la bonne action d'un italien...

Publié le 26 septembre 2014 par Dubruel

d'après L’IDYLLE de Maupassant

On avait quitté Gênes depuis peu.

Le soleil versait sur la mer une pluie de feu.

Dans notre compartiment,

Une grosse femme regardait la vue :

-« C’est beau, cette côte rocheuse ! »

Elle avait peut-être vingt-cinq ans,

Les yeux noirs, les joues charnues,

Et la poitrine volumineuse.

Elle fermait les yeux de temps en temps,

Puis les rouvraient brusquement.

Des gouttes de sueur perlaient sur son front.

Elle respirait avec peine

Comme si elle souffrait d’une gêne,

D’une pénible oppression.

Et elle desserra un peu son corsage.

Son voisin regardait ses avantages.

Elle n’avait pas l’air de s’en inquiéter

Et continuait à se déboutonner :

-« Vous êtes du Piémont ? » -« Oui, de Biela. »

-« Moi, je suis d’Ivreja. »

Ils parlèrent du pays,

Devinrent amis,

Et évoquèrent des événements locaux.

Lui, devait avoir vingt ans.

Il avait l’air d’un miséreux naïf et sot.

Elle, était mariée et disait avoir deux enfants.

Elle les avait laissés en garde à sa mère

Car elle venait de trouver

Une place de nourrice à Hyères.

Le corsage ouvert, elle haletait.

Elle lui dit d’une voix accablée :

-« Le sein, je ne l’ai pas donné

Depuis hier, huit heures.

Me voilà étourdie comme si j’allais tomber.

C’est comme un poids

Que j’aurais sur le cœur.

Quand, on a du lait,

On doit, chaque jour, donner le sein trois fois

Sans ça, on se trouve gênée.

On ne peut plus respirer.

Avoir du lait tant que ça, c’est malheureux. »

-« Oui, on ne fait pas ce qu’on veut

Mais ça doit bien vous tracasser. »

-« Je presse dessus et sort du lait.

À Ivreja, les voisins venaient me regarder. »

-« Ah ! Vraiment ? »

-« Oui, vraiment.

Je ne peux plus tenir.

Ça va me faire mourir. »

Elle ouvrit son caraco

Ex abrupto.

Son sein droit apparut,

Énorme, tendu.

-« Je ne tiens plus. Si vous vouliez,…vous… »

Elle se pencha vers lui.

Le jeune homme se mit à genoux,

Saisit la lourde mamelle

Comme un gros fruit,

,

Se mit de façon goulue à téter.

Il buvait à régulières gorgées

Quand elle lui dit : « En voilà assez pour elle.

Prenez l’autre maintenant. »

Il obéit docilement.

Elle respirait avec bonheur à présent.

Alors, elle l’écarta doucement :

-« Je me sens mieux. Ça suffit.

Grand merci. »

-« C’est moi qui doit vous remercier

Car voilà deux jours que je n’avais pas mangé ! »