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Le handicap confisqué

Publié le 23 septembre 2014 par Harmonic777888 @phbarraque

façonnable face

C’est un sujet qu’on n’aborde jamais quand on parle du handicap physique en France: sa confiscation. Il y a quelques années, la situation était claire, il y avait des invalides de guerre qui bénéficiaient de certaines prérogatives et les invalides civils dont la grande partie étaient des polios, des accidentés de la route et des handicaps de naissance. Et puis, progressivement, les choses ont changé.

Peu à peu, la notion de handicap évolua en « situation de handicap » considérant que nombre de maladies reconnues comme « de longue durée » pouvaient bénéficier de ce statut. Ne sachant où caser les personnes séropositives, on leur fit bénéficier du statut d’handicapé. Dans le même temps, grâce au combat d’associations regroupant de longue date les handicapés moteurs et grâce aussi aux législations européennes sur l’accessibilité, les villes se mirent aux normes pour faciliter la mobilité des personnes en fauteuil, notamment. C’est ainsi que fleurirent des places de stationnement réservées aux  conducteurs handicapés ou à leurs accompagnants. Une aubaine pensez-vous ? Oui bien sûr, sauf que les personnes atteintes de pathologies reconnues comme handicapantes réclamèrent en masse le charmant petit macaron « handicapé » et squattèrent les places réservées. Anecdotique ? Oui, si l’on veut, mais révélatrice d’un état d’esprit. La crise économique aidant, nombre de personnes ayant une maladie plus ou moins invalidante n’eurent de cesse de se faire reconnaître comme handicapé, et par extension comme travailleur handicapé : un créneau comme un autre quand on ne trouve pas de travail, une facilité pour les entreprises de plus de vingt salariés qui veulent moins verser de contribution à l’Agefiph.

D’autres se dire que l’allocation adulte handicapé, c’était toujours ça de gagné quand on ne touche plus d’allocations chômage. Rappelons que les personnes handicapées se situent majoritairement en-dessous du seuil de pauvreté et que beaucoup ont un besoin vital de ces allocations pour maintenir leur autonomie. La brèche étant ouverte et la politique actuelle du pays prompte à encourager l’assistanat, d’autres encore s’y engouffrèrent arguant une hyperacousie, des bourdonnements d’oreilles ou une sensibilité aux champs électromagnétiques, très à la mode en ce moment. Et la personne en fauteuil roulant me direz-vous ? Elle regarde, parfois avec consternation, un conducteur prendre sa place de parking et sortir de son véhicule tout pimpant et sans aucun problème pour se déplacer. Sans doute est-il diabétique, avec un léger souffle au cœur, toujours est-il qu’il n’a besoin en aucune manière de se garer sur une place réservée.

Alors qu’il a fallu des années pour faire évoluer les mentalités, pour faire comprendre aux gens qu’une personne qui est en fauteuil (mais aussi non-voyante ou sourde), n’est pas obligatoirement une personne malade – qu’elle a simplement une déficience qu’elle a appris à gérer elle-même – l’image du handicap et de la maladie, de la « personne fragile », revient au galop comme s’il fallait rassurer l’opinion, la conforter dans ses vieilles résistances, ses vieux tabous. C’est en cela qu’il y a confiscation. Le handicap, c’est d’abord celui que la société impose à la personne qui a une déficience et non une bannière que l’on brandit avec écrit dessus : « moi aussi, j’y ai droit ! »

Philippe Barraqué, thérapeute, expert santé & bien-être

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