« Je ne veux certainement pas leur laisser un héritage qui sera un poids pour eux. » A la tête d’une richesse personnelle estimée à 180 millions de livres (225 millions d’euros), le chanteur Sting refuse de donner sa fortune en héritage à ses enfants. Certaines grandes fortunes semblent bien décidées à ne pas gâter leur progéniture … jusqu’à un certain point.
Et le yacht revient … à votre mère.
« Tous mes enfants en sont conscients, j’apprécie et je respecte qu’ils ne me demandent presque rien », explique Sting. Ce qui n’est pas le cas pour les trois enfants de l’acteur Philip Seymour Hoffman. Décédé le 2 février dernier à la suite d’une overdose, ses enfants ont découvert, à leur grande surprise, que leur père ne voulait pas leur transmettre sa fortune à sa mort (35 millions de dollars), de peur qu’ils ne deviennent des “trust fund babies” : autrement dit, qu’un joli chèque tombe tous les mois sur leur compte en banque.
Qui sont ces « trust fund babies » ?
Une opération habituelle pour des jeunes parents dont la fortune est importante est d’établir un trust fund pour leurs enfants. Un trust fund est une entité légale établie pour fournir une stabilité financière à un individu, le plus souvent un membre de la famille ou une organisation caritative.
Elle permet de concentrer la propriété de cash, d’actions, de biens ou d’autres actifs, le plus souvent jusqu’à ce que les bénéficiaires atteignent un certain âge ou que les parents décèdent.
D’ici là, la gestion du trust fund est laissée à un « Trustee », dont la tâche consiste à atteindre les objectifs de distribution et éventuellement, d’investissement des ressources.
On appelle ainsi « trust fund babies » les individus dont les parents ont mis en place un trust fund dès le plus jeune âge : le plus souvent, les gains générés par le fonds permet de dégager tous les mois un salaire « relativement confortable » pour la personne concernée.
Pourquoi éviter à tout prix un héritage ?
Les « trust fund babies » sont souvent décris comme des enfants gâtés et paresseux, qui n’ont jamais dû travailler pour mériter un salaire. N’ayant pas besoin de faire d’efforts pour gagner leur vie, ils ne développeraient pas les compétences nécessaires pour exercer un emploi ou être indépendant. Ce sont ces raisons qui poussent les parents fortunés à ne pas établir de trust fund et à pousser leurs enfants à être financièrement autonomes.
Certains parents qui ont réellement connu la misère et dont la fortune est le fruit d’un dur labeur se rappellent d’où ils viennent – et sont allergiques à l’idée des trust funds, à l’instar du bassiste de KISS et ses 300 millions de dollars :
« je vais faire en sorte que mes enfants soient forcés de se lever le matin, travaillent et trouvent leur propre voie »
Une variante consiste aussi à interdire l’accès au trust fund à ses enfants jusqu’à 35-40 ans, pour que l’enfant ait le temps d’apprendre à gérer une grande fortune.
C’est la voie choisie par Chuck Feeney, le co-fondateur du Duty-Free Shoppers Group, dont la fortune a atteint 7,5 milliards de dollars dans les années 80. Avant de distribuer son héritage, il apprit à ses enfants la valeur de l’épargne, en les forçant à travailler durant les vacances et à prendre des jobs à temps partiel pour financer leur frais de scolarité.
Tu n’auras pas d’héritage … jusqu’à un certain point
Cependant, la plupart des grandes fortunes consacrent évidemment une grande partie de leur fortune à construire un héritage pour leurs enfants. Comme le dit Warren Buffet, le montant parfait à laisser à ses enfants doit être « assez pour qu’ils puissent faire n’importe quoi, mais pas assez pour qu’ils ne puissent rien faire du tout ».
Même si les parents ne laissent pas d’héritage sous forme de compte en banque, il n’empêche qu’être le fils ou la fille d’un milliardaire peut être utile. Et Jamie Johnson (héritier de la famille Johnson & Johnson, à la tête d’une fortune de 600 millions de dollars et auteur du documentaire « Born Rich ») sait de quoi il parle.
« Quand des personnes fabuleusement riches disent : « je ne laisse pas un sous à mes enfants », c’est clairement faux. Même si les enfants n’ont pas un accès direct à du cash, ils accèdent souvent à la meilleure éducation, vivent dans des somptueuses maisons, ont les meilleurs contacts et opportunités de carrières. Toutes ces choses que seules les familles riches peuvent fournir. Ce sont seulement des manières différentes de laisser un héritage. »
Finalement, quel effet l’argent des « trust fund babies » a sur leur capacité à être autonome dépend surtout de l’éducation des parents : dans quelle mesure ont-ils préparé psychologiquement leurs enfants à recevoir cette richesse, leur ont-ils donnés les compétences financières pour le gérer et leur ont-ils transmis une éthique de vie. Car si les frasques d’héritières comme Paris Hilton sont largement exposées, les réussites de businesswoman comme Ivanka Trump, graduate de Wharton qui a réussi à faire largement fructifier son héritage et son nom au service de son succès professionnel, sont au contraire passées sous silence.