Critique du Dîner de cons, vu le 6 septembre 2014 au Théâtre de la Michodière
Avec Patrick Haudecoeur, José Paul, Grégoire Bonnet, Patrick Zard’, Florence Mary, Anne-Sophier Germanaz, et Stéphane Cottin
Bien que ce soit le film qui est tiré de la pièce de théâtre, il est pour moi plus culte que la pièce elle-même, et je trouve difficile et audacieux de reprendre des rôles marqués par Villeret et Lhermitte. D’ailleurs dans la salle, il n’y a que des connaisseurs : entre ceux qui rigolent avant les blagues, ceux qui rappellent à leurs voisins la suite de l’histoire, et ceux qui chuchottent "C’était mieux fait dans le film !", les novices comme moi qui sont loin de le connaître par coeur ont dû avoir du mal à apprécier la pièce à sa juste valeur. Cependant, les deux acteurs principaux s’en sortent plus qu’honorablement et nous permettent de passer tout de même une bonne soirée.
Rappelons brièvement le propos de la pièce : nous entrons chez Pierre Brochant, discutant avec sa femme au début de la pièce, et à qui il raconte qu’il s’est fait un tour de rein dans l’après-midi, ce qui ne l’empêchera cependant pas d’aller à son dîner du soir. Ce dîner, c’est tout ce que sa femme n’aime pas chez lui, car il souligne son mépris pour les autres, et sa bêtise. Le but ? Chaque invité amène un con, et plus il est grandiose dans sa connerie, plus l’invité a des chances de gagner. Ce soir là, Pierre Brochant a déniché le gros lot : François Pignon, employé du ministère des finances, et passionné par ses maquettes en allumettes. Seulement voilà, avec ce tour de rein, difficile de se rendre à son dîner… Incapable de bouger, ce sera donc le con qui viendra à Brochant, et qui lui fera passer une soirée mémorable, ponctuée de gaffe créant inévitablement des comiques de situation à n’en plus finir !
Le con, c’est Patrick Haudecoeur, récemment à l’affiche de la pièce à succès Thé à la Menthe ou Thé Citron. Il reprend le rôle associé à Villeret avec une certaine justesse, peut-être avec un peu moins d’ahurissement mais touchant dans sa bêtise et son désir de bien faire, et, il faut le dire, provoquant aisément les rires dans la salle. Il forme avec José Paul, qui joue Pierre Brochant, un duo fonctionnant à merveille, jouant réellement ensemble, et se tendant constamment de belles perches qui entraînent des moments comiques très réussis. Mais, pour moi qui connaît bien José Paul pour le suivre depuis quelques années, j’ai quand même une pointe de déception vis-à-vis de son jeu, qui à mon avis aurait pu être encore plus poussé pour déclencher le rire. José Paul a un talent comique indéniable, mais c’est à croire qu’ici, il conquiert si vite la salle qu’il se repose sur cet acquis et ne semble pas donner tout ce qu’il pourrait pour porter son Brochant au sommet du rire. Dommage, car si j’apprécie beaucoup José Paul, je ne lui en demande pas moins de se transcender sur scène. Il fait du José Paul, et ça, on connaît.
Le reste de la troupe sert très bien le texte, sans non plus permettre des envolées comiques inoubliables. On retient tout particulièrement le très bon Grégoire Bonnet, qui incarne Cheval, un ami de François Pignon, contrôleur fiscal de son état. Très nerveux, agité de tics en tous genres, il crée le rire même hors de ses morceaux de textes purement comiques. La mise en scène est sobre et classique, le décor permettant de conversations téléphoniques ingénieuses et ajoutant un nouveau degré comique à cette pièce déjà bien ancrée dans le genre.
Une bonne soirée assurée au Théâtre de la Michodière, qui reprend avec justesse un classique du cinéma français. ♥ ♥