"Cigogne noire à droite". Equipés de longue-vues et de jumelles, quinze Britanniques se sont postés au bord de la Biebrza, une petite rivière, pour voir des espèces rares qui vivent encore assez nombreuses dans
"Combattant varié, plus au fond, mais c'est une femelle", ajoute Stuart Meredith, le guide anglais du groupe constitué de retraités qui peinent à contenir leur émotion.
"La Pologne est en Europe mon endroit préféré pour observer les oiseaux, on peut y voir des espèces qui ne vivent plus en Grande-Bretagne ou y sont très rares", souligne-t-il.
Stuart Meredith a fait de sa passion un gagne-pain et organise des voyages à travers le monde pour les ornithologues amateurs.
"En Grande-Bretagne où il y a très peu de forêts, on ne rencontre plus que deux espèces de pics, contre dix en Pologne", précise le guide polonais Andrzej Petryna.
"A l'époque communiste, ce tourisme aurait été impossible. Les communistes avaient une obsession des espions. Un homme avec des jumelles, un étranger en plus, était forcément suspect, surtout près de la frontière avec l'URSS", explique-t-il.
La cinquième journée du voyage à travers trois parcs nationaux a été fructueuse. Les "birdwatchers", comme on les nomme en Grande-Bretagne, ont déjà vu quelque 140 espèces des 172 qu'ils espèrent voir lors de leur semaine en Pologne.
Chaque soir après le dîner, tous les membres du groupe cochent sur leur liste les espèces déjà vues: grèbe à cou noir, grèbe jougris, pygargue à queue blanche, grues cendrées et enfin le fameux phragmite aquatique, un des passereaux les plus rares d'Europe.
"10% à 15% de la population mondiale de ces petits oiseaux, qui compte entre 12.000 et 20.000 individus, vivent dans le Parc national de Biebrza", souligne Tadeusz Sidor vice-directeur de ce plus grand parc naturel du pays qui s'étend sur 59.223 hectares.
Cet oiseau minuscule d'à peine 12 centimètres, surnommé "séducteur de marais", a pratiquement disparu en Europe occidentale où la majorité des marécages ont été asséchés.
"Il y a 40 ans, les autorités ont tenté d'assécher les marécages mais notre rivière s'est avérée trop difficile à maîtriser, heureusement pour les oiseaux", dit Witold Konopka, un paysan dont les terres s'étendent des deux côtés de la rivière.
De sa prairie, la vue est splendide. L'accès y coûte 2 zlotys (0,60 EUR) par personne. En saison, plusieurs mini-bus avec des touristes étrangers s'arrêtent chaque jour chez lui. Il y a aménagé un mirador pour mieux voir les oiseaux. Sa femme sert le café aux touristes à 3 zlotys la tasse, ce qui arrondit leurs fins de mois.
En été, quand le niveau de l'eau aura baissé, ses 12 vaches iront de l'autre côté de la rivière, sur les pâturages. Il les fauche à la main, un peu par tradition mais surtout pour obtenir des subventions du parc, 1.100 zlotys (290 EUR) par hectare.
"Pour préserver les marécages, un lieu vital pour les oiseaux, il est nécessaire de les faucher en fin d'été", explique Sidor. Avec l'argent européen des programmes Life et Natura 2000, le parc rachète des prairies aux fermiers et paie pour leur fauchage.
Maja CZARNECKA
AFP