Chacun d’entre nous saisit aujourd’hui l’importance de l’adoption d’un accord climatique ambitieux lors de la COP21 qui se tiendra à Paris l’an prochain. Les impacts négatifs du changement climatique sur la sécurité alimentaire et la sous-nutrition sont une réalité quotidienne pour beaucoup d’êtres humains. Les derniers rapports du GIEC confirment et alertent sur les conséquences déjà désastreuses du changement climatique pour des populations déjà fragilisées : chute des rendements agricoles, et de la potentiel nutrititif de certaines céréales, augmentation des risques sanitaires et de l’insécurité alimentaire.
Il freine chaque jour un peu plus les efforts mis en place pour lutter contre la faim alors même que 842 millions de personnes dans le monde sont sous-alimentées et 180 millions d’enfants sont victimes de sous-nutrition. Les projections les plus optimistes (+2°C à la surface du globe) prévoient que le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25% à 90% d’ici à 2050. Cette situation traduit un paradoxe insupportable : ceux qui contribuent le moins au réchauffement climatique sont ceux qui en souffrent le plus. Pire encore, une telle augmentation annulerait les progrès faits dans la lutte contre la malnutrition et ce même dans le scénario du réchauffement climatique le plus optimiste.
S’il y a bien urgence pour prendre des décisions ambitieuses et pour remettre l’intérêt des plus pauvres au sein des négociations, il ne faut pas pour autant que le climat devienne un alibi. Attention aux fausses solutions climat! Certains acteurs, notamment privés, mettent en avant des « solutions » qui, sans répondre sérieusement au défi climatique, pèsent sur les droits des populations locales et leur environnement et mettent en danger leur sécurité alimentaire et nutritionnelle.
La « Global Alliance for Climate-Smart Agriculture », qui sera lancée dans quelques jours, à l’occasion du Sommet et à laquelle la France risque hélas d’adhérer, illustre bien ce risque. Cette initiative qui vise soi-disant à allier toutes les initiatives de bonne volonté pour « être intelligents face au climat» fait une belle place aux plus grands acteurs de l’agro-business. Ces derniers s’engouffrent de plus en plus dans l’alibi climatique afin de présenter leurs produits (dont les OGM) comme intelligents face au climat. Pourtant, il existe bien une agriculture intelligente face au climat, c’est celle des petits agriculteurs qui ont parfois recours à des pratiques d’agro-écologie qui permettent d’une part d’assurer une production agricole substantielle tout en limitant les émissions.
Si les efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre doivent être renforcés afin de contenir le réchauffement, la mobilisation pour permettre aux populations de s’adapter et y faire face doit absolument se renforcer. Il est temps que des actions concrètes soient menées pour permettre aux plus fragiles d’entre nous de faire face dès aujourd’hui aux impacts du changement climatique.
Sur le terrain depuis plus de 35 ans et dans 45 pays différents, ACF est témoin des impacts directs du changement climatique sur les femmes, les hommes et les enfants dans les pays en développement.
Malgré l’urgence indéniable de la situation, la forte interconnexion et les preuves concrètes et convaincantes, la sécurité alimentaire et nutritionnelle demeurent de manière frappante totalement absente de l’agenda des négociations climat et des discussions qui portent sur la finance climat.
ACF appelle :
- Les acteurs de la nutrition et ceux impliqués sur le climat (chercheurs, ONG, agences onusiennes et bailleurs) à travailler ensemble et à se mobiliser plus fortement encore pour faire de la lutte contre la malnutrition un sujet fort des négociations climat.
- La France, présidente de la COP21 à faire en sorte que les enjeux liés à la sécurité alimentaire et nutritionnelle soient mis dans les négociations climat jusqu’à la COP21 et que des financements climat soient orientés vers ceux qui verront les taux de malnutrition augmenter à cause du changement climatique.
- Les pays du sud fortement affectés par la malnutrition, à se mobiliser pour faire entendre la voix des populations les plus fragiles.
- Les états, à faire barrage à certaines fausses solutions climat comme l’alliance intelligente face au climat qui sera lancée au sommet de Ban Ki Moon le 23 septembre. Les grandes entreprises internationales ne peuvent se saisir de l’alibi climatique pour proposer des solutions non durables et néfastes aux plus pauvres d’entre nous ?
Ainsi, ACF appelle à participer à la Marche pour le Climat, le 21 septembre 2014 et appelle ses sympathisants à marquer leur soutien à la cause climat en rejoignant la marche.