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L’amour est souffrance ?

Publié le 27 juillet 2014 par Lespetitspapiersdefantomette

Quand je vois où nous mène l’amour parfois, vers quelles extrémités il nous entraîne, je me demande si on fait bien d’y courir après. L’amour c’est un pari fou où l’on mise tout sur une seule personne jusqu’à ne plus voir qu’elle. On en fait notre centre de rotation et tout, tout gravite autour d’elle. Nos peines, nos joies, nos larmes et nos rires. C’est un manège infernal où les sentiments s’entrelacent, s’emmêlent, jusqu’à ce que parfois, les liens s’effilochent, se distendent, et se rompent, nous laissant comme un pantin inanimé. Pinocchio à l’état de marionnette. Pauvre petite poupée de bois qui n’a pas même la force de relever la tête sans ces fils qui la contrôlent. Le marionnettiste, ce bourreau qui joue avec les cordes et regarde ces bras et ces jambes se mettre à danser pour lui plaire.

poupée

Jolie poupée, tu n’as pas besoin de ces mains pour te diriger. Tu as ta propre force, bien ancrée au fond de toi. Trouve là et coupe tes liens. Ne t’attache pas ainsi à quelqu’un. Assure-toi que tes liens ne soient pas trop serrés, que tu puisses t’en échapper sans qu’ils ne laissent de marques trop profondes dans ta chair.

Maintenant tes poignets saignent et tu les contemples impuissante. Tu vois perler ces gouttes de sang, une par une, comme un millier de petites flèches fichées au plus profond de ton cœur.

Pourquoi aimer ? A-t-on besoin de déverser tout notre amour dans un seul récipient ? Ne serait-il pas mieux d’en garder un peu, de le diviser ?

S’assurer de toujours conserver un peu d’amour à bouturer pour toujours avoir le plaisir de contempler croitre encore et encore des amours, comme des rosiers grimpants.

Ces plantes aux fleurs si délicates et à l’arôme si puissant qui révèlent quand on s’en approche de trop près des épines impitoyables.

Gare à celui qui se pique à la fleur de l’amour trop violemment.

Peut-il y avoir amour sans souffrance, ou ne sait-on que l’on aime que dès l’instant où notre cœur se serre et que l’on ne peut plus rien avaler ?

Doit-on croire Anatole France selon qui « l’amour ne fleurit que dans la douleur » ?

A quoi bon aimer alors si même Freud nous prévient contre ce mal pourtant si doux « nous ne sommes jamais aussi mal protégés contre la souffrance que lorsque nous aimons ».

Et des citations sur cet amour fait de douleur sont kyrielles. Il n’y a qu’à se baisser pour les cueillir.

« Qui commence à aimer doit se préparer à souffrir », Chevalier de Méré.

Nous voilà prévenus… Pourtant, même après avoir expérimenté à de nombreuses reprises cette brûlure insidieuse qu’est la déception, ce poison qui nous ronge de l’intérieur, d’abord invisible, indolore, pernicieux, puis plus incisif, faisant apparaître des symptômes dignes de personnes au seuil des portes des enfers, on reste tentés de sauter encore une fois dans les flammes, espérant cette fois que notre combinaison ignifugée nous protégera.

Pourtant, à chaque fois on se brûle les ailes. A trop vouloir voler près du soleil Icare a fini par rejoindre brutalement la terre ferme. La chute est rude lorsqu’on tombe de haut. La chute est rude lorsqu’on a connu le brasier de l’amour.

Etendus au sol, comme ancrés dans la glaise, on n’a d’autre choix que de lever les yeux vers ce qui est désormais notre passé. Contempler ce soleil qui de loin brille déjà beaucoup moins. Il nous appelle, il nous attire. Après la brûlure, cet été à la chaleur étouffante, vient l’hiver, glacial.

Il fait froid loin de cet être qui réchauffait nos nuits, notre cœur. On a laissé un petit bout de nous-mêmes là-haut. On se sent plus fragile, incomplet, alors que c’est en réalité la première fois depuis bien longtemps que l’on vit exclusivement pour nous.

N’avoir d’autre préoccupation que nous même devrait nous libérer, mais on s’enferme dans la déprime. Les barreaux sont épais et si proches les uns des autres que l’on peine à distinguer l’extérieur. Pour nous le ciel est gris, gris comme les murs de cette prison à l’intérieur de laquelle on tourne comme un fauve en cage jusqu’à épuisement. On alterne les phases d’inanition et de boulimie.

On maigrit, on prend peur, ces os soudainement saillants, omniprésents nous rappellent l’objet de nos tourments. Alors on mange et on mange encore, jusqu’au dégout. Un dégout de tout, de ces aliments qui nous remplissent comme une outre, ces aliments qui nous salissent, nous font enfler comme un ballon. On mange jusqu’à se dégouter soi-même. Jusqu’à ne plus oser regarder ce corps répugnant où les os  saillants ne sont plus qu’un lointain souvenir. Ces os qu’une couche épaisse, dégoulinante est venue recouvrir comme pour amortir les coups durs de la vie.

On ne rentre plus dans certains vêtements et notre cœur semble lui aussi avoir grossi. Il pèse contre notre poitrine, tente de s’en échapper. Il est bien trop imposant pour être ainsi confiné.

Tomber amoureux est un acte courageux.

C’est prendre le risque d’être déçu, de connaitre des désillusions. De souffrir, beaucoup, longtemps.

On ne devrait pas engager ainsi notre cœur. Il nous appartient. Pourquoi le livrer en pâture au premier venu ?

Il est si doux d’aimer.

Fantômette

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