On peut penser ce qu’on voudra de la relation entre ces deux notions que sont l’individu et la société, à la fois irréductiblement complémentaires et opposées. Tantôt servant la cause du conservatisme, tantôt soulignant les frustrations, les insatisfactions existentielles que le mode d’organisation de la seconde impose au premier. Mais le fait est que ces tensions sont, au moins potentiellement, riches d’espoir en des changements permettant précisément la place des êtres humains dans la société dans laquelle ils vivent. La relation individu/société est donc travaillée de l’intérieur au-delà de sa positivité par des forces et des contradictions qui militent au dépassement de ce qui est.
Rien de tel, semble-t-il, à attendre du rapport de l’individu au travail, dans sa dimension d’emploi salarié. Les nouvelles règles qui vont encadrer le chômeur sont à cet égard révélatrices d’une vision de l’être humain qui le réduit au rôle d’un rouage interchangeable et passif dans un système économique tout puissant qui le formate à ses seuls besoins.
Un texte récent propose une analyse de cette future disposition en clarifiant sa philosophie et, sur ses propres bases, en propose une lecture alternative, qui subvertit entièrement sa perspective de contrôle et de sanction pour lui en substituer une autre, plus respectueuse d’une vision citoyenne de l’être humain
au travail.
A la lecture de ce texte, on appréciera la différence qu’il y a entre une logique qui, coûte que coûte ne veut entendre que l’adaptation de l’individu à l’organisation sociale existante, avec ses contraintes et ses inégalités criantes, et une autre, plus soucieuse d’équilibres et de contreparties.
L’ironie est que la seconde se construit sur le même matériau à partir duquel est conçu la première, mais la différence dans le choix de ses priorités, pour traiter le même problème, lui apporte un mode de résolution différent. L’un est exécrable et transforme les individus en objet d’un destin qu’ils n’ont pas choisi, à la manière de bagnards ; l’autre, redonne prise à chacun et à tous sur leur destin, met en avant un rapport critique à l’emploi et questionne l’acceptabilité des postes de travail proposés avant d’accuser de paresse les personnes qui refusent de les occuper. Dans le premier cas, on est confronté à une société machine, dans le second à une société politique.
On est toujours surpris de constater que certains êtres humains œuvrent activement et avec quelle énergie à rendre le monde encore un peu plus inhabitable pour la plupart de leurs congénères. C’est sans doute une variante de ce qu’on appelle : la " banalité du mal ".
La référence du texte est ici.
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