d'après L’IDYLLE de Maupassant
On avait quitté Gênes depuis peu.
Le soleil versait sur la mer une pluie de feu.
Dans notre compartiment,
Une grosse femme regardait la vue :
-« C’est beau, cette côte rocheuse ! »
Elle avait peut-être vingt-cinq ans,
Les yeux noirs, les joues charnues,
Et la poitrine volumineuse.
Elle fermait les yeux de temps en temps,
Puis les rouvraient brusquement.
Des gouttes de sueur perlaient sur son front.
Elle respirait avec peine
Comme si elle souffrait d’une gêne,
D’une pénible oppression.
Et elle desserra un peu son corsage.
Son voisin regardait ses avantages.
Elle n’avait pas l’air de s’en inquiéter
Et continuait à se déboutonner :
-« Vous êtes du Piémont ? » -« Oui, de Biela. »
-« Moi, je suis d’Ivreja. »
Ils parlèrent du pays,
Devinrent amis,
Et évoquèrent des événements locaux.
Lui, devait avoir vingt ans.
Il avait l’air d’un miséreux naïf et sot.
Elle, était mariée et disait avoir deux enfants.
Elle les avait laissés en garde à sa mère
Car elle venait de trouver
Une place de nourrice à Hyères.
Le corsage ouvert, elle haletait.
Elle lui dit d’une voix accablée :
-« Le sein, je ne l’ai pas donné
Depuis hier, huit heures.
Me voilà étourdie comme si j’allais tomber.
C’est comme un poids
Que j’aurais sur le cœur.
Quand, on a du lait,
On doit, chaque jour, donner le sein trois fois
Sans ça, on se trouve gênée.
On ne peut plus respirer.
Avoir du lait tant que ça, c’est malheureux. »
-« Oui, on ne fait pas ce qu’on veut
Mais ça doit bien vous tracasser. »
-« Je presse dessus et sort du lait.
À Ivreja, les voisins venaient me regarder. »
-« Ah ! Vraiment ? »
-« Oui, vraiment.
Je ne peux plus tenir.
Ça va me faire mourir. »
Elle ouvrit son caraco
Ex abrupto.
Son sein droit apparut,
Énorme, tendu.
-« Je ne tiens plus. Si vous vouliez,…vous… »
Elle se pencha vers lui.
Le jeune homme se mit à genoux,
Saisit la lourde mamelle
Comme un gros fruit,
,
Se mit de façon goulue à téter.
Il buvait à régulières gorgées
Quand elle lui dit : « En voilà assez pour elle.
Prenez l’autre maintenant. »
Il obéit docilement.
Elle respirait avec bonheur à présent.
Alors, elle l’écarta doucement :
-« Je me sens mieux. Ça suffit.
Grand merci. »
-« C’est moi qui doit vous remercier
Car voilà deux jours que je n’avais pas mangé ! »