Olivia Rosenthal est née à Paris en 1965. Depuis 1999, elle a publié neuf récits et sa première pièce, Les Félins m'aiment bien, a été créée en janvier 2005 à Saint-Denis, dans une mise en scène d'Alain Ollivier. Par ailleurs, elle réalise régulièrement, en collaboration avec des cinéastes, des écrivains, des chorégraphes ou des metteurs en scène, des performances pour divers lieux et festivals. Elle enseigne la littérature à l'Université Paris VIII (Vincennes-Saint-Denis) où elle a participé à la création en 2013, d’un des premiers masters de création littéraire de l'enseignement supérieur français. Son dernier roman, Mécanismes de survie en milieu hostile, vient de paraître.
A titre intrigant, roman qui l’est tout autant. J’irai même jusqu’à dire qu’il est du genre complexe et qu’il ne s’adresse pas aux lecteurs passifs cherchant à passer le temps dans les transports en commun. Même si les premières pages du bouquin s’ouvrent sur ce qui ressemble à une sorte de thriller post-apocalyptique (éventuellement, La Route de Cormac McCarthy), - la narratrice s’enfuit en laissant derrière elle une femme, dont on ne sait rien, dans des décors mal précisés mais dangereux -, le lecteur comprend vite qu’il n’en est rien et que la forme comme le fond, sont particulièrement ambitieux.
J’avoue humblement, avoir eu beaucoup de mal à écrire ce billet car le roman offre plusieurs niveaux de lecture, chacun proposant une piste à la compréhension globale sans jamais nous y amener, si ce n’est à la fin sans que ce soit explicitement notifié. Un ouvrage dont on pourrait beaucoup discuter mais qui par écrit nous emmènerait trop loin.
Pour faire très court, le livre parle de la mort d’un proche et de la tentative de réconciliation avec la camarde. Le roman, écrit nerveusement, est découpé en cinq chapitres qui peuvent paraître dissociés mais qui s’avèrent former un tout, du moins dans l’esprit du propos abordé par l’auteure. J’ai dit qu’il avait des allures de thriller, et tout du long il en conservera les caractéristiques, le mystère (de quoi nous parle ce livre ?), l’angoisse car la lecture est particulièrement anxiogène, effet accentué par le parti pris d’insérer dans la narration et venant en écho, des extraits de textes en italiques (rapports de police sur une scène de crime, ou d’autopsie, détails tirés d’ouvrages sur la décomposition des corps etc.). Même quand le sens de ce qu’on lit nous échappe, il est très difficile de lâcher ce bouquin tant il intrigue, tant il trouble, car le lecteur se trouve amené à pénétrer des zones de connaissances ou de l’esprit qu’il n’est pas toujours prêt à vouloir vraiment explorer.
Parfois on à l’impression d’être face à des métaphores, la narratrice explorant une demeure où elle va s’abriter on s’interroge, est-elle un être humain ou bien serait-ce la représentation de la maladie gangrenant le corps (la maison) ? Cette femme est-elle un corps vivant ou bien s’agit-il de son esprit/âme/conscience qui s’exprime ? Les passages en italiques relatant des expériences de mort clinique, ou de décédés revenant à la vie, nous invitent à suivre cette fausse piste. A partir de situations à peu près identifiées, ça part en dérapages métaphysiques affolants.
Souvent je râle quand je lis des critiques de romans où l’on ne comprend rien du contenu du bouquin ; j’ai peur qu’aujourd’hui je ne sois tombé dans ce travers. Mais avant de me jeter la pierre, penchez vous sur ce roman qui en vaut le détour, peut-être excuserez-vous alors, mes difficultés à vous le présenter mieux. PS : Attention, il s’adresse à un public averti, vous l’aurez compris.
« Alice P. est surprise de la faculté avec laquelle on s’éteint, de la simplicité de cet évènement, on en fait toute une histoire alors qu’en réalité, malgré la souffrance physique, c’est une aventure presque douce. En agonisant, on sécrète des endomorphines, on s’anesthésie soi-même, on accède à un état d’indifférence et presque d’ataraxie. Tout le monde devrait connaitre au moins une fois cette expérience provisoire qui réconforte, apaise et réconcilie avec sa propre mort et celle de ses proches. »
Olivia Rosenthal Mécanismes de survie en milieu hostile Verticales – 185 pages -