Charles Eloy
Les organisateurs du grand marché annuel d’Anderlecht ont été bien inspirés en invitant des groupes qui recréent l’esprit convivial des fêtes populaires dans les villes et villages.
En première partie de la soirée, nous retrouvons TELAMURE, un groupe de musiciens italiens polyinstrumentistes qui reprend les chansons traditionnelles , essentiellement du répertoire de la TARENTELLA, une forme musicale provenant du sud de l’Italie, héritée des rites dionysiaques de la mythologie grecque et le culte des dieux antiques.
Afin de ne pas traumatiser les arachnophobes, les musiciens ont pris mille précautions afin de pas emporter dans leurs bagages, une tarentelle, araignée dont la morsure peut provoquer des perturbations psychologiques significatives. Selon les traditions , anciennes de plus 20 siècles et encore vivantes à ce jour et transmises oralement de génération en génération, la guérison est assurée par la danse.
La guitare, les percussions, la clarinette, les accordéons, les chants polyphoniques nous enivrent durant le concert. Nous profitons des qualités thérapeutiques de la musique et de la danse entraînante accompagnante. Le rythme est généralement en 6/8. Je vous conseille de ne pas prendre la mesure de ¾ de la valse musette, de multiplier par deux, et puis d’essayer de danser sur le résultat du calcul. Le morceau «Pizzila di Ostuni » d’un rythme effréné et endiablé fait danser la plupart des personnes selon leur inspiration (tarentelle, dancehall, ragga, grunge , reggaeton ou quelques pas à gauche et à droite)
Quelques morceaux de leur répertoire : Riturnella, Tarantella di Misuraca, Pizzica di Cisternino.
A la fin du concert, les musiciens au-devant de la scène et une jongleuse - dans la nuit qui commence à tomber, fascinante comme une déesse du feu, faisant virevolter des boules et des torches de feu - nous offrent une soirée inoubliable.
Suit une pause où j’ai dégusté une bière locale au stamenee ( bistrot) du coin et écouté quelques zievereirs (déconneurs) sympathiques collés au comptoir.
La présentatrice annonce que le groupe «
Fanfara Tirana meets Transglobal Underground » remplace Lady Gaga qui était prévue au programme.
J’apprécie l’humour de la présentatrice. Je crois que la robe en viande de bœuf de 15 kilos que portait Lady Gaga lors de MTV Video Music à Los Angeles en 2010 ne convienne pas à ce genre d’ événement. En Belgique, nous avons la foire de Libramont pour décerner les médailles. Un choeur de vaches avec quelques vedettes de la chanson comme membres du jury de la VAR (Vaches Academy Rewards), c’est à quand? Sans être végétarien, je trouve que cela serait plus sympa pour les vaches.
« Fanfara Tirana meets Transglobal Underground » n’a nullement besoin d’une image excentrique afin de véhiculer leur musique. Un avis personnel,Sheema, la musicienne à la sitar et la base électrique et également aux chants, habillée d’une robe blanche avec des motifs possède un charisme et une beauté naturelle avec une touche d’exotisme.
Les musiciens (Tim Whelan, Rav, Hami , TUUP) se mettent en place. Durant le premier morceau, le groupe Transglobal Underground joue des sonorités orientales/indiennes avec percussions (congas, dhols, tablas, darbouka) sur fond de drum 'n bass.
Ensuite les onze musiciens réunissant Fanfara Tirana et Transglobal Underground se retrouvent sur scène. C’ est la rencontre transfrontalière et interculturelle entre les maestros albanais des instruments « cuivre » et les éclectiques anglais du collectif Transglobal Underground.
L’ambiance survoltante, initiée par le groupe italien Telamure continue, mais maintenant avec des couleurs musicales qui nous font voyager en Inde, dans les Caraïbes et autres horizons.
Il y en pour tous les goûts avec les chansons tirées de leur album « Kabatronics ». Des influences turques, grecques, gitanes et musiques du Balkan de Fanfara Tirna fusionnées avec la musique de fusion beat et asian dub de Transglobal Underground sont un laboratoire musical, sans que les musiciens avant-gardistes ne se prennent la tête. Je range parfois mon appareil photo afin de pouvoir participer à cette ivresse collective.
La recette du morceau « Baklava Revenge » est une réussite. Il me semble que ce sont des rythmes apparentés au style çiftetelli sur quels un groupe de dames danse en rangée, à la grecque.
Quelques spectateurs sont enveloppés de drapeaux albanais. Je les comprends. L’un de chanteurs du groupe est la star du chant traditionnel Hysni Niko Zela chantant « Weeping willow tree » en duo avec TUUP, le slammer et chanteur de Transglobal Underground. L’effet de transe de la chanson est renforcé par le jeu subtil de la clarinette.
Le titre « No guns to the wedding » (pas de fusils au mariage) chanté par le chanteur-slammeur TUUP nous rappelle que Fanfara Tirana est composé d’ ex-membres de la fanfare militaire albanaise reconvertis dans le civil et souvent sollicités lors de célébration de mariages.
Ce soir, les deux groupes, Telamure et Fanfara Tirana meets Transgloblal Underground nous ont replongés dans l’ambiance conviviale de jadis. Pas de nostalgie, le futur est devant nous.