Une femme artiste, voilà une bonne idée. Mais Niki de Saint Phalle n’est pas une « nana » comme les autres. La preuve… au Grand Palais.
En matière d’artiste moderne, Niki de Saint Phalle fait office de précurseur dans la forme et le fond. Féministe à fond, l’artiste tire à boulets rouges sur tout ce qu’elle crée et voit en grand … la femme du XX° siècle. De quoi nous attirer en masse au Grand Palais.
A l’affiche : Elle fait un peu peur avec sa carabine et son regard. Mais avec sa crinière flamboyante et ses manches griffonnées, Niki de Saint Phalle est un feu de joie à l’ art mi- pop mi- surréaliste. Elle nous aura, oui elle nous a eues. Elle vise juste, là où ça fait du bien pour les femmes.
Derrière la façade : Monter le grand escalier du Grand Palais signifie souvent entrer dans un autre monde. Cette impression prend nettement de son sens avec l’exposition Niki de Saint Phalle. A première vue, on avait tremblé devant ses premières oeuvres. Clairement abstraites, les réalisations de la jeune Niki laissent le spectateur songeur. Car devant « Pink Nude in Landscape » ou « Nightscape », il est difficile de distinguer le paysage du nu. Quant au matériel, il semble que l’artiste soit une des créatrices du DIY avec son utilisation d’huile, plâtre, cailloux, grains de café, poterie, jouets ou … crâne de petit animal! Ce n’est qu’un avant-goût du côté noir de la plasticienne. La rencontre avec ses « copines » Eva ou Valentine fait aussi froid dans le dos. Mais ces mariées qui adoreraient Tim Burton montrent l’horreur des mariées, accouchements, prostituées avec leur look de sorcières. A se demander ce qui convient aux yeux de l’artiste, bien marquée par la lecture du Deuxième Sexe, et qui voulait une héroïne et hésitait entre George Sand, Jeanne d’Arc ou Napoléon en jupon !
Et si Alain Souchon rêvait de voir sous les Jupes des Filles, Niki de Saint Phalle dévoile ce qui se cache sous les jupons des mères avec son exploration du ventre de la génitrice. Une exploration à grande échelle de cette société matriarcale et de ses rêves présentée au Moderna Museet de Stockholm en1966 A la tête de ce nouveau régime, une seule race : les Nanas !
Ces Grâces d’un nouvel âge font les belles dans leur galerie des glaces. Ces femmes opulentes semblent danser sur un ballet de Chopin au milieu des nombreuses lettres d’amour stylisées envoyées à leurs amants. Tout cela est très éloigné des sculptures géantes de la routine de vieux couples, en forme de saynètes ironiques. Toujours à la recherche de nouvelles techniques, l’artiste séduite par la famille du Nouveau réalisme laisse exploser sa violence avec ses tableaux au tir. Mais, toujours rebelle, Niki de Saint Phalle décide à la fin de sa vie de s’affranchir des salles d’expositions classiques. Et c’est dans les parcs des quatre du monde, que la créatrice se plaît à poser ses totems et son crâne majestueux en Espagne ou aux Etats-Unis.
La cabeza très bling-bling évoque le mieux la générosité esthétique que l’artiste voulait laisser au plus grand nombre. Une exposition d’ une richesse esthétique et philosophique rares.
Jusqu’au 2 février 2015