Je vous retrouve une nouvelle fois autour du thème de la mythologie, mais avec un livre un peu différent cette fois puisqu’il s’agit d’une pièce de théâtre ! De plus, il n’est pas question d’Œdipe ni d’Antigone cette fois, mais de la guerre de Troie et de ses personnages : Andromaque, Hector, Pâris et évidemment, Hélène ! C’est promis, la prochaine chronique ne traitera pas de mythologie, mais attendez-vous à en revoir sur le blog ;-)
- Ménélas est le roi de Sparte et l’époux d’Hélène
- Pâris, Hector et Cassandre sont frères et sœurs, leurs parents sont Priam et Hécube
- Priam est le roi de Troie
- Hector est marié à Andromaque, celle-ci est enceinte de leur fils Astyanax.
Dans ce livre, Giraudoux observe et imagine la façon dont chaque personnage réagit face à une menace de guerre. En écrivant une pièce de théâtre et pas un roman, il met ainsi les paroles des personnages au centre du récit, et donc leurs pensées et leurs émotions. A première vue, on peut donc penser que, en mettant en scène ces personnalités mythiques dans un contexte aussi tragique que celui de la menace imminente d’une guerre, Giraudoux nous a concocté une tragédie digne de ce nom dans laquelle les passions des personnages et leurs sentiments les plus nobles seront décrits de manière très lyrique et poétique (un peu comme dans une pièce de Racine). Et bien pas du tout !
La première chose qui surprend dans ce livre est le ton absurde qui est employé par Giraudoux et l’ambiance comique et loufoque de la pièce en général. Cela est du en premier lieu aux personnages et à leur caractère.En effet, les personnages sont complètement caricaturés, Giraudoux semble leur avoir attribué un seul trait de caractère : celui pour lequel ils sont mythiques. Hélène se résume ainsi uniquement à sa beauté, les troyens crient d’ailleurs « Vive la Beauté » (acte 1, scène 4) lorsqu’ils la voient passer, la réduisant ainsi complètement à son apparence ! Elle n’a d’ailleurs pas l’air d’avoir de caractère du tout, comme le montre la scène 8 de l’acte 1 : Hector parvient à la manipuler sans problème et à lui faire dire ce qu’il veut !Andromaque est quant à elle une mère-épouse et représente avec Hector, le guerrier invincible et directif, le « couple parfait ». Hélène dira même que « s’il suffit d’un couple parfait pour vous faire admettre la guerre, il y a toujours le vôtre, Andromaque. » (fin de la scène 8 de l’acte 2).Les personnages de Giraudoux sont donc beaucoup plus comiques que tragiques ! En les caricaturant, le dramaturge se moque d’eux et les rend ridicule. Il semble ainsi nous rappeler qu’il écrit à propos de personnages qui ne sont pas encore entrés dans la légende : avant d’être mythiques ils peuvent être aussi ridicules que de simples mortels.→ MON AVIS
Comme pour Œdipe sur la route, j’ai beaucoup aimé découvrir « un moment parallèle » à l’histoire d’un mythe, ici la période juste avant la guerre. Encore une fois, je trouve que cela permet à l’auteur d’adopter un point de vue très original, et qu’il peut vraiment être créatif et imaginatif. L’originalité de la pièce m’a d’ailleurs tellement emballée que je l’ai lue d’une traite (je précise quand même qu’il s’agit d’une pièce très courte puisqu’elle commence à la page 50 et se termine à la page 160 !).
J’ai tout de suite adoré le point de vue hyper original choisi par Giraudoux, le dynamisme et le rythme qu’il donnait à la pièce. En seulement deux actes, le dramaturge a réussi à inventer des dialogues excellents, piquants et drôles, des personnages ridicules mais singuliers et des scènes qu’on n’aurait jamais pensé pouvoir trouver dans une pièce à propos de la guerre de Troie ! Ce livre est un recueil de petites pépites et de phrases cultes « L’eau sur le canard marque mieux que la souillure sur la femme », « Le visage d’un roi que pince un crabe n’a jamais exprimé la béatitude », etc. En bref, on est assuré de passer un moment génial en lisant cette pièce.C’est donc, selon moi, une pièce très originale et très moderne que nous propose Giraudoux. L’empreinte « trop classique » qui peut freiner certains lecteurs ou les ennuyer n’est pas du tout présente ici, c’est un livre parfait pour lire plus de classiques ou se lancer dans du théâtre ! Je le conseille vraiment à tous ceux qui veulent lire une petite pièce épicée, dynamique tordante. Je trouve d’ailleurs que c’est une œuvre qui ressemble beaucoup à La Machine infernale de Cocteau (une autre pièce de théâtre géniale, moderne et surprenante autour des mythes – celui d’Œdipe, cette fois !) : si vous avez aimé l’une, vous aimerez forcément l’autre.Enfin, vous l’aurez peut-être deviné mais cette lecture est un vrai coup de cœur ! Je tournais autour de cette pièce depuis quelques années, et je me demande encore pourquoi je ne me suis pas lancée plus tôt. C’est pour moi une œuvre à découvrir de toute urgence, et vraiment une pièce qui pourrait faire aimer les classiques à ceux qui ont peur de s’ennuyer en les lisant ou de les trouver trop vieux. Vraiment, cette pièce se dévore en un rien de temps !Dites-moi : avez-vous déjà lu La Guerre de Troie n'aura pas lieu ou La Machine infernale ? Y a-t-il des pièces de théâtre ou des romans qui vous ont surpris et auxquels vous ne vous attendiez pas ? N'hésitez pas à me faire partager vos dernières découvertes théâtrales !
A bientôt !