d'après SUR LES CHATS de Maupassant
L’autre jour, assis sur un banc,
Je lisais un roman
Quand un gros matou
Sauta sur mes genoux.
Il se mit sur le dos,
Les pattes en l’air,
Me montrant ses crocs
Et ses yeux verts.
Je caressais la bête douce et nerveuse,
Souple, chaude, délicieuse et dangereuse.
Ravie, elle ronronnait.
Le chat aime autant griffer qu’être flatté
Celui-ci tendait son cou, ondulait,
Et quand je cessais de le toucher,
Il se redressait
Et poussait la tête sous ma main levée.
Je l’énervais et il m’énervait.
Les chats, je les aime et je les hais.
Même s’ils ont envie de me déchirer,
Je prends plaisir à les caresser,
À glisser la main dans leur poil soyeux,
Que c’est délicieux !
Les chats sont perfides et charmants.
Quand ils se roulent sur moi voluptueusement,
Quand ils ronronnent sous mes caresses
En me regardant,
Je sens bien l’insécurité de leur tendresse.
Mais si l’un d’eux veut me griffer,
Je le saisis et le lance au loin si rapidement
Qu’il n’a pas le temps de se venger.
Baudelaire les a divinement chantés.
On connait son admirable sonnet :
Les amoureux fervents et les savants austères
Aiment également, dans leur mûre saison,
Les chats puissants et doux, orgueil de la maison,
Qui comme eux sont frileux, et comme eux sédentaires.
Amis de la science et de la volupté,
Ils cherchent le silence et l’horreur des ténèbres.
L’Érèbe les eût pris pour ses coursiers funèbres
S’ils pouvaient au servage incliner leur fierté.
Ils prennent, en songeant, les nobles attitudes
Des grands sphinx allongés au fond des solitudes
Qui semblent s’endormir dans un rêve sans fin.
Leurs reins féconds sont pleins d’étincelles magiques.
Et des parcelles d’or, ainsi qu’un sable fin,
Étoilent vaguement leurs prunelles mystiques.