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24 SEPTEMBRE 2014 | PAR PIERRE PUCHOT
Trois semaines après l'arrêt des bombardements, Gaza est en ruines. 55 000 bâtiments détruits, des amas de décombres, une population hébétée : la reconstruction coûterait plus de 5 milliards de dollars. Elle paraît utopique malgré les efforts de l'ONU. Reportage de notre envoyé spécial.
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De notre envoyé spécial à Gaza. De nuit, Gaza fait encore illusion. Vers 20 heures, quelques minutes après le coucher du soleil, les bateaux laissent derrière eux le petit port pour former une harmonieuse file indienne qui se déploie lentement le long du littoral. Puis les lampes halogènes s’allument, attirant les rares poissons qui s’aventurent si près des terres. En regardant ces lampions immobiles, seul un œil aguerri peut vite repérer les bateaux des gardes-côtes israéliens, positionnés derrière les pêcheurs le long de la bande de Gaza pour les empêcher de trop s'éloigner du port. Quitte à faire feu sur leurs embarcations, comme cela arrive chaque mois, officiellement par crainte de trafics d'armes ou de la contrebande.
C’est au petit jour seulement, alors que la plupart des pêcheurs rentrent les cales vides, que l’on constate l'ampleur des dégâts, et ce que Gaza est devenu après l’offensive israélienne de 51 jours qui s’est abattu sur le petit territoire palestinien. Bilan encore provisoire établi par l'ONU : au moins 2 147 morts, en grande majorité des civils, et 11 000 blessés parmi les Gazaouis ; contre 66 soldats et 6 civils tués côté israélien. Des quatre-vingts cahutes de béton qui bordent le port et servent aux pêcheurs à entreposer leur matériel, trente-cinq ont été détruites dans les bombardements de l'armée israélienne.
Devant ces hangars, plusieurs s’activent ce matin de fin septembre pour réparer ce qui peut encore l’être. « La moitié des filets ont été brûlés, de même que nos moteurs, les dégâts sont considérables, et l’on ne comprend toujours pas pourquoi Israël a frappé ici, il n’y a jamais eu ni arme, ni combattant », soupire Miflih Abu Ryala, membre du syndicat des pêcheurs. Fils, petit-fils de pêcheurs, cet homme de 37 ans, père de quatre enfants, a perdu quatre de ses cinq moteurs dans les bombardements. Il se promène, un verre de thé à la main, incrédule, au milieu des débris partiellement calcinés. Dix bateaux ont été totalement détruits dans les bombardements, vingt-cinq sont inutilisables. Trois millions de dollars de matériels sont partis en fumée.
Face à l'étendue des destructions, les programmes de l’Allemagne, de la Belgique et du Qatar, engagés ici pour la construction de nouveaux ateliers, là pour réparer une dizaine de bateaux et barques de bois, paraissent dérisoires. Encore inachevé, le nouveau hangar bâti avec les fonds du Qatar a été lui aussi partiellement détruit. Le port de Gaza ne peut évidemment pas satisfaire les besoins d’une ville de plus de 500 000 habitants.
À Gaza, avec le temps et le blocus économique imposé depuis 2006, la pêche est devenue cruciale, à mesure que les autres secteurs d’activité déclinaient, faute de matériaux, d’électricité ou de possibilité d’exporter les produits manufacturés. Fin septembre 2014, la pêche ne nourrit même plus les 3 700 habitants de Gaza qui en font toujours leur profession, de Rafah, au sud, à Beit Hanoun, au nord du territoire.
« C’est pourtant tout ce qu’il nous reste, à nous, les pauvres, qui n’avons pas bénéficié de formation ou d’études supérieures, dit Miflih Abu Ryala. Au-delà de tout, le principal problème demeure le siège israélien. Nous ne pouvons toujours pas pêcher au-delà de 3 milles, et on ne trouve rien à cette distance. C’est la saison de la sardine, on la pêche normalement entre 6 et 12 milles. Depuis deux jours, je ne vais d'ailleurs plus en mer, cela ne sert à rien : nous sommes trop nombreux, et l’on ne pêche rien. »
L’accord conclu au Caire entre le Hamas et Israël le 27 août, après 51 jours de guerre, indiquait que la limitation de la zone de pêche devrait être levée pour passer à 6 milles, puis à 12. Mais fin septembre, les pêcheurs n’ont toujours rien vu venir. L’accord signé en 2012 après l’offensive israélienne Pilier de défense prévoyait déjà l’extension du domaine de pêche pour les Gazaouis. Dans l'attente, les pêcheurs survivent à peine, percevant de leur pêche un revenu dérisoire de 300 shekels (70 euros) mensuels, se nourrissant surtout des sacs de riz distribués par l’UNRWA (agence de l'ONU) et déposés devant les devantures d’immeubles et les nombreuses petites épiceries de la ville.
Au-dessus du port, la ville de Gaza tente elle-même de retrouver un semblant de normalité. Parfois, une maison écroulée rappelle la violence des événements. Mais ici, la vie pourrait presque reprendre un cours normal. Au nord, à l’est, au sud en revanche, l’offensive a réduit certains quartiers à néant et plongé les Palestiniens dans un paysage lunaire, où il est souvent difficile de distinguer l’ancien emplacement des rues et celui des habitations rasées.
Chajaya, quartier dévasté
Dans le nord de la bande de Gaza, le paysage dévasté offre cent occasions au visiteur d’aborder les habitants revenus sur leurs anciens lieux d’habitation et désireux de raconter leur histoire et la manière dont ils ont vécu ces bombardements intensifs qui ont anéanti une large partie de ce territoire.
« On dirait un immense tremblement de terre », dit Mahmoud al-Manasra, étudiant de 21 ans. Cet habitant de Chajaya – quartier de la ville de Gaza proche de la frontière et très densément peuplé (environ 100 000 habitants avant l’offensive israélienne) – a fui avec sa famille dès le début des bombardements, le 19 juillet : « Ce jour-là, il y a eu plusieurs dizaines d’explosions en moins d’une minute, c’était un cauchemar total, confie le jeune homme. Nous avons fui, avec mes parents, et trois de mes frères qui étaient avec nous. Nous sommes partis avec ce que nous avions sur nous, à quelques centaines de mètres de là, chez un cousin. Nous habitons toujours chez lui. »
Quelques jours plus tard, lorsqu’il tente avec son frère de revenir sur les lieux pour récupérer ses papiers d’identité, l’armée israélienne s’est déjà déployée, et fait feu sur eux : son frère est blessé de plusieurs balles dans la jambe. Il est de toute façon trop tard : leur ancien appartement n’existe plus : « De notre immeuble de cinq étages, il ne reste que la cave » (voir ici la vidéo du bombardement du marché de Chajaya le 30 juillet).
À mesure que l’on avance avec lui dans la rue Mansoura, l’une des principales voies qui traversent le quartier, Mahmoud énumère les propriétaires des appartements au sein des immeubles de deux, trois étages désormais écroulées, et dont les pancartes de carton apposées sur les décombres rappellent les noms des familles qui y vivaient. « Ici, une bombe est tombée et a tué plus de vingt personnes, explique Mahmoud à un carrefour. Quand j’y repense, nous avons eu beaucoup de chance, j'habitais à cinquante mètres de là. » Et puis, parvenu au bout de la rue, la densité urbaine laisse place à la désolation.
Sur la droite, une butte de terre haute comme deux hommes signale le début ce que l'on désignait comme la rue Montaar. Des maisons détruites, le sol éventré par les obus, des tiges de fer qui émergent de la terre... Plus un arbre, plus un oiseau, plus de route désormais, tout n'est que boue. Circuler en voiture n’est souvent plus possible, même en roulant au pas, et les rares Palestiniens que nous croisons circulent à pied, à dos d’âne ou à cheval. Parfois, en passant près d’un amas de gravats, une odeur âcre, à peine perceptible, remonte du béton : ce sont les corps des victimes des bombardements qui n'ont pas pu être dégagés et continuent de pourrir sous les décombres.
Sur le bord de la route, en face d’une mosquée disloquée et dont seul le minaret persiste à tenir debout, un vieil homme en djellaba écrue prend le thé, le dos appuyé contre les parpaings d'une construction toute récente. « Ma maison est en face de vous », affirme Mohammed Halabi, 58 ans, en désignant une masse informe d'où seuls émergent les restes d'une dalle de béton. Pendant les bombardements, sa femme est morte d’une crise cardiaque. Il habite aujourd’hui avec ses enfants rue n°30, au milieu de la ville de Gaza, mais vient régulièrement se recueillir sur place, pour« faire le deuil », explique-t-il.
Pendant la guerre, comme d’autres habitants du quartier, Mohammed Halabi a reçu un appel de l’armée israélienne sur son téléphone, pour qu’ils évacuent les lieux, lui et sa famille, avant l’entrée des chars israéliens. « Au début, les Israéliens ont prévenu les habitants de notre quartier, mais nous ne voulions pas fuir notre maison, explique-t-il, cela nous paraissait impensable de tout laisser, toutes nos affaires, toute notre vie, pour fuir je ne sais où. Et puis, voyant que les gens ne fuyaient pas, ils ont commencé à bombarder. Et nous avons été contraints de partir pour sauver nos vies. »
Pour justifier ces bombardements, l’armée israélienne a affirmé qu’au moins 140 roquettes étaient parties de ce quartier. « Bien sûr, il y avait des armes et des combattants qui passaient par Chajaya pour résister à l’invasion, poursuit Mohammed. Nous sommes ici près de la frontière. Mais nous, nous sommes des civils, ce sont des civils qui habitaient ici. Et vous voyez bien, tout est détruit, tout. Le but des soldats israéliens qui sont venus ici était de détruire, et non de se protéger. »
Sur le « toit » de la maison de Mohammed, au sommet du monticule de tiges de fer et de béton, flotte un drapeau vert du Hamas, comme sur beaucoup d’autres maisons détruites : « Ce sont nos enfants, ceux du quartier, qui ont disposé ces drapeaux, explique-t-il. Cette guerre les a jetés dans les bras des Brigades, peu importe qu’elles soient du djihad islamique, du Hamas ou du Fatah. Cela n’a rien à voir avec la politique : ce drapeau est là pour que nous n’oublions pas le mal qui nous est fait, parce que nous sommes palestiniens, et que notre devoir est de continuer à résister, avec nos moyens, aussi minimes soient-ils. »
Des « crimes de guerre » pour Human Rights Watch
En poursuivant ce qui reste de la route Montaar, à mesure que l’on se rapproche de la frontière avec Israël, les traces de pneus des blindés israéliens creusent l’étendue de sable de ce qui était encore en juin un grand parc, l’un des rares de Gaza, encadré par un hôpital et une école, partiellement détruits. Les cris de trois enfants jouant dans les décombres de ce qui fut le parking de l’école résonnent dans les cavités et cratères formés par l’impact des bombes. Au beau milieu de l'après-midi, on n'entend plus qu'eux.
À moins de quelques kilomètres de ce quartier dévasté, à Beit Hanoun, une école porte encore sur le toit les stigmates de ces jours d’offensive israélienne. Quelques heures après le début de la guerre, Mazen Hammad avait fui avec sa famille leur appartement pour se réfugier, comme 1 800 personnes du quartier, dans cette école gérée par l'UNRWA.
« Le 24 juillet, le Croissant-Rouge nous a annoncé que sa coopération avec l’armée israélienne était suspendue à la demande de cette dernière, et qu’il fallait évacuer l’école parce qu’elle risquait d’être bombardée », raconte Mazen Hamad, qui habitait toujours sur place, dans une pièce de 12 m2, avec les onze membres de sa famille en attendant d’être relogé. « Les Israéliens nous ont donné deux heures pour évacuer l’école, explique-t-il. Mais malgré l’arrivée de bus du Croissant-Rouge, l’évacuation n’a pu se faire à temps : 20 personnes sont mortes, et 250 ont été blessées », explique Mazen Hamad, qui affirme par ailleurs que l’armée israélienne n’a pas respecté le délai qu’elle avait fixé et n’a attendu que « quelque minutes » avant de frapper le toit de l’école, quand celle-ci n'abritait « aucune arme ni combattant ».
Début septembre, cette école a fait partie des trois dossiers examinés par l’ONG Human Rights Watch. Quarante-cinq civils, dont dix-sept enfants, ont été tués durant le bombardement de trois écoles par l’armée israélienne. Tsahal a annoncé de son côté l’ouverture de cinq enquêtes internes, dont l’une porte sur les événements du 24 juillet, et affirmé qu'au moins 1 600 des 3 500 roquettes lancées sur son territoire l'ont été depuis des zones résidentielles, dont des mosquées ou des écoles. Pendant la guerre, l'UNRWA avait annoncé avoir retrouvé des roquettes dans deux de ses écoles, désaffectées cependant.
Selon Human Rights Watch, « Israël n’a fourni aucune explication convaincante » pour justifier des frappes « menées contre des écoles où des gens cherchaient à se protéger », estime Fred Abrahams, rapporteur de HRW. L’ONG considère que l'armée israélienne a ainsi commis des « crimes de guerre » au cours de l’opération Bordure protectrice.
À quelques centaines de mètres de l’école bombardée le 24 juillet, à l’entrée de ce qui, fin juin, était encore l’un des souks les plus fréquentés de Beit Hanoun, Assam, 31 ans, discute avec sa mère et sa plus jeune fille, assis sur un matelas au milieu de son salon. Son immeuble n’a plus de façade. Mais il se rend tous les jours sur les lieux, parce que c’est « chez lui », et qu’il a besoin, comme des milliers d’habitants de Gaza, «de se rendre compte de ce qui est arrivé ».
De leur maison, on ne voit plus qu’un immense tas de gravats. C'était jadis la pharmacie du quartier, aujourd'hui réduite à néant, comme la plupart des commerces de ce quartier devenu fantôme. Loin de constituer des cas isolés, la destruction méthodique des commerces et des entreprises interroge sur le potentiel but économique de l’offensive israélienne.
« Frapper les civils, mais aussi l’économie »
Égaré dans un quartier de Beit Lahia, au nord de Gaza, nous cherchons la maison de Mohammad Abu Sultan depuis près d’une demi-heure quand Abdullah, 23 ans et jeune cousin du fermier, se propose de nous y conduire. Son bras droit est enveloppé d’un bandage. Il a été blessé à quelques centaines de mètres de là, alors qu’il fuyait avec son frère sa maison, sous le feu des bombardements.
Propriétaire de vingt-cinq hectares de terres à Tin Ouanis, tout près de la frontière nord, Mohammad Abu Sultan les exploite avec ses cinq frères depuis 1976. Patates, courges, citrons, pastèques… C’est surtout grâce aux fraises et aux fleurs qu’ils gagnent leur vie, et emploient trente personnes à 15 euros la journée de travail, pour un bénéfice total de 66 000 euros les meilleures années. Après le transit obligatoire par Israël, Mohammad exporte ses fraises, fleurs et légumes en France, ailleurs en Europe et aux États-Unis. Mais pas cet été.
« Les premiers jours de l’invasion, les bulldozers et les avions israéliens ont tout rasé, raconte le fermier, âgé de 53 ans. Il ne restait plus rien, tout ce que l’on avait planté année après année était détruit, et le sol, souillé. Ils ont aussi réduit en miettes tout notre matériel. Les plantations de mes voisins ont également été détruites. » Le reste de leurs économies investies dans de nouvelles boutures, graines et arbustes, les six frères ont à nouveau semé la semaine passée, avec le peu de matériel qu’ils ont pu se procurer. Mais les trois quarts des terres demeurent incultivables. Mohammed et ses frères évaluent leurs pertes à plusieurs centaines de milliers d’euros, en attendant une compensation de l’Autorité palestinienne auprès de laquelle il a déposé un dossier.
« Avec ce qui me reste, je ne peux plus employer personne, et nous avons à peine de quoi nourrir nos familles, soupire le fermier. Trente-cinq années de travail pour en arriver là... Ramallah et Abou Mazen (Mahmoud Abbas, le président de l'Autorité palestinienne) doivent nous aider, sans quoi les fermiers du nord de Gaza feront bientôt tous faillite. Du Hamas, je n’attends rien : je ne fais pas partie de leur organisation, ils ne me donneront rien, ils fonctionnent comme ça. »
Les destructions de terres et plus largement d’entreprises ont atteint de plein fouet une économie déjà durement mise à l’épreuve par le blocus israélo-égyptien. Selon le Palestinian center for Human rights (PCHR) et la chambre de commerce de Gaza, plus de 400 commerces, fabriques et entrepôts ont été frappés par l'armée israélienne, souvent loin des zones de combat, comme cet entrepôt de matériels de peinture que l’on aperçoit en retournant sur le route Salah Eddine, qui traverse Gaza du nord au sud.
« Outre les civils, Israël a ciblé des entreprises, estime Maher Tabaa, porte-parole de la chambre de commerce de Gaza, c’était clairement une politique pour affaiblir l’économie palestinienne. Certaines entreprises prises pour cible en plein Gaza étaient loin du front, et leur destruction ne peut s’expliquer que comme cela. La bande de Gaza souffrait déjà d’une grave crise économique avant cette guerre, après huit ans de siège imposé par Israël et l’Égypte. La situation est aujourd’hui critique. » L’économiste dresse le portrait d’une économie à genoux : 55 % de la population active au chômage, et un taux de pauvreté dépassant les 60 %.
Ces chiffres compromettent les espoirs d'une vie meilleure des jeunes habitants de Gaza, et des étudiants qui ont enfin repris les cours et achèvent en septembre la session d’été interrompue par la guerre. À l’université d’Al Azhar, construite par le Fatah avant l’avènement du Hamas, Wala, Joumana et Yasmina discutent à la pause sous le portrait de Yasser Arafat qui domine encore le parvis. Elles racontent un horizon professionnel qui se limite à une simple alternative : devenir enseignant ou s’exiler.
« J’étudie la chimie, explique Yasmina, qui habite près d’Abou Maarouf, le quartier qui a subi le plus de dommages à Khan Younes, au sud de la bande de Gaza, parce c’est encore le secteur où il y a le moins d’enseignants. Je serais déjà partie à l’étranger si je n’étais pas fiancée. Mais ma famille n’accepterait pas de me laisser étudier à l'étranger seule, il faudrait que nous partions tous ensemble, ce qui est très difficile. J’ai 20 ans, et je sens que malgré mes efforts, je n’accomplirai pas grand-chose dans la vie. C’est cela qui me rend le plus triste. »
Au total, les dégâts de la guerre ont été évalués à 5 milliards de dollars par les experts de la chambre de commerce palestinienne et ceux des Nations unies. Une conférence des donateurs doit s’ouvrir le 12 octobre. Elle doit décider du sort des dizaines de milliers de réfugiés, poussés dehors par la destruction d'environ 55 000 maisons. Le 16 septembre, le coordinateur de l'ONU pour le Proche-Orient, Robert Serry, a annoncé un accord entre les deux parties sur la mise en place d'un« mécanisme provisoire » pour accélérer la reconstruction de Gaza. L’ONU s’engage à contrôler que les matériaux de construction acheminés dans la bande de Gaza restent à usage civil.
Pris en tenailles entre les destructions et le siège de l'armée israélienne, le syndicat des pêcheurs anticipe déjà un autre problème, bureaucratique celui-ci, que l’aide internationale ne pourra résoudre : « La corruption est toujours présente dans nos instances de gouvernance, explique Miflih Abu Ryala. Pour être dédommagés, nous avons fourni un dossier à l’Autorité palestinienne à Ramallah, à hauteur de 3 millions de dollars. Tout passe par l’Autorité, qui redistribue au ministère de l’agriculture, qui transfère ensuite au syndicat pour que l’on répartisse les fonds. À chaque étape, de l’argent disparaît. Cette méthode de distribution n’est pas bonne, il serait temps que la communauté internationale s’en rende compte. »
Pour Maher Tabaa, l’argent ne résoudra de toute façon pas tous les problèmes. « Pour reconstruire et importer les matériaux, le ciment, il faut en finir avec le blocus israélo-égyptien, affirme l’économiste. Gaza ne pourra jamais se reconstruire et vivre un peu plus décemment si l’on n’ouvre pas les check-points. Nous resterons sous perfusion internationale, jusqu’à la prochaine guerre, qui détruira encore un peu plus. »