One man show écrit, mis en scène et interprété par Olivier Sauton
Présentation : Olivier Sauton, jeune homme rêvant de devenir comédien vedette, inculte mais non sans esprit, rencontre par hasard Fabrice Luchini, son idole.Il lui demande d’être son professeur. Celui-ci accepte et, à travers trois cours de théâtre, il va surtout lui délivrer des leçons de vie, et faire découvrir au jeune homme qu’au-delà de la gloire et des femmes, il y a l’Art.
Mon avis : D’abord, il faut saluer la performance d’acteur d’Olivier Sauton. Ce qu’il accomplit sous nos yeux appartient au domaine de la haute voltige. Ce type est complètement schizophrène ! Pour passer d’un personnage à l’autre avec autant de rapidité, de virtuosité et de crédibilité est tout simplement ahurissant. On en oublierait presque qu’il est seul en scène…On l’aura compris dans le préambule, Olivier Sauton tient à la fois son propre rôle et s’accapare celui de Fabrice Lucchini. Lorsqu’il devient l’acteur, le mimétisme est saisissant. La voix, la gestuelle, les mimiques, tout y est.
Mais au-delà d’un jeu aussi réjouissant que convaincant, il faut aussi mettre en exergue la qualité de l’écriture. Toute la partie du dialogue qui revient à Fabrice Luchini est en tout point remarquable. Il faut entendre les analyses de texte qu’il propose sur les fables de La FontaineLa tortue et les deux canards, puis deLa cigale et la fourmi. C’est du nanan ! C’est brillantissime. Et il n’y a pas que ça… Il y a aussi ses longues envolées lyriques avec ce timbre si particulier, ces aphorismes dévastateurs, ses répliques assassines et mordantes. Ah ce chapitre sur la connerie ! Et ces salves misogynes ! Car dans ce spectacle, on parle certes beaucoup de littérature et de théâtre, mais aussi énormément des femmes. Chacun à sa manière, Olivier Sauton et Fabrice Luchini sont de grands amoureux. Ce dernier se complaît d’ailleurs à énumérer ses conquêtes.
En résumé, ce spectacle, très complet à tout point de vue, est une sorte de conte initiatique en hommage aux livres, aux auteurs et au théâtre. C’est de l’amour-passion pour les mots mêlé à une profonde humilité face aux chefs d’œuvre. Tout ceci est synthétisé dans un final en forme d’apothéose, l’affrontement à un « Himalaya » du comédien : la dialogue entre Alceste et Philinte dansLe Misanthrope. On ne peut rêver de plus belle conclusion.
Olivier Sauton ne se donne pas le beau rôle en apparaissant quasiment tout au long de la pièce comme un individu un peu primaire, totalement aculturé, mais content de lui et plutôt enclin à la grivoiserie. Luchini s’échine apparemment en vain pour le tirer vers le haut et faire de lui un acteur qui comprend ce qu’il récite. Ce n’est que tout à la fin qu’il assiste médusé (et presque jaloux) à la métamorphose soudaine de son élève…
Gilbert "Critikator" Jouin