Le Mouvement des Entreprises de France est visiblement fâché avec l’Histoire. Il ignore que, dès la fin du XVIII° siècle, s’est produite la Révolution industrielle suite à la mécanisation. Le génie humain a conçu des machines qui ont progressivement réalisé des tâches de plus en plus nombreuses jusque-là effectuées par la main de l’homme. Les entrepreneurs ont accueilli avec faveur ces machines : à la différence des humains, elles ne coûtaient rien en l’absence de travail, elles ne faisaient jamais grève et, lorsqu’elles étaient devenues inutiles, on pouvait les mettre au rebut sans autre forme de procès. Ainsi, la pelle mécanique a détrôné la pioche et on a constaté qu’un seul camion pouvait avantageusement remplacer soixante manœuvres équipés de brouettes. Puis est arrivée l’automatisation. Malgré l’invention de nouveaux produits, l’augmentation de la population et la croissance de la production, la somme de travail nécessaire pour assurer cette même production n’a cessé de diminuer. Il est donc naturel que ceux qui ont permis cette réduction en aient recueilli les fruits et aient vu diminuer leur temps de travail. Les enfants n’ont plus été obligés de travailler dès leur jeune âge,les journées de 10-12 heures ont disparu, tout comme les semaines de 6-7 jours, tandis qu’enfin apparaissaient les congés payés.
Je donne maintenant un exemple encore plus saisissant de ce que permet l’évolution de la technologie. Au début de ma carrière dans l’informatique, il y a quarante ans, une unité de disquemagnétique avait l’apparence d’une machine à laver le linge. Elle permettait de stocker cent millions d’octets et était louée mille cinq cents euros par mois. De nos jours, une clé USB a, comme son nom l’indique, la taille d’une clé. Elle peut contenir seize giga-octets, soit cent soixante fois plus, et coûte à l’achat aux environs de dix euros, quand elle n’est pas offerte en cadeau pour un achat de consommables. En outre, ses performances en temps d’accès sont sans commune mesure avec celles de son ancêtre. Il existe bien sûr des secteurs où la main-d’œuvre conserve une part significative dans le prix. Mais prétendre ex abrupto comme le font ces entrepreneurs que c’est un coût du travail trop élevé qui freine la diffusion des produits français est inexact, pour ne pas dire mensonger. Ce qui est certain, c’est que la productivité s’est constamment améliorée, qu’elle progresse encore et qu’elle fait diminuer le temps de travail nécessaire à la réalisation de nos biens et services. Il est donc parfaitement rétrograde de s’en prendre aux jours fériés ou aux dimanches. Un dessin de Tignous dans Marianne de cette semaine caricature, à peine, la position du Medef : « Ils sont fous au Medef, ils veulent nous faire bosser le dimanche et, en semaine, ils ferment nos usines ».
En fait, leur rêve est très simple. Il existe une solution pour réduire le coût du travail, c’est l’esclavage. D’ailleurs, on a déjà essayé et … ça marche.