#Hyperincinérateur
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Publié le 22/10/2013par A. L.
L'élu alsacien Daniel Dietmann défend une autre voie que l'incinération
Daniel Dietmann© PHOTO DRMaire de Manspach (Haut-Rhin) et vice-président de la Communauté de communes de la Porte d'Alsace (16 000 habitants), Daniel Dietmann a réussi, il y a 23 ans, à convaincre ses collègues élus et les citoyens de réduire leurs déchets. Grâce à la tarification incitative et la pesée embarquée, les habitants de Manspach jettent deux fois moins de déchets que le Français moyen.« Sud Ouest ». Qu'est-ce qui vous a poussé, il y a 23 ans, à réfléchir sur la question de l'incinération et à chercher à vous en passer ?Daniel Dietmann. Les citoyens ! Le territoire du Haut-Rhin était embringué dans un programme du tout incinérateur qui a généré beaucoup de problèmes de pollution. À l'époque, nous avions aussi à quelques kilomètres de notre village, une décharge de 325 000 tonnes. Les gens n'en pouvaient plus. Les élus avaient la pression des citoyens. J'ai commencé tout seul dans mon coin. Certains m'ont traité de fou. Mais cela a vite pris. Beaucoup de mes collègues m'ont dit que ça ne coûtait rien d'essayer. Je n'aurai jamais pensé qu'on serait arrivé à un tel résultat. Mais attention, je ne dis pas qu'il faut fermer tous les incinérateurs. L'incinération est encore nécessaire pour la queue de la collecte. Mais nous avons bien trop d'incinérateurs en France.Comment avez-vous réussi à réduire vos déchets et à vous passer presque de l'incinération ?Nous avons organisé beaucoup de réunions dans nos 33 communes. On a mis en place une collecte sélective au porte à porte. On a fait de l'éducation, on a communiqué devant les supermarchés pour moins consommer d'emballages. On a fait passer le message de « la valeur ajoutée du geste du tri ». Cela signifie qu'un déchet trié devient un produit valorisé que l'on peut revendre. Les gens se sont mis à mieux trier. Mais d'autres s'en fichaient. Alors en 2000, on a mis en place la pesée embarquée. Tout travail mérite salaire. Ce qui est non trié est mis dans un bac à part, pesé avec une puce électronique. Et l'on paye au kilo.Avec quels résultats aujourd'hui ?Il y a vingt ans, on était à 400 kilos de déchets ménagers par an et par habitant. Et on nous prédisait les 500 kilos ! Aujourd'hui, on en est à 78 kilos contre 130 en moyenne en France. Nous valorisons 74 % de nos produits résiduels alors que la moyenne française n'atteint pas 40 %. Le coût global de la collecte et du traitement des déchets ménagers sur la CdC, qui compte 16 000 habitants, s'élève à un million d'euros. La vente des différents produits nous rapporte 360 000 euros. Nous arrivons à un coût moyen par an et par habitant de 56 euros contre 130 euros pour la moyenne nationale.Aujourd'hui, les industriels et les élus garantissent 0 % de dioxine à la sortie des cheminées. Qu'en pensez-vous ?C'est impossible. Il faudrait être complètement téméraire ou inconscient pour dire des choses comme cela. À partir du moment où vous mettez un certain nombre de substances entre elles, vous fabriquez d'autres substances dont de la dioxine. Un incinérateur est un fantastique disperseur atmosphérique des déchets que l'on met dedans. Les polluants se dispersent, se diluent mais notre environnement récupère tout ça. Ce qui est dispersé se reconcentre.Les élus locaux estiment qu'une solution alternative au tout incinération comme la vôtre n'est pas transposable sur un territoire plus grand. Que leur répondez-vous ?Les exemples où ça marche sont tellement nombreux, que ce n'est plus un bon argument. Notre expérience a largement métastasé dans le département du Haut-Rhin qui compte 807 000 habitants.La quasi-majorité des CdC sont passées à la tarification incitative et à la pesée embarquée. Besançon (220 000 habitants) ou Edmonton au Canada (550 000 habitants) n'ont plus d'incinérateur. Ce n'est pas une question de technique mais une question entre les hommes. L'incinérateur est une histoire du passé. Chez nous, les incinérateurs de Colmar et de Mulhouse commencent à tourner à vide par manque de déchets !Dans un contexte de crise et alors que les directives européennes vont dans le sens d'une réduction des déchets, on continue de construire des incinérateurs.Compte tenu des contraintes européennes qui exigent la réduction des déchets, l'incinérateur va à l'encontre de cette manière de préparer l'avenir. Le curatif est beaucoup plus intéressant en termes technologiques.Des lobbyings, des ingénieurs montent des usines à gaz. Intellectuellement, c'est plus intéressant. Mais le préventif coûte des milliers de fois moins cher que le curatif. Aujourd'hui, ce qui coûte le moins cher, c'est le recyclage. En période de crise, il faut trouver la véritable voie. Les gens ont longtemps rêvé d'avoir toujours plus. Mais aujourd'hui, il faut dépenser moins et chercher le « mieux ».