La où Philippe II d'Espagne et son Invincible Armada, Napoléon au camp de Boulogne et Hitler ont échoué, un homme a réussi, voici près de 1000 ans, à conquérir l'Angleterre : Guillaume, duc de Normandie, en 1066 a su débarquer et soumettre tout un royaume. En quelque sorte, une opération Overlord à l'envers, et la comparaison est tout à fait pertinente.
Guillaume de Normandie est un puissant seigneur, à la tête d'un fief riche et important. Malgré sa qualité de bâtard, il descend en ligne directe de Rollon (mort en 927), 1er duc de Normandie. Et son épopée découle d'une querelle dynastique, provoquée par le fait que le roi d'Angleterre, Edouard le Confesseur (est-ce pour cette attitude qu'il n'a aucune descendance car on dit qu'il n'aurait jamais consommé son mariage avec Edith de Wessex ?) l'a désigné pour successeur dans un premier temps, puis, à l'article de la mort, aurait changé d'avis et aurait désigné Harold, son beau-frère, fils de Godwine, comte de Wessex, qui exerce de fait le pouvoir en Angleterre depuis de nombreuses années.
Au décès d'Edouard, Harold se dépêche de se faire reconnaître par les grand seigneurs du royaume et couronner roi d'Angleterre, alors qu'il avait juré sur des reliques qu'il s'negagereait à appuyer la candidature de Guilllaume …
C'est en tous cas la thèse largement répandue par la broderie de Bayeux …
Que s'est-il passé en réalité ? Pierre Bouet, universitaire à Caen, est LE spécialiste de cette période. Dans ce bref ouvrage, il nous explique clairement, simplement, comment le duc Guillaume, fameux organisateur, tacticien hors pair et chef de guerre courageux a réussi à faire prévaloir son point de vue et conquérir un pays organisé, de haute lutte, dans des conditions difficiles … Un pari finalement payant mais pas gagné d'avance !
Dès l'annonce du décès d'Edouard le Confesseur, Guillaume de Normandie réunit une armée de volontaires – le servie d'ost ne peut excéder 40 jours – qui réunit des chevaliers et des fantassins provenant de diverses régions : des Normands qui pnt combattu en Sicile, en Calabre et en Apulie, des seigneurs de Flandre (le pays de son épouse Mathilde), de Bretagne, des Bourgignons, des Anjevins, du royaume de France … etc. L'armée est concentrée à Dives au début de l'été 1066. Il faut réunir de 3000 à 5000 chevaux aptes au combat, construire et armer 1000 navires – des navires légers à faible tirant d'eau, dépourvus de quille permettant, d'aborder directement la plage. Chaque seigneur s'engage à fournir tant de drakkars, tant de combattants … La coordination des travaux est confiée à Guillaume Fitz Osbern, les demi-frères de Guillaume, l'évêque Odon de Bayeux et Robert de Mortain participent étroitement. Il faudra abattre 6000 à 7000 arbres pour construire la flotte.
Ce qui n'empêche pas une intense activité diplomatique : Guillaume s'attache l'approbation du pape qui lui envoit une bannière. Mais il a aussi un concurrent, le roi Harald de Norvège … qui lui aussi a des titres à la succession d'Edouard.
Guillaume est un redoutable tacticien. Il concentre son armée et attend … Il en a les moyens financiers : il faut en effet chaque jour fournir 30 tonnes de blé, 20 d'avoine ou d'orge, 15 de foin, 5 de paille, 100000 litres d'eau ppour les chevaux, 70000 pour les chevaux, 35 hl de vin, des tonnes de fer pour le ferrage des chevaux …
En face, Harold se prépare. Mais il n'a pas les ressources suffisantes, au bout d'un certain temps, il sera contraint de licencier une partie des ses troupes. Guillaume joue la montre. Guillaume fait croire qu'il va débarquer à Wight … Les espions pullulent des deux côtés de la Manche.
Pendant ce temps, le roi de Norvège, allié au frère d'Harold Tostig, débarque à côté d'York. Harold se porte à sa rencontre et le bat à plates coutures pendant que Guillaume débarque sans encombre sur la côté sud, à Pevensey, avant de se fortifier à Hastings. L'affrontement final aura lieu sur la butte de Senlac le 14 octobre. La bataille est un carnage, elle dure toute la journée et reste incertaine jusqu'à la mort d'Harold et de ses deux frères.
Guillaume a vaillamment combattu, trois chevaux ont été tués sous lui … Il l'emporte et sera couronné le 25 décembre 1066 roi d'Angleterre. Une nouvelle époque commence …
Après un voyage éclair en Normandie et la visite de la « Tapisserie » de Bayeux, un ouvrage indispensable et particulièrent clair sur les hommes de ce temps, tellement comparables à ceux d'aujourd'hui …
Hastings, 14 octobre 1066 par Pierre Bouet, chez Tallandier, collection Le goût de l'histoire, 190 p. 8€