans une boutique de luxe sur les Champs-Élysées, nos fiers syndicalistes, finement aidés d’un code du travail et d’une Cour de Cassation commodément d’accord avec eux, ont réussi à en interdire purement et simplement le principe. Encore une fois, la majorité (celle qui fut derrière les votes des députés qui écrivirent le code) a tranché : des adultes qui décideraient, de leur plein gré, vouloir travailler jusqu’à 21H sont des enfants inconscients auxquels il convient d’interdire leur activité. C’est tout.
Regardez ces beaux syndicats de pilotes, ces pilotes eux-mêmes, qui, tout frétillant d’aise que leur procure leur pouvoir de nuisance, persistent dans une grève alors que les motifs s’en sont pourtant évaporés ! Alors que le développement de Transavia apparaît de plus en plus comme indispensable à la survie d’une société qui n’aura pas su prendre le tournant des compagnies low-cost et qui est restée coincée dans le monde merveilleux de l’aérien des années 70, la partie la plus privilégiée de la société (selon toutes les métriques) se bat à présent pour que, concrètement, les coûts de fonctionnement de cette nouvelle entité soient les plus élevés possibles, réduisant à néant toute perspective d’avenir pour Transavia, et, par voie de conséquence, pour Air-France et donc pour eux-mêmes à plus ou moins long terme.
Tout ceci est bel et bon, mais on peut aller encore plus loin dans la consternation. Pendant que les uns s’emploient clairement à réduire chez les autres toute velléité de faire quelque chose d’utile, de productif ou d’innovant, c’est bien depuis les entrepreneurs eux-mêmes que le coup de grâce arrive lorsqu’on apprend, via un autre sondage consternant, la liste de leurs personnalités politiques préférées.
Pour ces chefs d’entreprise, c’est Alain Juppé qui est la personnalité la plus à même « d’appliquer un programme économique de relance de l’économie française ». Oui, vous avez bien lu, Alain Juppé, le repris de justice, celui-là même qui a prouvé, en 1995, qu’on peut très bien retourner sa veste et baisser son pantalon tout en restant droit dans ses bottes. Celui qui aura cédé, après une grève mémorable, à toutes les revendications de syndicats iniques, y compris celles liées au paiement des jours de grève (un comble !), celui qui aura cédé alors que la France aura subi, au travers de cette grève dure, la plus honteuse des mise à mort : à la suite de ce renoncement, que dis-je, de cette branlée minable en rase campagne, les politiciens ont choisi de passer au point mort pour n’en plus sortir et y être encore, quasiment 20 ans plus tard. Et c’est donc cette carpette, ce triste roublard qui arrive même à se faire proprement mettre en boîte par un ex-ambassadeur chinois, qui serait donc la personnalité politique de nos chefs d’entreprises, accompagné, il est vrai, de gros calibres comme Sarkozy (le gros relou) ou encore Baroin (dont le stage photocopies/café dans les coulisses de Matignon est pourtant terminé depuis longtemps).
Vous l’avez compris : ces faits, indiscutables, montrent l’ampleur du problème. Si le pays est ingouvernable, c’est précisément parce que son peuple ne veut pas être gouverné. Il veut être dorloté. Il veut être cajolé, rassuré par des discours, et mitonné avec des petites taxes et des petits impôts sympathiques, faits « pour son bien », qui taperont Les Méchants (les riches, les possédants, ceux qui fraudent, qui trichent, qui ne jouent pas le jeu, les pas beaux et les vilains, quoi), et qui aideront Les Gentils.
Et ainsi, ce peuple réclame toujours plus de lois, de règlements. Ce peuple rouspète et fait la grève alors que la situation est catastrophique. Et ainsi, une partie du peuple va choisir d’imposer à l’autre des contraintes invraisemblables pour qu’enfin, ce soit le paradis pour lui (et puis l’autre est trop stupide, de toute façon, puisqu’il pense que le peuple, c’est lui – quel con !). Et ainsi, le peuple va se choisir des dirigeants qui l’ont déjà floué, parce que cette fois, ce n’est pas pareil, c’est la bonne. Il va se choisir des gens qui savent lui parler, lui susurrer les bons mots doux et l’embobiner comme il l’aime.
Et tout ça porte un nom : c’est un doux collectivisme, un socialisme démocrate et doux au toucher. Et tout le monde le réclame. Parce que, c’est sûr, cette fois, ça va marcher !
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