Il ne reste que quelques jours pour voir cette magnifique exposition …
Jean-Baptiste Carpeaux (1827 – 1875) est l'un des plus grands sculpteurs du siècle, à la carrière fulgurante pétrie d'audaces, de querelles avec les architectes, de profondes amitiés – avec Falguière, Charles Garnier, Charles Gounod - de scandales et de succès.
La fontaine des 4 parties du monde devant l'Observatoire, le groupe de la Danse à l'Opéra de Paris, le triomphe de Flore au fronton du Louvre … nous connaissons tous ces magnifiques sculptures. Mais je n'imaginais pas la trajectoire personnelle de ce créateur hors norme qui vit le fils d'un maçon et d'une dentellière de Valencienne être invité aux fameuses Séries de Compiègne, protégé de la Princesse Mathilde, fidèle de l'empereur Napoléon III jusque dans l'exil, épouser à 40 ans une jeune fille noble de vingt ans sa cadette et mourir d'un cancer 8 ans plus tard.
Entré difficilement à l’École des Beaux-Arts en 1844, il suit l'enseignement de Rude (La Marseillaise de l'Arc de Triomphe). En 1854, il reçoit un grand prix qui lui permet de partir en séjour à la Villa Médicis à Rome, où il découvre Michel-Ange auquel il voue un culte absolu. Ses œuvres emblématiques de ce moment sont le Pêcheur à la coquille et le groupe Ugolin, tiré du chant XXXIII de l'Enfer de Dante.
A la Cour, Carpeaux réalise des portraits intimes du couple impérial, et surtout la statue du jeune prince, avec le chien Néro : un jeune garçon accessible, en costume de tous les jours, qui exprime, comme tous les bustes réalisés par le sculpteur à cette époque, la vie palpitante, le mouvement, la mélancolie parfois, la vérité toujours.
A 40 ans, il épouse Amélie de Montfort, fille de général, qu'il accable de sa jalousie. Elle sera veuve à 28 ans et gérera néanmoins fidèlement l'édition de ses œuvres.
En 1861, le jeune architecte Garnier a fait appel à Carpeaux pour l'un des groupes de trois personnages qui doivent orner le bas de la façade. Carpeaux crée un groupe de 8 figures dont la nudité scandalise le public pudibond. L’Administration envisage le retrait du groupe mais la guerre et la chute de l'Empire interrompront ce processus.
Privilège du visiteur, il peut à loisir admirer de très près ces merveilleuses statues pleines de vie et de malice. On découvre à cette occasion une très grande figure de l'art français, violent, visionnaire, audacieux et chaleureux, inventif et industrieux – il développe lui-même l'édition commerciale de répliques de ses chefs-d’œuvre, en différentes dimensions et matières.
On sort de l'exposition avec la très vive impression d'avoir découvert tout un pan de l'art français faisant le pont avec l'art du Vingtième siècle.
Jean-Baptiste Carpeaux, un sculpteur pour l'empire, exposition au musée d'Orsay jusqu'au 28 septembre.