Julien Bouissoux n'est pas un débutant. Deux livres aux Editions du Rouerge, trois aux Editions de l'Olivier. Co-scénariste, en plus, du film Les grandes Ondes (à l'ouest) réalisé par Lionel Baier.
Son recueil de nouvelles cueille des personnages à un moment charnière. Des personnages plus tout jeunes, pas vieux non plus, disons autour de la quarantaine, vivant l'expérience d'une crise. Quelques résumés:
Dans la première histoire, un homme revient dans le village de son enfance. Il retrouve l'allée qui mène au stade et les vingt-deux arbres qu'il a plantés. C'était un travail d'intérêt public, infligé par les gendarmes après qu'il a été surpris à tirer au fusil sur des containers. Des gamins fument à l'entrée du stade. Il les aborde, leur offre des bières, finit par prendre un Glock dans le coffre de sa voiture, à le passer aux ados et à canarder un panneau de signalisation.
On ne sait pas qui est ce personnage, ce qu'il est devenu. On devine simplement quelque chose de trouble dans ses activités, dans sa manière de vivre, dans son revolver. Et cette revanche sur le passé. Il a un message mais il oublie de le dire aux gosses qu'il épate : « Mais on peut survivre à tout. J'aurais dû le leur dire avant de partir. L'essentiel, à partir d'aujourd'hui, c'est de savoir rester en vie. »
P
Tout ça serait complètement désespéré s'il n'y avait pas la dernière histoire. Un homme y hérite de la maison de son père mort. Il l'a détesté, lui et ses manies. Mais soudain, il décide de ne pas vendre, de s'installer avec sa famille, de créer un nouvel ordre dans cet endroit de contrainte. Un ordre de liberté, qui transforme le passé, le supprime, et crée de la joie là où il y avait de l'oppression.
La vie parfaite, suggère cette nouvelle, n'est peut-être pas seulement derrière, à côté, mais aussi devant, dans l'espoir de quelque chose qui adviendra. Peut-être.
Julien Bouissoux, Une autre vie parfaite, L'Age d'Homme