Un coeur en hiver - 7,5/10

Un film de Claude Sautet (1992 - France) avec Daniel Auteuil, Emmanuelle Béart, André Dussollier, Brigitte Catillon, Elisabeth Bourgine, Maurice Garrel, Myriam Boyer

Simple et beau.

L'histoire : Maxime et Stéphane sont luthiers et travaillent ensemble. On pourrait dire qu'ils sont amis. Ils s'entendent bien, ils font du sport ensemble, ils sont passionnés par la musique. Pourtant si Maxime mène une vie que l'on pourrait qualifier de "normale" (mais qu'est-ce que la norme ?), Stéphane est taiseux, solitaire, froid... et même carrément antipathique pour certains. Il ne laisse passer aucune émotion et ne semble attaché à rien ni à personne. Lorsque Maxime tombe amoureux d'une jolie violoniste, Camille, Stéphane soudain semble un peu troublé. Ce coeur glacé fonctionnerait-il donc ? Stéphane serait-il autre chose que ce petit automate parfaitement réglé dont il donne l'image ? Camille se sent irrésistiblement attiré par lui, mais Stéphane adopte une attitude équivoque, soufflant le chaud et le froid...

Mon avis : Comment peut-on faire un aussi joli film avec... rien ? Pas d'histoire extravagante, ou pleine de rebondissements. Pas de folie amoureuse. Pas de décors époustouflants ou de scènes spectaculaires. Juste des acteurs, une petite trame de base, des dialogues et la magie opère. Claude Sautet décortique les âmes et celle de Stéphane (Daniel Auteuil) est bien énigmatique. Est-il une poupée de chiffon, ou au contraire un vampire manipulateur ? Un handicapé du coeur ou un pervers ? Comme pour un film à suspense, on est captivé par ce personnage et on a envie de savoir s'il va réussir à se lâcher un peu, à nous en dire plus... Le titre est magnifique. Tout y est !

C'est franchement le genre de film qu'a priori je n'aime pas. Preuve donc qu'il ne faut pas se laisser aller aux préjugés. Tranche de vie, quotidien, silences, tout ce qui me fait fuir d'habitude... Et pourtant ce fut un régal de voir ces comédiens nous raconter une histoire qui, si elle paraît toute simple à l'écran, nous invite à imaginer un "avant" (comment Stéphane a-t-il pu s'enfermer ainsi ?) et un après (heureux ou malheureux). Le procédé est malin... et il faut bien du talent pour le mettre en scène !

Les acteurs sont formidables, à commencer par Auteuil, d'une intensité extraordinaire. Je ne l'avais jamais vu aussi étrange et fascinant !

Je n'avais pas vu de Sautet au moins vingt ou trente ans... c'était une époque où je n'appréhendais évidemment pas les choses de la même façon. J'ai maintenant envie de (re)découvrir tous ses films.  

Un des mystères du cinéma français :

Quel désastre quand on contemple le visage d'Emmanuelle Béart qui était alors l'une des plus belles, sinon la plus belle actrice de sa génération... Les transformations qu'elle a fait subir à son visage sont vraiment incompréhensibles. Qu'elle était jolie ! Faut-il donc être narcissique pour penser que la nature ne vous a pas suffisamment gâtée et qu'il faut lui donner un coup de pouce. On serait tenté de dire "Bien fait pour elle..." Mais au contraire, cela fait pitié... Espérons qu'elle assume ce qu'elle a fait. Elle semble le faire sur les tapis rouges, mais au plus profond d'elle-même ? Elle n'est pas la seule ? A ce point, si, je trouve ! A part les frères Bogdanov, je ne vois pas...