Il m’arrive parfois de devoir rédiger un texte manuscrit commençant par ces mots : « Je soussigné déclare sur l’honneur … ». Je me demande alors, avec perplexité, quelle peut bien être la signification de ces paroles de nos jours où ne subsiste plus qu’une seule valeur, l’argent. Et ceci précisément en cette année où l’on célèbre le centième anniversaire du début de la première guerre mondiale. Cette guerre où a disparu toute une génération de Français. Un conflit pendant lequel des généraux n’hésitaient à sacrifier en une journée des milliers d’hommes, pour gagner une centaine de mètres qui seraient reperdus le lendemain, à seule fin de pouvoir claironner un communiqué de victoire. J’ai le cœur serré chaque fois que je lis sur un monument aux morts les noms de ceux qui furent tués pendant ce cataclysme, noms qui constituent parfois des fratries entières sacrifiées au fil des ans.
Au XXI° siècle, qui succède à ces héros pour servir la France ? Un quadra négligent, atteint d’une phobie administrative, qui l’empêcherait de déclarer ses revenus, donc de payer ses impôts et qui, en prime, oublierait de régler son loyer. Comment donc Thomas Thévenoud a-t-il pu obtenir un poste de secrétaire d’État ? Est-il possible de vivre lorsque l’on a son handicap ? Comment donc a-t-il pu constituer son dossier d’inscription à Sciences Po ? Et comment a-t-il pu signer un contrat de travail pour exercer son activité de «chargé de formation» à la direction générale de ERDF ? Pourtant son infirmité n’a en rien freiné sa carrière.
À 26 ans, il entre au cabinet de Laurent Fabius, alors ministre de l’Économie et des Finances, en tant que conseiller technique. Élu premier adjoint au maire de la commune de Montceau-les-Mines en 2001, il est vice-président de la communauté de communes de Creusot-Montceau et devient vice-président du Conseil-général de Saône-et-Loire en 2008. Il préside également l’OPAC 71 de 2008 à 2012. Sauf à supposer que toutes ces charges soient des sinécures, on ne peut que s’étonner de voir un élu aussi oublieux accomplir, vraisemblablement à la satisfaction de tous, des tâches administratives aussi lourdes. Mais ce n’est pas tout. Élu, en juin 2012, député dans la 1re circonscription de Saône-et-Loire, il rejoint la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Il est élu, en mars 2013, vice-président du groupe socialiste. Dans le même temps, il est nommé vice-président de la mission d’information sur la fraude fiscale puisest membre de la commission d’enquête sur l’affaire Cahuzac ! En juin 2014, il est désigné porte-parole du groupe socialiste à l'Assemblée nationale. Enfin, couronnement suprême : le 26 août 2014, il est nommé secrétaire d’État chargé du Commerce extérieur, de la Promotion du Tourisme et des Français de l’étranger. Un météore vous dis-je !
Il me semble que nul porté à la procrastination ne soit en mesure d’exercer des fonctions de direction. Ce curieux serviteur de sa propre personne avance pour sa défense ne pas s’être enrichi. Encore heureux ! Quoique. Il a été surpris, en février 2013, pendant une séance de l’Assemblée, en train de jouer au scrabble avec Jérôme Guedj. Est-ce que ces deux honorables parlementaires réalisent qu’un patron ne tolérera jamais que ses ouvriers, dix fois moins payés que les susdits, puissent jouer pendant leurs heures de travail ?
Celui qui avait déclaré à propos de M. Cahuzac : « J'ai une question toute simple à lui poser : pourquoi a-t-il menti à la représentation nationale ? (Et) pourquoi il s'est menti à lui-même ? » est si peu conscient du caractère scandaleux de ses agissements qu’il ne craint nullement de retrouver ses collègues députés. Seule une peine d’inéligibilité pourrait lui faire comprendre ce qu’est la vie de compatriotes moins choyés que lui.