Grâce à la façon dont il permet d’agréger du contenu, Twitter est sur la voie de devenir un outil essentiel à prédiction d’événements réels, en permettant par exemple de relever l’état des dommages urbains après une catastrophe.
L’analyse d’un tweet permet d’apprendre plus d’informations qu’il ne pourrait le sembler : la géolocalisation de l’émission d’un tweet est relativement précise pour en tirer des informations qui, agrégées, peuvent changer la façon dont un événement a affecté l’urbanisme au niveau local. Les ingénieurs du bâtiment peuvent en effet utiliser Twitter comme un stock d’indices de bonnes qualités puisque les photos prises pendant les catastrophes naturelles ne mentent pas. Les tweets servent ainsi à repérer les zones les plus touchées, c’est-à-dire celles qui concentrent le plus de bâtiments endommagés. L’étude de l’université du Colorado Boulder, menée par le chercheur Shideh Dashti, veut prouver que la localisation des endroits les plus touchés grâce à Twitter donne un bon sens des priorités aux équipes d’ingénieurs de reconnaissance en urbanisme.
Les inondations au Colorado en 2013 revue par Twitter
Cette étude résume l’utilisation qui a été faite de Twitter lors des inondations qui touchèrent une partie du Colorado en septembre 2013. Après une catastrophe naturelle, les équipes de reconnaissance connaissent généralement beaucoup de difficultés pour se déplacer dans ce type de régions sinistrées, tant les canyons et les routes sont bloqués par la montée des eaux. Quant aux avions, les tornades rendent leur travail de reconnaissance presque impossible. L’équipe au cœur de l’étude a utilisé le projet EPIC (pour Empowering the Public with Information in Crisis). Ce projet, initié par Palen et Kenneth Anderson en 2009, se proposait d’utiliser la production de données massives et immanentes de l’internet pour approcher les catastrophes naturelles par ceux qui les vivent. L’équipe de Dashti a ainsi récupéré les tweets stockés sur EPIC, qui ont pu être immédiatement "tagués" puis retranscris sur une carte lorsqu’ils étaient géolocalisés par les utilisateurs. Plus précisément, lorsque la géolocalisation était activée à l’instant du tweet. Or, affirme Dashti, la correspondance est assez significative entre la carte de l’émission des tweets et la carte des dommages subis dans une ville donnée.
Twitter à la rescousse de l’urbanisme
Cette étude sur la production de tweets comme soutien aux équipes de reconnaissance avant d’envisager des travaux d’urbanisme montre une fois encore l’impact que Twitter peut avoir dans des choix sociaux, loin de l’univers virtuel des réseaux. Avant l’étude de Dashti, les équipes d’urgences avaient déjà utilisé des réseaux sociaux pour isoler les zones les plus touchées. Mais c’est désormais les ingénieurs, c’est-à-dire des spécialistes qui ne sont pas dans une situation d’urgence, qui sont amenés à utiliser des contenus postés sur les réseaux de façon spontanée. C’est d’ailleurs en ces termes que Dashti donne sa vision du futur de l’aide à la reconnaissance en urbanisme : faire que les utilisateurs fournissent des données par une plateforme pour que l’information sur la détérioration des bâtiments en cas de catastrophes reviennent aux plus proches témoins. Le travail de veille sur la consolidation de bâtiments devrait être plus efficace si les données viennent directement des utilisateurs, avec par exemple la possibilité de créer des cartes dynamiques reposant sur la production de contenus (photos ou simple tweet) sur Twitter. L’internet et les réseaux continuent de disrupter la chaîne de valeur entre l’utilisateur et les instances de décisions collectives.