Cet ensemble de trois pièces de théâtre se lit réellement comme un tout, et c’est d’autant plus facile qu’elles sont courtes et se lisent très vite. Et l’émotion est au rendez-vous. Ce qui est épatant, c’est qu’on passe par toutes les nuances de la palette. On assiste à des scènes mutines lorsque Fanny essaye de provoquer Marius, à des scènes rêveuses lorsque Marius évoque la mer et ce besoin du large et du lointain, des scènes très drôles et pittoresques comme la mythique partie de cartes, et des scènes déchirantes lorsque Fanny doit décider si elle laissera partir Marius ou pas. Comme souvent avec Pagnol, on passe du rire aux larmes en quelques pages, et il conjugue à merveille légèreté et gravité.
Peinture de moeurs également, cette histoire met en avant l’éternelle opposition entre les sentiments et l’échelle sociale. C’est tout ce qui fait le charme de ce petit coin de Marseille : la joviale simplicité des gens du peuple, entre un étal de poissonnerie et un bar où le patron paye volontiers son petit coup et discute un petit peu trop fort avec ses camarades. C’est l’argent et la réputation qui viennent assombrir ce joli tableau. C’est vite autour de Fanny, de ses choix, de son avenir que l’intrigue se cristallise: peut-elle réellement épouser quelqu’un d’autre que Marius quand tout le monde sait qu’ils s’aiment depuis l’enfance? N'est-ce pas l’adultère assuré pour un vieillard que d’épouser une jeunette de dix-huit ans? Pour autant, les autres personnages ne sont pas en reste et j’ai particulièrement été touché par César, qui sous ses airs brutaux, cache un vrai coeur de guimauve. En si peu de pages, sans narrateur, les nuances et la complexité des portraits est impressionnante.
La note de Mélu:
Un mot sur l’auteur: Marcel Pagnol (1895-1974) est un auteur français, connu également pour son rôle dans le cinéma et le théâtre. D’autres de ses oeuvres sur Ma Bouquinerie: