L’expérience de la Patagonie reste pour l’instant, une des plus fortes, que j’ai pu vivre durant un voyage. Aux confins du monde, dans une terre aride, où les mousses et bruyères sortent de terre par enchantement, on y perd tout ses repères. Impossible de rattacher la Patagonie à des images familières, ici les éléments déjouent nos sens : mer turquoise, sol à nu, montagnes enneigées, soleil, et froid sec. C’est en étant vierge et accueillant que l’on est à même de s’imprégner au mieux du pays. Les impressions s’inscrivent alors en nous, comme dans un terrain meuble.
Quittant Buenos Aires et survolant le sud du pays, nous voyons le paysage changer, le sol pelé laisse voir la terre brute, craquelée, sans artifices. C’est la nature à l’état brut dans cet état un peu plus grand que la France, qui ne compte qu’un habitant au kilomètre carré.
Tout en lisant les fantastiques “Dernières nouvelles du Sud” de Luis Sepulveda, c’est dans l’avion que je me prépare à la compréhension de ce territoire désertique et fascinant, où faune et flore étonnantes s’y épanouissent. L’ouvrage concoure à me mettre dans cette posture de découverte, car l’auteur accompagné de son photographe, parcourt toute la Patagonie, du nord au sud, en recueillant les témoignages émouvants des habitants rencontrés.
Ce tour de force est louable, car une des choses essentielles qu’il me reste de cette région, c’est finalement une impression générale presque insaisissable. Etait-ce la terre, visible, nue, mêlée à la neige et aux touffes de végétaux coriaces, ou les paysages constitués de strates dont l’association de couleurs étonnantes formait un tableau inédit ?
Ce que je sais c’est que j’ai essayé de les documenter, des les formuler, et de les consigner. En survolant donc le territoire, avant de nous poser en Patagonie, je découvre ce paysage lunaire, qui semble inhabité.
Tout en suivant des yeux les sinuosités du terrain, nous guettons des parcelles de flore, des signes quelconques de vie, et nous prenons la mesure du paysage.
En approchant, nous commençons à discerner la végétation, et ce qui semble être des habitations.
Nous arrivons de Buenos Aires, et c’est le choc thermique. Même si dans cet hémisphère, nous sommes en été, il fait tout de même bien fait. Un vent à décorner les boeufs souffle sur la plaine, et parvient à agiter les touffes d’herbe solidement accrochées.
Nous avons atterri à El Calafate, une ville proche du fameux Parc des Glaciers, où l’on peut notamment observer l’un des glaciers les plus impressionnants au monde, le Perito Moreno. L’aéroport se situe, comme la ville, sur les rives du Lago Argentino, qui étonne par sa couleur presque irréelle.
Ici les panneaux nous rappellent qu’on est quasiment à l’autre bout du monde.
En particulier, lorsque le planisphère est recentré sur l’Amérique Latine et que le monde apparait sous cet axe.
Nous restons un moment à observer le Lago Argentino.
Lorsque nous arrivons en ville, nous découvrons une architecture et une urbanisation bien particulière. Ici nos repères s’entrechoquent. Les chaumières traditionnelles en pierre jouxtent les maisons en bois plus nordiques, et les constructions en cours montrent que la ville s’étend progressivement.
Par ci, par là, des chiens en liberté, et au loin la colline sur laquelle le soleil se couche et qui s’illumine des lumières des maisons le soir venu.
Nous descendons à l’Hostel del Glaciar Pioneros, au confort suffisant, où nous apprécions l’accueil, les conseils des personnes à l’accueil, et leurs propositions d’excursions (dont nous sommes revenus ravis).
Dans le jardin, un oiseau peu farouche m’accueille me laissant penser qu’il est ici en terrain familier. S’agit-il d’un vanneau téro ?
Nous poursuivons ainsi dans la ville qui nous accueillera tous les soirs de notre séjour en Patagonie, à nos retours de balades/ expéditions.
Je suis stupéfaite du soin religieux que les habitants portent à leur gazon : arrosé avec soin tous les jours, il rivalise de verdeur.
La ville autrefois simple rassemblement de pionniers, est devenue un point stratégique pour le tourisme, en raison de sa localisation. Aux portes du Parc des Glaciers, c’est également la raison qui nous a décidé.
Nous rejoignons l’artère centrale, bordée de commerces et de restaurants, l’Avenue du Libertador.
Nous passons pour cela la passerelle de bois qui relie le quartier de notre hôtel au centre ville. Nous y faisons des courses au supermarché pour nous faire des sandwiches pour le lendemain, avant de parcourir la rue, guidés par les effluves séduisantes. Ici il vous fait goûter à la parilla, l’agneau cuit longuement au grill, la sauce « chimichurri » relevée, et le locro sorte de ragoût préparé avec des haricots blancs, du chorizo, et du maïs, parfait lorsqu’on rentre des glaciers.
Bien sûr, on ne peut éviter de parler des empanadas, petits patés de viande, incontournables, et disponibles partout dans le pays.
Mes péchés mignons restent le maté, la boisson nationale faite à partir d’herbes, que tout le monde sirote avec une paille en fer spéciale à même un petit gobelet en calebasse, ou directement dans une thermos ; et le meilleur et l’impardonnable dulce de leche. Cette confiture de lait concentré caramélisée est une torture de douceur. Et le pire c’est qu’elle accommode tous les mets sucrés : des tartines du matin jusqu’aux glaces et gaufres.
Dans l’avenue principale donc, vous pourrez également trouver dans une petite partie commerçante, un agréable bar où il est bon de prendre un verre à toute heure. Chez Borges y Alvarez vous pourrez profiter d’un lieu atypique et agréable.
A suivre la suite et le commencement de nos découvertes inoubliables faites aux confins du monde…