Niché en plein cœur du pays basque espagnol, le musée Guggenheim de Bilbao mérite largement le détour et la visite.
On reste coi en arrivant sur le parvis situé au-dessus de l’entrée principale du musée, on y découvre Puppy de Jeff Koons, grand édifice de fleurs représentant un chien. Les couleurs, la précision des formes plongent le visiteur dans une ambiance de démesure et de modernité.
Puffy de Jeff Koons
Le bâtiment du musée apparait en entier quelques mètres après Puppy, et c’est bel et bien une attraction à lui seul. Que dire de ces formes polygonales recouvertes de titane qui font penser à des écailles de poisson ? C’est d’une beauté et d’une originalité sans égal. La pierre et le verre complètent les matériaux de construction et l’ensemble semble avoir toujours fait partie du décor de cette ville particulièrement iconoclaste qu’est Bilbao.
Nous avons commencé notre visite par l’étage consacré à Yoko Ono. Dans mon esprit et comme dans celui de beaucoup de gens j’avais associé son nom à celui de John Lennon. Je concède volontiers aujourd’hui que c’était une erreur car son œuvre existe largement au-delà de l’apport avéré de l’ex-Beatles. Contrairement à d’autres arts plus passifs, l’art conceptuel de Yoko Ono requiert une participation du visiteur. L’arbre à souhaits (« the wish tree ») en est la parfaite illustration, chacun est invité à écrire un vœu sur un bout de papier et à l’accrocher à l’arbre avec une ficelle. Les branches de l’arbre portent donc les souhaits de centaines de personnes différentes et la place finira tôt ou tard par faire défaut, ce qui implique que tous les vœux ne pourront pas être exhaussés, l’espace au sens physique est un déterminisme que l’on ne peut pas contourner. La matière prend le pas sur le spirituel, il n’y aura pas de place pour tout le monde, c’est d’un pragmatisme froid, cruel.
On découvre dans les autres salles une Yoko Ono multi-facettes, tour à tour chanteuse, performeuse, comédienne et on plonge littéralement dans un univers complètement décalé et osé.
Nous avons ensuite enchainé avec l’immense Georges Braque. Tour à tour peintre et sculpteur, il a pris part activement au fauvisme, a inventé le cubisme, la technique du papier collé, a donné un nouvel élan aux natures mortes et a su figer le vol des oiseaux pour l’éternité, rien moins que cela ! Paradoxalement, ce qui m’a le plus marqué dans ce qui est présenté de son œuvre concerne la scénographie du ballet « les fâcheux », c’est une sorte d’immense croquis en 3D qui occupe une grande partie de la salle. La mise en abyme de la scène au milieu de ce sublime musée incite au recueillement et au relâchement.
Nous sommes passés ensuite au rez-de-chaussée et avons poursuivi notre « voyage » par la « Matière du Temps » de Richard Serra. Le terme « voyage » convient tout à fait à l’expérience extraordinaire que nous avons vécue en traversant les ellipses et les spirales en fer forgé. Au début, on marche, on marche et au bout d’un moment la perte de repères visuels vous entraîne dans une énigme : où nous trouvons-nous par rapport à l’entrée de l’édifice ? La sortie est-elle proche ? C’est grisant et angoissant à la fois, on a vraiment le sentiment de faire partie d’un songe. Si l’on se laisse aller à la méditation le flot de pensées arrive très vite et très fort comme en voiture sur l’autoroute où l’on peut rêver tout en conduisant et revenir au réel d’un coup en ayant oublié totalement les kilomètres parcourus.
Nous avons fini comme nous avions commencé, c’est-à-dire en compagnie de Jeff Koons et ses magnifiques tulipes. Elles sont déposées sur la terrasse extérieure et l’effet phosphorescent des couleurs provoque un goût acidulé dans nos papilles gustatives, cela est certainement dû à l’association que fait notre cerveau avec les couleurs, la matière et le goût. C’est à croquer en tous cas !
En conclusion, un musée surprenant à tout point de vue : l’architecture du bâtiment, le choix des collections, le mélange des genres. Une belle parenthèse qui pousse le visiteur à réfléchir une fois dehors et à se poser inlassablement une question : mais quel est donc le point commun entre Jeff Koons, Georges Braque, Yoko Ono et Richard Serra ?
J’ai mon idée sur la réponse mais je vous laisse d’abord me donner votre point de vue …