Avec Médine l'Humanité n'était pas à la fête

Je ne suis pas allé à la fête de l'Huma. J'avais deux raisons pour cela. L'une politique et l'autre intellectuelle et les deux sans faux fuyant...
La raison politique ne se situe pas dans une opposition aux thèmes développés et positions prises tant par le PCF et le Front de Gauche sur la politique gouvernementale. Bien au contraire tant je partage la conviction que nous allons droit au mur si Valls persiste dans sa ligne libérale. La dernière promesse non tenue sur les petites pensions me font augurer le pire. Et sur le champ de ruine je pense qu'il va falloir au plus vite reconstruire. La raison est ailleurs. Elle trouve son expression dans une sorte de confusion qui me fait rager. Confusions avec la présence du trader Kerviel dont le statut est érigé au niveau de celui d'un héros du monde du travail, de ce monde pressuré, exploité. Qu'il y ait d'autres responsabilités dans l'affaire de la Société Générale c'est un fait acquis et assurément la justice à esquivé la question en chargeant le trader. Mais si la patrouille n'était pas venue le stopper notre Kerviel aurait persisté dans ses agissements et pratiques bancaires qui sont bien éloignées de tous les combats sociaux que nous pouvons porter. Ce type n'a jamais eu une quelconque compassion pour le " petit " peuple dans ses agissements de rapace de la haute finance, dont il savourait avec complaisance les primes accordées et correspondantes aux bénéfices que ses jeux et manipulations rapportaient à la banque qui s'écartait de son métier en instaurant des pratiques de casino. J'ai du mal à lui coller l'étiquette de l'homme accablé et contraint par un patron oppresseur. Je suis peut-être revêtu de vieux oripeaux marxistes - c'est l'objet des railleries à mon endroit par les socialistes - mais j'appelle un chat un chat etKerviel était programmé pour griffer.
La seconde raison toute aussi politique c'est le choix de la programmation de ce rappeur proche de Dieudonné: Médine, qui n'hésite pas à publier sur son mur une photo de lui faisant le tristement fameux signe de la quenelle devant une réplique du mur de séparation de Bethléem. Un rappeur proche du sinistre " penseur " fasciste Alain Soral et qui déballe sur scène des chansons aux paroles racistes, haineuses et meurtrières... à la Fête de l'Humanité c'est impensable. Pensez à ces discours de Jaurès et vous comprendrez qu'il y a des grands écarts qui sont difficile à imaginer. Et si ce n'est pas le cas il y a beaucoup de bouillie et il faut vite réouvrir les écoles de formation des militants. Parcequ'il y a danger sur un engagement politique à inviter un tel individu. Quel engagement demain sur les " valeurs " prétendues d'égalité, de vivre ensemble et de lutte contre le racisme et contre l'extrême droite. 
Ce qui est à craindre le plus, c'est que la présence de ce rappeur soit un choix affirmé et soutenu des organisateurs, du PCF. Et là, il y a danger. Qu'un rappeur qui attise la haine plus qu'il ne la condamne arrive à montrer sur la scène d'un concert contre le racisme en dit long sur l'engagement et les fameuses "valeurs" prétendues d'égalité, de vivre ensemble et de lutte contre l’extrême droite. 
Il va falloir arrêter de tenir un double discours : l'un en direction de la République, l'autre en direction d'un communautarisme ethnique, voire religieux.

Un peu de cohérence, dans ces moments de confusionnisme, ne ferait de mal à personne et pour clarifier mes propos et lutter contre la myopie je vous donne à lire les paroles d'une chanson entonnée par Medine ce week-end. Son devoir, son mein kampf ou son jihad comme il en arbore avec fierté et arrogance le symbole sur son tee-shirt.... Ou est l'Humanité de Jean Jaurès?
« Ces porcs blancs vont loin, passe moi une arme de poing, j’vais faire un pédophile de moins »
« Je hais les Blancs depuis Rodney King, j’ai besoin d’ une carabine »
« Les Blancs sont des démons, des cochons d’aucune moralité »
« On n’a pas la même peau, chacun pour sa peau »
« Ces incestueux nous ont barricadés »
« Les blancs des consanguins »
C'est édifiant. Et ce qui est plus édifiant c'est la connerie de l'avoir écouté sans manifester une violente réprobation. Inversez blanc et noir et vous foutez à juste raison des milliers et milliers de manifestants dans la rue. Ces expressions racistes sont inadmissibles et notre société aujourd'hui ose laisser libre propos aux salauds qui insultent Taubira ou Najat Belacem tout comme aux salauds qui exultent leur haine du blanc.
Marxiste ou humaniste je crois encore qu'un barrage contre ces haines est encore possible à édifier...
Et la dernière raison, intellectuelle celle-là, se trouvait à Vincennes ou se déroulait ce grandissime rendez-vous du livre, de la lecture, de l'intelligence avec le Festival America. Littératures et cultures du nord au rendez-vous. Je me suis régalé des documentaires d'Andre Gladu comme " Mitchif, l'esprit de Réel et Dumont " exprimant la résistance des forces métisses aux troupes anglaises. Je me suis instruit sur " Le Grand Dérangement " c'est à dire sur la déportation et la mort de milliers d'Acadiens entre 1755 et 1763... J'ai parcouru les stands offrant la richesse littéraire d'un continent où aucun sujet n'échappe aux écrivains. Une littérature diverse dans ses origines, toujours sociologique dans ses approches et sans confusion à entretenir. C'est un chaudron de liberté et j'ai rencontré mes amis amérindiens, cajuns, blacks de Louisiane avec " ligne de fracture " de Jesmyn Ward, petits blancs resurgis de Faulkner ou Caldwell, misères des ghettos et des banlieues, francophones du Quebec et déracinés de Louisiane, sinistrés d'Haïti,... rencontre aussi avec la francophonie et le Québec qui aujourd'hui est le premier lieu d'édition pour nos amis africains d'expression française. Toute l'Afrique comme la Caraïbe converge sur la belle Province... on est loin de la haine du médiocre rappeur de la fête de l'Humanité.

j'ai respiré un air d'intelligence tout ce week-end et le concert de Zacharie Richard a été le point d'orgue.