Un homme prend sous son aile le frère de celui qui lui a volé sa voiture afin de la retrouver...
La critique après la chute de Borat
La compétition du dernier Festival de Cannes n'a pas été réellement attirante, la faute à une généralité bien malheureuse: 99% des films ont été réalisé par des cinéastes déjà venus. Entre un réalisateur turc qui fait une palme de 3h, Bertrand Bonnelo qui fait redite, un Crocro toujours pas retrouvé et l'énième film des frères Dardenne, on est en terrain connu (même si certains crus sont bons comme The Homesman et Sils Maria). Comme souvent depuis quelques années, c'est dans les catégories annexes que les découvertes se font. C'est le cas de The Rover présenté hors compétition (plus particulièrement en séance de minuit, soit une visibilité minime par rapport aux critiques élogieuses et moi-même en voyant la gueule répétitive de la compet) et second film de David Michôd, responsable du brillant Animal Kingdom. Le réalisateur australien a alors été courtisé par Hollywood, toujours avide de prendre sous son aile (humour!) certains réalisateurs étrangers qu'ils peuvent souvent utiliser comme tâcheron de service (c'est arrivé par chez nous, c'est arrivé à HK, c'est arrivé ailleurs...), mais il a décidé de faire un film hors du commerce hollywoodien. Ecrit en compagnie de l'acteur Joel Edgerton (vu dans Warrior et prochainement Ramsès dans Exodus), le film s'est attiré deux poids lourds pouvant lui permettre une visibilité digne de ce nom: Guy Pearce qui est revenu en force ces dernières années après une décennie assez désastreuse; et Robert Pattinson parvenant enfin à se sortir de cette putain de saga Twillight.
Contrairement à ce que l'on pouvait croire en regardant la bande-annonce, The Rover n'a rien d'un film post-apocalyptique et n'a pas grand chose à voir avec Mad Max de George Miller, malgré l'outback australien comme décor. Il se situe dans un monde bien plus proche "après la chute". Le synopsis nous parlait que l'Australie serait désormais sous la coupe de la Chine. Chose tout à fait probable au vue de leur visibilité économique mondiale actuelle. Ainsi la première séquence renvoie à cela: Pearce rentre dans une maison avec deux asiatiques comme si cela était devenu une généralité. Mais surtout on voit que l'économie n'a plus de réelle valeur. Par plusieurs fois, on demande au personnage incarné par Pearce des dollars particuliers, en dehors du pays. Vraisemblablement, la monnaie locale n'a plus grand intérêt, un peu comme si le Dollar s'était fait avoir par l'Euro aux USA (je caricature hein?). Avec ce contexte, The Rover ne s'impose donc pas comme un post-apo mais comme un film assez actuel malgré qu'on puisse le ranger dans l'anticipation. Un monde où les biens sont plus chers qu'il n'y paraît. Arrive donc le personnage de Guy Pearce. Il n'a pas de nom, la seule chose qu'on sait c'est qu'il tient particulièrement à sa voiture et quand on lui la pique, il se met tout de suite rattrappe les ravisseurs et se fait tabasser. Telle une machine, il repart tout de suite à sa recherche en prenant sous son aile le frère d'un des ravisseurs laissé par le groupe.
On passe donc d'une contextualisation de notre époque à une véritable chasse à l'homme se mélangeant à la quête existentielle. L'homme à la voiture fera un travail de rédemption, évoquant ses péchés sans vergogne et faisant de son jeune accolyte un associé légitime. Après tout, les deux sont paumés. L'un ne voit en une simple voiture son seul rapport à la réalité. L'autre un égaré de la vie découvrant une figure paternelle avec le premier capable de le mettre sur une voie plus adulte. Suivant principalement le duo, Michôd mise donc énormément sur Pearce et Pattinson et cela marche. Pearce est parfait en être méprisable et bestial, semblant systématiquement en rogne contre tout et d'une violence imprévisible (on pense à la scène de la caravane). Pour contrebalancer, Pattinson ne ressemble plus à un vampire (plus blanc comme un cachet donc) et trouve enfin grâce à mes yeux avec un rôle de naïf complètement éloigné de ses rôles précédents. Une révélation en soi. La réalisation de Michôd n'a pas besoin de beaucoup de musique sur ce film. Par exemple, il aurait pu mettre une musique pour la poursuite, mais il laisse faire parler les moteurs. Une séquence à suspense réussi en tout point. Le réalisateur se veut plus maîtrisé et y gagne peut être en efficacité. Une vraie révélation pour le cinéma australien confirmé par ce nouveau fait d'armes et permettant de voir qu'Animal Kingdom n'était pas qu'un coup de poker.
On était parti sur du post-apo, on finit avec une oeuvre violente et percutante sur l'importance absurde que l'on donne aux objets et avec un duo d'acteurs savoureux.
Note: 17/20